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Hypothèque

Cours : Hypothèque. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  4 Juin 2019  •  Cours  •  6 308 Mots (26 Pages)  •  604 Vues

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N° 3342 – L’hypothèque Date de fraîcheur : 7 Juin 2016 Emmanuelle JUEN Maître de conférences – Université de Bourgogne Franche-Comté Membre du Centre de recherches juridiques de l’Université de Franche-Comté (CRJFC) APERÇU RAPIDE 1. Éléments-clés L’hypothèque est un droit réel accessoire grevant un immeuble « [affecté] à l’acquittement d’une obligation » (C. civ., art. 2393). Elle est constituée par un débiteur constituant au profit d’un créancier hypothécaire afin de garantir le règlement de la créance hypothéquée . Traditionnellement considérée comme la « reine des sûretés », la lourdeur des formalités qu’elle implique et l’incidence qu’ont sur elle les évolutions du marché foncier, lui ont toutefois nuis. L’ordonnance du 23 mars 2006 (Ord. n° 2006-346, 23 mars 2006 , relative aux sûretés : JO 24 mars 2006, p. 4475), suivie par celle du 21 avril 2006 (Ord. n° 2006-461, 21 avr. 2006 , réformant la saisie immobilière : JO 22 avr. 2006, p. 6072) opérant réforme de la saisie immobilière, l'a quelque peu revigoré en simplifiant tant sa constitution que sa mise en œuvre et en créant l’hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire. L’hypothèque est une sûreté réelle , donnant au créancier un droit préférentiel sur le produit de la vente d’un ou plusieurs biens immobiliers du débiteur. Les privilèges spéciaux sont des droits réels offerts par la loi à certains créanciers d’être préférés aux autres créanciers, en raison de la nature de leur créance. Remarque : • Les privilèges spéciaux immobiliers ne sont en réalité qu’une variété d’hypothèque légale ; • Le gage immobilier (anciennement antichrèse) est une sûreté réelle immobilière avec dépossession, consistant pour le débiteur à affecter l’un de ses immeubles en garantie d’une obligation (C. civ., art. 2387 et s.). 2. Textes de référence • C. civ., art. 2393 à 2488 • CPC ex., art. L. 531-1 à L. 533-1 et art. R. 531-1 à R. 534-1 • C. com., art. L. 611-11, L. 622-7, L. 622-17, L. 632-1, L. 641-13 • C. consom., art. L. 314-1 à L. 314-20 • C. assur., art. L. 121-13 3. Bibliographie LexisNexis 3.1. Synthèses JurisClasseur • JCl. Civil Code, Synthèse 1400 : Hypothèques légales et judiciaires • JCl. Civil Code, Synthèse 1410 : Hypothèque conventionnelle • JCl. Civil Code, Synthèse 1420 : Publicité des privilèges et des hypothèques Page 2 3.2. Fascicules JurisClasseur • JCl. Civil Code, Art. 2374 à 2488 • JCl. Civil Code, Art. 2374 • JCl. Civil Code, Art. 2375 et 2376 • JCl. Civil Code, Art. 2377 à 2386, fasc. 10, fasc. 20 • JCl. Civil Code, Art. 2393 à 2396 • JCl. Civil Code, Art. 2397 • JCl. Civil Code, Art. 2398 et 2399 • JCl. Civil Code, Art. 2400 et 2401 • JCl. Civil Code, Art. 2402 à 2408 • JCl. Civil Code, Art. 2409 à 2411 • JCl. Civil Code, Art. 2412 • JCl. Civil Code, Art. 2413 à 2315 • JCl. Civil Code, Art. 2416 • JCl. Civil Code, Art. 2418 à 2420 • JCl. Civil Code, Art. 2421 à 2423 • JCl. Civil Code, Art. 2424 • JCl. Civil Code, Art. 2425 • JCl. Civil Code, Art. 2426 à 2439, fasc. 10, fasc. 20, fasc. 30 • JCl. Civil Code, Art. 2440 à 2443, fasc. 10, fasc. 20, fasc. 30 • JCl. Civil Code, Art. 2449 à 2457 3.3. Revues JurisClasseur • La Semaine Juridique, Édition générale (JCP G – hebdomadaire) • La Semaine Juridique, Édition Notariale (JCP N – hebdomadaire) 3.4. Codes et ouvrages LexisNexis • P. Ancel, Droit des sûretés : coll. Objectif Droit – Cours, 7e éd. 2014 • M. Cabrillac, C. Mouly, S. Cabrillac et P. Pétel, Droit des sûretés : coll. Manuel, 10e éd. 2015 CONNAISSANCES 1. Dispositions communes L’hypothèque ne peut porter que sur des biens immobiliers (C. civ., art. 2397). Remarque : • Elle peut exceptionnellement porter sur certains meubles qui doivent être immatriculés donc localisés, permettant ainsi le respect de la formalité de publicité. Ces hypothèques mobilières bénéficient d’un Page 3 régime spécial (C. transports, art. L. 6122-1 et s. sur l’hypothèque aérienne ; C. transports, art. L. 4122-1 et s.sur l’hypothèque fluviale ; C. transports, art. L. 5114-6 et s. ; C. douanes, art. 241 et s. ; L. n° 67-5, 3 janv. 1967 , relative au statut des navires et autres bâtiments de mer : JO 4 janv. 1967, p. 106 ; art. 43 et s. et D. n° 67-967, 27 oct. 1967 , relatif au statut des navires et autres bâtiments de mer : JO 4 nov. 1967, p. 10836 ; art. 13 et s. sur l’hypothèque maritime). • En vue d’une nouvelle réforme du droit des sûretés, un courant doctrinal propose l’unification des sûretés réelles mobilières et immobilières, par la consécration d’une « sûreté hypothécaire unique ». Les biens qu’elle grève doivent être disponibles . Sont donc exclus les immeubles : • du domaine public ; • ayant fait l’objet d’un acte de saisie publié ; • intéressés par l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire en garantie de dettes postérieures (sauf accord du juge-commissaire). 