Groupe De Soignant Souffrance En Milieu Hospitalier
Compte Rendu : Groupe De Soignant Souffrance En Milieu Hospitalier. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires», « l’existence de signes psychologiques après la mort d’un malade est massivement admise », et les soignants ressentent les pertes répétitives induites par la mort des malades, comme un stress majeur qui occasionne de nombreux symptômes, surtout psychologiques. Mais, dit-il, « l’usure des soignants ne survient pas seulement pour des raisons psychologiques, mais aussi à cause d’une caractéristique de la question traitée. C’est une question sans réponse ; le problème de la mort ne connaît pas de solution ».
Ainsi, précise-il, les soignants n’affrontent pas la mort mais les morts d’un flux continu de patients. Quelques huit années plus tard, Ruszniewski reprend en écho la même analyse et assigne la genèse des « souffrances les plus tenaces », non pas tant à la perception de la mort qu’à « l’incessante oscillation entre omnipotence et impuissance ». Le désarroi, la confusion, l’angoisse des soignants sont inhérentes à l’échec, à l’impossibilité de guérir et de construire un projet commun pour le malade mourant. Goldenberg clarifiait cette dimension lorsqu’il indiquait que les manifestations psychologiques de la souffrance devaient être situées au milieu d’autres, « non plus psychologiques mais plutôt existentielles », occasionnées par le manque de points de repères individuels, l’absence « d’une échelle des valeurs qui permettrait au soignant de penser sa propre pratique ». Il proposait la notion de désespoir thérapeutique pour traduire l’état des soignants qui « s’occupant constamment de patients dont une grande partie ne survivra pas doutent de leur capacité à sauver leurs patients ». Les soignants, animés de sentiments d’échec et d’inutilité, doutent de l’intérêt de leur tâche et remettent en question le sens de toute l’entreprise thérapeutique. Goldenberg souligne alors que ce ne sont pas seulement les soignants en tant qu’individus qui sont concernés ; c’est, à un autre niveau, l’institution de soins qui est en crise, car elle est incapable de trouver dans ses références le moyen d’assumer les difficultés de sa fonction et de soutenir ses propres membres. C'est cette incapacité institutionnelle qui engendre selon lui l’idée de faire appel à un tiers, à quelqu’un de l’extérieur.
Peu après, en 1989, Villatte et Logeay mènent une étude de psychopathologie du travail concernant les soignants et la mort dont il résulte que : « l’organisation du travail soignant qui peut être plus ou moins souple, voire extrêmement rigide, conditionne la qualité des relations dans le service hospitalier, et par là même la gestion de la mort ». Ils mettent l’accent sur le fait que la régulation collective de la souffrance, en raison de la survenue de la mort, est fonction de la place faite à la parole dans l’organisation du travail. Ils concluent que l’accompagnement des mourants, reconnu comme rite de mort, ne peut avoir de sens sans un accompagnement des soignants dans des groupes d’expression internes aux services qui favorisent par leur ritualité un travail de deuil, et sans une formation particulière.
Le rappel de ces quelques données, qui sont contemporaines de l’essor du mouvement des soins palliatifs et de leur institutionnalisation, présente à mon sens un double intérêt.
- Le premier : celui de montrer que la souffrance des soignants était d’emblée rapportée à un ensemble de facteurs qui n’étaient pas qu’individuels et seulement psychologiques mais aussi institutionnels, idéologiques, culturels, organisationnels.
- Le deuxième intérêt qui est une conséquence du premier : celui de ne pas réduire la finalité des groupes de parole à une investigation des ressorts psychologiques des difficultés individuelles, essentiellement relationnelles.
La réponse d’un psy à une demande institutionnelle, écrivait Goldenberg dans l’article pré-cité, devra prendre en compte la complexité des situations et donner au psychologique une place convenable. « Faute de quoi - je le cite-, ce psy ferait du « tout psychologique » comme l’institution peut faire du « tout scientifique ». Il masquerait une partie de la réalité qu’il devrait contribuer à transformer. Il deviendrait alors un spécialiste –spécialiste de la relation- parmi d’autres spécialistes, dernier avatar de la toute-puissance médicale, laissant croire comme d’autres avant lui, que la médecine trouvera des remèdes à la mort et au malheur. Ce faisant, le psy lui aussi risquerait de devenir fabricant de souffrance ».