2. Typologie et conditions d’existence des hypothèques L’hypothèque peut être de source conventionnelle, légale ou judiciaire. 2.1. Hypothèque conventionnelle Il s’agit de l’hypothèque constituée par un contrat conclu entre le créancier et le débiteur (ou un tiers). Son existence est soumise à des conditions particulières de fond et de forme. 2.1.1. Conditions de fond Le bien hypothéqué doit être présent dans le patrimoine du débiteur (C. civ., art. 2419). L’hypothèque de biens à venir est nulle de nullité absolue. L’article 2420 du Code civil fait toutefois exception à ce principe dans 3 hypothèses. Lorsque le constituant n’a pas ou pas suffisamment de biens présents pour garantir le paiement de la créance ou lorsque l’immeuble hypothéqué a péri ou a été tellement dégradé que sa valeur ne permet plus de garantir la créance, il peut affecter des biens qu’il acquerra par la suite au paiement de cette créance, au fur et à mesure de leur acquisition. Enfin, le débiteur peut hypothéquer l’immeuble à construire ou en construction en garantie du crédit permettant de financer cette construction. Le constituant de l’hypothèque est soit le débiteur , soit un tiers (sûreté réelle pour autrui ) acceptant d’affecter l’un de ses biens à la garantie de la dette d’autrui. La vente forcée étant un acte de disposition, le constituant doit être capable d’aliéner le bien (C. civ., art. 2413) mais doit également le pouvoir . Parfois, il ne le peut pas : tel est le cas à compter du jugement d’ouverture d’une procédure collective (C. com., art. L. 622-7) ou, pour la garantie d’une créance antérieure, durant la période suspecte (C. com., art. L. 632-1, 6°). Parfois, il ne le peut seul : l’hypothèque du logement de la famille (C. civ., art. 215) ou d'un immeuble commun (C. civ., art. 1424) est ainsi soumise au consentement de chaque époux. Le constituant doit être propriétaire du bien, à peine de nullité absolue de l’hypothèque. Remarque : • La Cour de cassation a toutefois admis la constitution d’une hypothèque par le dirigeant d’une SCI, alors mis en examen, sur un immeuble appartenant à cette dernière. Le fait que le constituant dirigeait à 99 % la société et que l’immeuble était l’objet de son infraction expliquent peut-être cette décision d’exception (Cass. crim., 4 mars 2015, n° 14-88.013). • L’anéantissement rétroactif du droit de propriété du constituant emporte anéantissement rétroactif de l’hypothèque (Cass. 3e civ., 7 janv. 2016, n° 14-18.360 : JurisData n° 2016-000035 ; JCP N 2016, act. 174, concernant la résolution du titre du constituant). Si l’erreur du créancier est légitime, il peut être protégé par la théorie de l’apparence. Toutefois, le constituant peut hypothéquer tout ou partie d’un immeuble indivis (C. civ., art. 2414). L’hypothèque consentie sur l'immeuble par l’ensemble des coïndivisaires conserve son effet, peu important le résultat du partage. Page 4 En revanche, si tous ne donnent pas leur accord, elle ne subsiste que si l’immeuble est attribué au débiteur ou licité par un tiers, le prix de la licitation étant attribué au débiteur. L’hypothèque consentie par le constituant sur sa seule quote-part du ou des immeubles ne subsiste que si le partage lui attribue l’immeuble. Elle porte alors sur la totalité de l'immeuble alloué au constituant. La créance garantie obéit classiquement à un principe de spécialité , en ce sens qu’elle doit être identifiée dans l’acte (C. civ., art. 2421). Il est toutefois fait exception à ce principe en présence d'une hypothèque rechargeable . L'article 2422 du Code civil permet, en effet, au constituant d'une telle hypothèque de l'affecter ultérieurement à la garantie de créances « autres que celles mentionnées dans l'acte constitutif ». Celui-ci doit expressément prévoir la faculté de rechargement, ainsi que son montant maximal. La convention de rechargement, conclue par acte authentique avec le créancier originaire ou un nouveau créancier, doit être publiée sous forme de mention en marge et prend alors rang à la date de l'inscription initiale. Depuis décembre 2014, cette hypothèque ne peut être constituée qu'à des fins professionnelles pour la garantie de créances professionnelles. Elle doit être évaluée et le montant garanti doit être déterminé dans l’acte. L’hypothèque ne couvre que la somme indiquée et ses accessoires. Les intérêts ne sont toutefois garantis que pour une durée de 3 ans (C. civ., art. 2293). Attention : Le constituant et le créancier hypothécaire peuvent préférer stipuler dans l’acte une clause de réévaluation. L’étendue de l’hypothèque correspond alors à la créance réévaluée. La créance peut être présente ou future : • La créance présente est la créance existant au jour de l’hypothèque.Le prêt viager hypothécaire(C. consom., art. L. 314-1 et s.), grevant un immeuble servant exclusivement à l’habitation du débiteur, consiste à garantir un prêt en capital ou sous forme de rente viagère accordé par un établissement de crédit à un particulier pour un usage non professionnel. L’originalité tient à ce que le remboursement de ce prêt ne devient en principe exigible qu’au jour du décès de l’emprunteur et pèse donc sur les héritiers. Les deux spécificités intéressant la technique hypothécaire sont que : – les héritiers peuvent préférer attribuer (éventuellement de plein droit, si un pacte commissoire le prévoit) l’immeuble au prêteur, ce qui est exceptionnel s’agissant de la résidence principale du constituant ; – la garantie couvre l’intégralité des intérêts du prêt, dérogeant ainsi à la durée de 3 années (C. civ., art. 2432, al. 1) ; • La créance future bénéficie d’une atténuation du principe de spécialité puisque seule sa cause doit être mentionnée dans l’acte. Remarque : L’hypothèque peut être donnée pour une durée indéterminée . Logiquement, elle peut alors être résiliée pour l’avenir, la garantie subsistant pour les créances déjà nées. L’article 2423, alinéa 3, du Code civil impose un préavis de trois mois. 2.1.2. Conditions de forme L’acte hypothécaire, parce qu’il réduit fortement la valeur de l’immeuble et met en péril le patrimoine du constituant, est soumis à des conditions de forme protectrices du constituant, sous peine généralement de nullité absolue . L’acte doit être passé sous forme authentique (C. civ., art. 2416) ; la procuration donnée en vue de la constituer également. Il doit contenir des mentions obligatoires , liées au principe de spécialité de l’hypothèque quant aux immeubles et aux créances (C. civ., art. 2418). 2.2. Hypothèques légales La loi accorde à certains créanciers le droit d’inscrire une hypothèque sur tout immeuble du débiteur. Page 5 2.2.1. Hypothèques légales simples Les hypothèques légales obéissent à un principe de généralité (dont la portée est néanmoins affaiblie par le principe de spécialité de l’inscription), en ce sens qu’elles portent sur l’ensemble des immeubles du débiteur (C. civ., art. 2401). Les hypothèques légales de l’article 2400 du Code civil Ce droit est notamment attribué : • à l’époux, « sur les biens de l’autre » (C. civ., art. 2402 et s.) ; • aux mineurs ou majeurs en tutelle, « sur les biens du tuteur ou de l’administrateur légal » (C. civ., art. 2409 et s.) ; • aux créanciers titulaires d’un privilège général mobilier, à l’égard des créances prévues à l’article 2331 du Code civil , exception faite des créances de frais de justice et de salaire. L’hypothèque légale de l’article 2412 du Code civil L’article 2412 du Code civil autorise le créancier non encore hypothécaire et ayant obtenu un jugement de condamnation (ou une sentence arbitrale revêtue de l’exequatur) de son débiteur, à inscrire une hypothèque sur tous les immeubles de ce dernier. Remarque : • Bien que cette hypothèque soit souvent dite « judiciaire », elle échappe totalement à l’appréciation des juges. Il s’agit en réalité d’une hypothèque légale offerte de plein droit au créancier à compter du jugement de condamnation. • Si cette hypothèque prend rang au jour de son inscription, elle naît au jour du jugement de condamnation (Cass. 1re civ., 28 oct. 2015, n° 14-15.114 : JurisData n° 2015-023945 ; JCP G 2016, 190). • L’inscription de cette hypothèque est subordonnée à la production d’un véritable jugement (Cass. 3e civ., 21 janv. 2016, n° 14-24.795 : JurisData n° 2016-000637 ; Procédures 2016, comm. 88, jugeant qu’un titre exécutoire délivré par un huissier de justice n’en est pas un et n’autorise pas l’inscription), qui ne doit toutefois pas nécessairement être signifié (Cass. 1re civ., 27 janv. 2016, n° 15-12.840 : JurisData n° 2016-001056). 