Vingt ans après, les groupes de parole …
Depuis vingt ans, la pratique des groupes de parole s’est largement développée. Il semble qu’un consensus se soit établi sur sa nécessité comme recours contre la souffrance dans de nombreux services. Il est institutionnalisé dans les services de soins palliatifs et fréquemment présent dans les services à haut taux de mortalité, selon l’expression consacrée. Les modalités de sa mise en place et les règles de fonctionnement sont semblables d’un lieu à un autre.
Nous retrouvons dans la littérature une quasi-unanimité pour définir le groupe de parole et caractériser sa finalité.
Le groupe de parole : sa définition
Examinons quelques définitions emblématiques issues des textes de Ruszniewski : le groupe de parole est :
- un lieu de soutien structuré par la présence d’un intervenant extérieur de formation psychologique ;
- un lieu de soutien susceptible de prendre en compte la souffrance des soignants et de faciliter la régulation des fonctionnements internes ;
- un lieu de formation propre à favoriser l’apprentissage de l’écoute et de la prise de parole de chacun des membres de l’équipe ;
- un espace d’échange, un espace où la parole des soignants s’exprime sur un mode différent ;
- un espace de libre expression qui concerne la mise en mot du vécu, la verbalisation ; c’est une parole dynamique, en mouvement ;
- un temps de partage proposé à la réflexion, propre à rétablir une communication.
Trois termes définissent le groupe de parole dans ses fonctions opératoires, c’est un lieu de soutien, de formation, d’échange.
Le groupe de parole : sa finalité
Quant à sa finalité comme visée de transformation, nous relevons que :
- la finalité du groupe est toujours l’amélioration de la relation soignant/soigné par l’atténuation de la souffrance des soignants ;
- le groupe de parole aide les soignants à analyser leurs réactions face aux malades arrivés à la fin de leur vie et ainsi développer un réel accompagnement ;
- dans certaines conditions, le groupe parviendra à atténuer cet isolement dépressif propre aux soignants qui accompagnent les malades atteints de pathologie lourdes ;
- le groupe de parole est fait pour se situer dans une dynamique de sujet, pour redonner à chacun sa place de sujet ;
- (mais), le groupe de parole n’a pas à devenir un espace d’analyse des problématiques individuelles.
Autour de trois mots-clés, sujet–souffrance–relation soignant/soigné, s’organise la visée du groupe de parole qui est, conjointement, d’améliorer la relation soignant/soigné et d’atténuer la souffrance des soignants.
Comment le groupe de parole poursuit-il sa finalité ? Comment travaille-t-il ?
Le travail du groupe apparaît dans les textes en filigrane dans le constat des effets qu’il génère :
- le travail, qui se fait au sein des groupes de parole, amène à être dans le respect mutuel et à reconnaître la subjectivité ;
- c’est par la reconnaissance des subjectivités des uns et des autres, à travers le travail des groupes de parole, que le soignant peut accepter celle des patients.
Reconnaissance de la singularité du sujet et approfondissement d’une éthique relationnelle vont de pair pour autant que le soignant accepte ses limites. En ceci, il est aidé par les règles du groupe qui déterminent les conditions d’expression et de circulation de la parole.
Reprenons les textes :
- Pour être à même de reconnaître la place du sujet, il est indispensable que le soignant reconnaisse qu’il peut être fatigué, épuisé, démotivé.
- En acceptant ses propres limites, on accepte mieux le travail, on accepte mieux les limites des autres. On accepte les limites et les richesses de chacun. On se rend compte qu’il n’y a pas d’idéal soignant. Les membres d’une équipe s’enrichissent alors les uns des autres.
Ceci peut se faire si deux conditions sont réunies. La première tient au fait que, je cite : « Dans le groupe de parole, on a le droit de dire ses sentiments négatifs, ses émotions douloureuses ; ce qui
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