2.2.2. Hypothèques légales privilégiées L’article 2374 du Code civil énumère limitativement 10 privilèges spéciaux immobiliers et notamment : • Le privilège du vendeur d’immeuble , naissant à la date de l'acte de vente d'un immeuble ou d'un droit immobilier susceptible d'hypothèque. Il porte sur l’immeuble vendu et certains de ses accessoires (les constructions et améliorations faites après la vente). Il garantit le montant du prix de vente et ses accessoires (notamment les intérêts légaux ou conventionnels dans la limite de 3 ans). L'action résolutoire pour non-paiement du prix par l'acheteur (C. civ., art. 1654) dépend de l’inscription de ce privilège ; • Le privilège du prêteur de deniers , autonome par rapport au précédent et octroyé à 2 conditions : l'existence d'un contrat de vente immobilière ou assimilé et celle d'un prêt. Portant sur l'immeuble et ses accessoires, il garantit le montant prêté affecté au paiement du prix de vente (à l'exclusion donc de la part permettant de financer les frais de notaire ou des travaux) et les intérêts conventionnels (dans la limite de 3 ans).En cas de coexistence des privilèges du vendeur et du prêteur, la doctrine est divisée quant à savoir si le premier prime ou s'ils viennent en concours ; • Le privilège des copartageants , portant sur un immeuble indivis et garantissant les partages faits entre eux, les soultes et retours de lots, ou encore le prix de la licitation. 2.3. Hypothèque judiciaire Le créancier craignant pour le paiement de sa créance peut demander au juge de l’exécution, par voie de requête et avant le jugement de condamnation, de l’autoriser à inscrire immédiatement et provisoirement son hypothèque Page 6 (CPC ex., art. L. 531-1 et s.), éventuellement sur un bien de la caution du débiteur principal si celui-ci est soumis à une procédure collective (Cass. com., 2 juin 2015, n° 14-10.673 : JurisData n° 2015-013166 ; Procédures 2015, comm. 260). L’intérêt tient à ce que l’inscription définitive de l’hypothèque de l’article 2412 (V. supra) se substituera rétroactivement à cette inscription provisoire (et ce même si une procédure de liquidation judiciaire est ouverte postérieurement à cette dernière : Cass. com., 3 mai 2016, n° 14-21.556 : JurisData n° 2016-008400 ; JCPE 2016, act. 426 ; JCP N 2016, act. 649), permettant la conservation du rang de celle-ci. Remarque : Le créancier disposant d’un titre exécutoire peut inscrire sans sollicitation d’un juge son hypothèque conservatoire (qui est pourtant encore dite judiciaire...). Sauf contestation du débiteur, il pourra ensuite lui substituer une hypothèque définitive (CPC ex., art. R. 531-1 et s.). 3. Publicité des hypothèques Toute hypothèque, quelle que soit sa source, doit être publiée (C. civ., art. 2426), à l’exception du privilège des syndicats des copropriétaires (C. civ., art. 2378). La publicité se fait sous la forme d’une inscription au service de publicité foncière dans le ressort duquel l’immeuble est localisé. 3.1. Conditions de l’inscription L’inscription hypothécaire est soumise aux règles générales de la publicité foncière, ainsi qu’à quelques autres particulières qui seront seules développées. Les hypothèques et privilèges soumis à publicité sont soumis à un principe de spécialité des inscriptions hypothécaires (C. civ., art. 2426). L’inscription doit ainsi précisément indiquer : • la somme garantie, i.e. le principal et ses accessoires (C. civ., art. 2428) ; • les immeubles grevés par l’hypothèque (même générale). 3.2. Moment de l’inscription Le créancier hypothécaire peut procéder à la publicité à compter de la conclusion du contrat ou de la réunion des conditions nécessaires à l’inscription de l’hypothèque légale, sans limitation de délai. Remarque : En pratique, la prudence invite les créanciers hypothécaires à inscrire sans attendre leur hypothèque afin notamment d’en fixer le rang. Néanmoins, la survenance de certains évènements arrête le cours des inscriptions, i.e. interdit l’inscription (C. civ., art. 2427) : • la publication par un tiers de son droit sur l’immeuble, dans l’hypothèse où le débiteur a vendu ce dernier avant l’inscription par le créancier de son hypothèque ; • le décès du débiteur, dès lors que la succession est acceptée à concurrence de l’actif net ou est vacante ; seuls peuvent alors être inscrits certains privilèges spéciaux (C. civ., art. 2374) ; • la saisie immobilière ou la procédure collective ou de traitement des situations de surendettement de particuliers (sauf exceptions). Attention : En dehors de ces deux premières hypothèses, le créancier hypothécaire peut toujours publier son hypothèque contre les héritiers du débiteur. 3.3. Effets de l’inscription L’inscription fixe en principe le rang de l'hypothèque à sa date et la rend opposable aux tiers. 3.4. Extinction de l’inscription Page 7 3.4.1. Péremption L’inscription hypothécaire cesse de produire effet au bout d’une certaine durée, fixée par le créancier au moment de l’inscription, dans la limite d’un maximum légal (C. civ., art. 2434) : • si l’échéancier du paiement du principal de la créance garantie est fixé, l’inscription prise avant la dernière échéance se périme au plus tard 1 an après celle-ci, sans que la durée de l’inscription puisse être supérieure à 50 années ; • s’il ne l’est pas ou en présence d'une hypothèque rechargeable ou d'un prêt viager hypothécaire, l’inscription ne peut durer plus de 50 années à partir du jour de la publicité ; • si l’inscription a été prise postérieurement ou concomitamment à la dernière échéance, la durée est limitée à 10 ans à compter de la publicité. Attention : Les intérêts de la dette échappent aux règles sus énoncées et ne sont couverts que pour 3 années au même rang que le principal (exception faite du prêt viager hypothécaire). Le créancier peut toutefois procéder à une nouvelle inscription portant hypothèque, à sa date, des intérêts et arrérages. Afin d’échapper à la péremption de l’inscription, le créancier peut renouveler cette dernière dans le respect des délais de l’article 2434 du Code civil (C. civ., art. 2435). 3.4.2. Réduction et radiation (C. civ., art. 2440 et s.) Le débiteur peut obtenir en justice la réduction de l'inscription d'une hypothèque légale ou judiciaire excessive (C. civ., art. 2444). L’hypothèque conventionnelle est exclue, sauf à ce qu’elle garantisse une créance conditionnelle, éventuelle ou indéterminée non évaluée dans la convention (C. civ., art. 2445). Plus radicale, la radiation , volontaire (si le créancier accepte de donner mainlevée de l’hypothèque à la suite, par exemple, d’une remise de dette) ou judiciaire (par exemple, si le créancier refuse de donner cette mainlevée, alors que la créance est réglée), est la suppression complète de l’inscription hypothécaire, mentionnée en marge du registre hypothécaire. 4. Effets des hypothèques L’hypothèque attribue au créancier un droit de préférence et un droit de suite. 4.1. Droit de préférence 4.1.1. Définition Il s'agit du droit du créancier de se faire payer préférentiellement sur la valeur de l’immeuble. 4.1.2. Assiette L’assiette du droit de préférence, dictée par le principe d’indivisibilité de l’hypothèque (C. civ., art. 2393), porte sur la valeur intégrale de l’immeuble, laquelle comprend ses accessoires et ses améliorations (C. civ., art. 2397). Cette valeur garantit toute la créance, sans division possible (ni de la créance, ni de l’immeuble). Attention : En cas d’altération ou de destruction de l’immeuble, le droit de préférence s’exerce sur l’indemnité d’assurance, sauf à ce que l’assureur ait payé de bonne foi le débiteur avant l’opposition. Il s’agit d’une application de la notion de subrogation réelle (C. assur., art. L. 121-13). 4.1.3. Rang Principe L’hypothèque prend rang au jour de son inscription (C. civ., art. 2425), sauf cession d’antériorité convenue entre deux créanciers hypothécaires (C. civ., art. 2424). Page 8 Si plusieurs hypothèques portant sur le même immeuble sont inscrites le même jour, la date des titres des créances concernées règle le concours, la plus ancienne étant réputée d’un rang supérieur, peu important l’ordre des inscriptions sur le registre (C. civ., art. 2425, al. 2). Si les deux titres sont datés du même jour, les créanciers viennent à égalité (C. civ., art. 2425, al. 4 . – Cass. com., 5 mai 2015, n° 14-17.941 : JurisData n° 2015-010147 ; Act. proc. coll. 2015, alerte 179). Exception À certaines conditions, les privilèges spéciaux prennent rétroactivement rang à une date antérieure à celle de leur publication. Ainsi, les privilèges du vendeur d’immeuble et du prêteur de deniers inscrits dans un délai de deux mois à compter de l’acte de vente prennent rang au jour de cet acte (C. civ., art. 2379, al. 1). De même, le privilège des copartageants inscrit dans ce même délai mais à compter de l’acte de partage, de l’adjudication par licitation ou de l’acte fixant l’indemnité en vertu de l’article 924 du Code civil, prend rang au jour de la naissance de l'indivision, en raison de l'effet déclaratif du partage. Lorsque l’inscription du privilège est faite au-delà de ce délai, il ne prend rang qu’à la date de cette formalité (C. civ., art. 2386, al. 2). 4.1.4. Exercice Saisie immobilière Généralement, le droit hypothécaire du créancier s’exerce par le moyen d’une saisie immobilière, dont il est tenu de respecter les modalités (C. civ., art. 2458). Il se trouve à cet égard dans la même situation que tout créancier, à ceci près que l’hypothèque conventionnelle conclue par acte authentique le dispense de la demande d’un titre exécutoire. Remarque : L’ouverture d’une procédure collective empêchant cette saisie, le droit de préférence du créancier hypothécaire s’exercera alors lors de la vente du bien au moment de la liquidation judiciaire. Attribution judiciaire de l’immeuble en paiement et pacte commissoire Le droit du bénéficiaire d’une hypothèque conventionnelle peut également s’exercer par le biais de l’attribution, judiciaire (C. civ., art. 2458) ou conventionnelle (pacte commissoire – C. civ., art. 2459), de l’immeuble en paiement, sauf : • lorsque l’immeuble hypothéqué est la résidence principale du débiteur (exception faite du prêt viager hypothécaire) ; • s’agissant au moins du pacte commissoire, lorsque une procédure collective est ouverte (C. com., art. L. 622-7, al. 1). L’immeuble attribué doit faire l’objet d’une évaluation par un expert, désigné à l’amiable ou judiciairement. Si elle révèle une valeur du bien supérieure au montant de la créance, le créancier est tenu de payer au débiteur la somme égale à la différence. Si d’autres créanciers hypothécaires existent, cette somme doit être consignée afin d’en permettre le partage (C. civ., art. 2460). 4.2. Droit de suite Le créancier hypothécaire peut exercer son droit réel sur l’immeuble, bien que celui-ci ait été vendu par le débiteur. Le bien est saisi entre les mains du tiers acquéreur puis vendu, le créancier se payant préférentiellement sur le prix de la cession. Il s’agit de son droit de suite (C. civ., art. 2461). Le tiers acquéreur dispose toutefois de moyens de protection. Au moment de l’acquisition de l’immeuble hypothéqué Il peut procéder à la purge de l’hypothèque, en proposant aux créanciers hypothécaires de leur offrir le prix de la vente de l’immeuble (devant refléter sa valeur), lesquels se le répartissent selon leur rang. Page 9 Certaines opérations, dont les modalités garantissent la juste évaluation du prix, valent purge (la saisie immobilière (CPC ex., art. L. 322-14), la vente faite en présence d’une procédure collective (C. com., art. L. 642-18) et l’expropriation pour cause d’utilité publique (C. expr., art. L. 12-3, al. 1). Hors ces cas, une procédure légale existe afin de protéger les créanciers d’une sous-évaluation du prix, librement fixé par le débiteur et l’acquéreur. Après notification de ce prix aux créanciers, ceux-ci peuvent soit l’accepter, soit demander la licitation de l’immeuble. Ils sont alors tenus de faire une surenchère du dixième au moins du prix notifié et d’acquérir l’immeuble, à défaut d’autre enchérisseur (C. civ., art. 2478 et s.). La purge peut également être amiable , lorsque l’attribution du prix au paiement, total ou partiel, des créances hypothéquées résulte de l’accord du débiteur et de tous les créanciers hypothécaires (C. civ., art. 2475). Elle échappe alors aux formalités sus énoncées. Au moment de l’exercice par le créancier de son droit de suite Si le tiers peut classiquement opposer les exceptions dont disposait le débiteur (C. civ., art. 2462), la Cour de cassation a récemment jugé qu'il ne peut se prévaloir de la prescription de la créance principale (Cass. 2e civ., 19 févr. 2015, n° 13-27.691 : JurisData n° 2015-003035). Il peut aussi employer des moyens qui lui sont propres (C. civ., art. 2463 et s.) : • opposer le bénéfice de discussion aux créanciers bénéficiant d’une hypothèque légale générale (C. civ., art. 2466), consistant à leur demander de saisir prioritairement les autres immeubles hypothéqués du débiteur. Il obtient ainsi un sursis à la vente de son bien (C. civ., art. 2465) ; • désintéresser les créanciers hypothécaires en leur versant le prix de la vente, lorsque celui-ci est supérieur ou égal au montant total des créances (sauf à prendre le risque d’être exproprié, un créancier demeuré impayé pouvant toujours requérir la saisie) ; • délaisser l’immeuble, afin d’échapper à la procédure de saisie, laquelle sera menée contre un curateur du bien (C. civ., art. 2467 et s.). À défaut d’avoir utilisé l’un de ces moyens, il pourra, après la saisie, agir contre le vendeur en remboursement du prix de vente (C. civ., art. 2473) ou en garantie d’éviction (C. civ., art. 1626). 5. Transmission de l’hypothèque Par voie accessoire La transmission de la créance garantie, par voie de cession de créance ou de subrogation (si un tiers paye la dette en lieu et place du débiteur initial), emporte transmission de l’hypothèque (C. civ., art. 2424, al. 1er). Remarque : • Le notaire dressant l’acte authentique constitutif d’hypothèque peut établir une copie exécutoire à ordre qui doit, lors de sa remise au créancier, comporter un certain nombre de mentions (L. n° 76-519 du 15 juin 1976, art. 5) et dont le simple endossement permet la transmission de la créance et de l’hypothèque la garantissant. • À compter du 1er octobre 2016, subrogé et débiteur pourront convenir d’assortir la créance d’un intérêt conventionnel, qui sera garanti par l’hypothèque initiale (Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016 – C. civ., art. 1346-4, al. 2 , réd. Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016 : JO 11 févr. 2016). Par voie principale Le créancier hypothécaire peut subroger un autre créancier dans l’hypothèque sans céder sa créance ou encore céder l’antériorité de son rang à un créancier d’un rang inférieur (C. civ., art. 2424). 6. Extinction de l’hypothèque L’article 2488 du Code civil énumère limitativement les causes d’extinction de l’hypothèque. Page 10 L’une d’elle est dite accessoire : l’extinction de l’obligation principale emporte extinction de l’hypothèque. Remarque : Etonnamment, la Cour de cassation a jugé le 19 février 2015 que le tiers saisi recherché en sa qualité de tiers détenteur du bien immobilier, n'est pas fondé à se prévaloir de la prescription de la créance principale à l'appui de se demande de mainlevée du commandement de payer valant saisie (Cass. 2e civ., 19 févr. 2015, n° 13-27.691 : JurisData n° 2015-003035). Les autres causes d’extinction, dites principales , sont au nombre de quatre : • la renonciation du créancier à l’hypothèque ; • la purge ; • la prescription ; • la résiliation, en présence d’une hypothèque de créances futures à durée indéterminée. Réserve est faite, pour les deux premières causes d’extinction (C. civ., art. 2488, 1° et 2°), de l’hypothèse dans laquelle une hypothèque est rechargeable (C. civ., art. 2422). EXERCICES 1. Cas pratique 1.1. Énoncé Léa est propriétaire de plusieurs biens. Elle a hérité avec sa sœur d’une maison, qu’elles détiennent chacune pour moitié. Grâce à un prêt bancaire, elle a aussi acheté avec son époux une villa de vacances et financé sa rénovation. La part du crédit permettant cette dernière est garantie par une hypothèque grevant sa quote-part de la maison (inscrite en janvier). Elle a aussi investi le 15 avril dans un appartement, dont le prix reste à payer, le vendeur lui ayant accordé un délai pour ce faire. Elle a consenti, un jour après la vente, une promesse d’hypothèque sur l’appartement à l’architecte d’intérieur qui l’a décoré (l’acte authentique a été passé le 7 mai). Son époux et elle ont encore accepté mi-avril de grever la villa d'une hypothèque au profit d'un bijoutier. Léa réalise qu’elle est bien mauvaise gestionnaire. Dépensière, elle ne peut honorer ses dettes. D’ailleurs, un autre de ses créanciers, Yan, agacé par son retard, a fini par l’assigner en justice et a obtenu contre elle un jugement de condamnation le 10 octobre. L'inscription d'une hypothèque sur l’appartement et la maison de Léa (qu’elle s’est vue finalement attribuée lors du partage) a été prise dans la foulée. Les différents créanciers hypothécaires de Léa ont procédé à toutes les formalités utiles deux à trois jours après la constitution de leur hypothèque. Si le vendeur de l’appartement a inscrit son privilège le 15 mai, l’employé de la banque, novice, avait omis d’inscrire le privilège de celle-ci ; alerté par un collègue, il ne l’a fait qu’au mois de juin, soit environ six mois après la vente. De quelles garanties bénéficient les différents créanciers de Léa ? Quelles chances ont-ils d’obtenir le paiement de leur créance ? 1.2. Corrigé Étude des garanties dont bénéficient les créanciers de Léa Le privilège du prêteur de deniers est octroyé lorsqu'existent un contrat de vente immobilière et un prêt finançant l'acquisition. En raison de la vente de la villa, le banquier bénéficie de ce privilège, en garantie du seul prix de vente de l'immeuble (C. civ., art. 2374, 2°). L'hypothèque garantissant la part du prêt finançant les travaux porte sur la quote-part que Léa détient dans la maison indivise . Une telle garantie ne conserve son effet que si l’immeuble est attribué, lors du partage, au constituant. La garantie porte alors sur tout l'immeuble (C. civ., art. 2414, al. 3). La maison ayant été attribuée à Léa lors du partage, l’hypothèque produit son effet sur toute la valeur de cet immeuble. Page 11 Le privilège du vendeur d'immeuble naît à la date de l'acte de vente d'un immeuble susceptible d'hypothèque. Il grève ici l'appartement et bénéficie à son vendeur, garantissant le prix de vente et ses accessoires. L’hypothèque d’un immeuble commun exige le consentement des deux époux (C. civ., art. 1424, al. 1), lequel a été donné ici. L’hypothèque grevant la villa au profit du bijoutier est valable. Une promesse d’hypothèque est valable mais ne crée qu'une obligation de faire, obligation exécutée ici. L’architecte bénéficie d’un droit réel sur l’appartement. Yan pouvait bien inscrire une hypothèque légale sur tous les immeubles de son débiteur à compter du jugement de condamnation (C. civ., art. 2412). Détermination du rang des créanciers Les hypothèques et privilèges donnent à leur titulaires un droit de préférence sur la valeur de l’immeuble (C. civ., art. 2393), peu important l'existence préalable d'une promesse d'hypothèque. Les premières prennent rang au jour de leur inscription (C. civ., art. 2425). Les privilèges du vendeur d’immeuble et du prêteur de deniers prennent rétroactivement rang au jour de la vente lorsqu’ils ont été inscrits dans les 2 mois de celle-ci. Au-delà de ce délai, ils prennent rang au jour de leur publication (C. civ., art. 2379, al. 1). Sur la maison L’hypothèque du rénovateur, inscrite en janvier, prime sur l’hypothèque de Yan, inscrite en octobre. Sur la villa L’hypothèque du bijoutier a été inscrite en avril et le privilège du banquier en juin, soit plus de 2 mois après la vente. Il prend donc rang en juin. La première prime. Sur l’appartement L’hypothèque de Yan prend rang en octobre et celle de l’architecte début mai. Le privilège du vendeur d’immeuble a été inscrit dans le délai de 2 mois et prend ainsi rang rétroactivement au jour de la vente de l’appartement, soit mi-avril. Il prime. (V. Fiche pédagogique n° 3187 : Résoudre un cas pratique) 2. Dissertation 2.1. Énoncé « Feu l’hypothèque rechargeable ? » 2.2. Corrigé Introduction Définition de l’hypothèque et, plus particulièrement, de l’hypothèque rechargeable. Exposé des circonstances et raisons de sa création par l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006. Constat de sa faible utilisation en pratique et du vif débat doctrinal la concernant. Étonnamment, l’hypothèque rechargeable a été dans la même année mise à mort (I) et ressuscitée (II). Cette « abrogation de l’abrogation » (L. Andreu, JCP G, 2015, 78) laisse perplexe. La doctrine demeure divisée quant à la pertinence et l’utilité du mécanisme. I. La mise à mort de l’hypothèque rechargeable L’hypothèque rechargeable a été abrogée par la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation (L. n° 2014-344, 17 mars 2014 , relative à la consommation : JO 18 mars 2014, p. 5400 : art. 46), par voie d’amendement, i.e. sans débat, ni étude d’impact. La suppression a été effective à compter du 1er juillet 2014. Page 12 Néanmoins, les conventions d’hypothèque rechargeable conclues avant cette date demeurent et la fiducie-sûreté rechargeable est sauvegardée (C. civ., art. 2372-5). Cette mise à mort a été essentiellement justifiée par le danger qu’elle représentait pour les consommateurs, en encourageant leur crédit et ainsi leur surendettement. Il lui était aussi reproché de mener à "une croissance économique artificiellement tirée par le crédit à la consommation" (V. Rapp. AN, n° 1156, 13 juin 2013). Ces reproches doivent être nuancés, notamment car il faut distinguer crédit et sûreté : le crédit, non la sûreté, mène au surendettement. Il est même incertain que le rechargement hypothécaire favorise effectivement ce dernier. Le rechargement est en effet limité à "la somme prévue dans l’acte constitutif" (C. civ., art. 2422) et aussi par les devoirs de conseil du notaire et de mise en garde du banquier (lequel doit également évaluer la solvabilité de l’emprunteur – C. consom., art. L. 311-9). Réformer l’hypothèque rechargeable en limitant davantage la recharge aurait été plus cohérent que de la supprimer. Sa réintroduction le confirme. II. La résurrection partielle de l’hypothèque rechargeable Contre l’avis du Gouvernement, l’hypothèque rechargeable a été ressuscitée par la loi n° 2014-1545 du 20 déc. 2014 de simplification de la vie des entreprises (art. 48), à compter du 22 décembre 2014. Le nouvel article 2422 reprend textuellement l’ancien, à ceci près qu’il limite le bénéfice de cette technique aux professionnels. L’hypothèque doit être "constituée à des fins professionnelles » et en garantie « de créances professionnelles", i.e. qu’en garantie de créances conclues entre deux professionnels (commerçants, artisans,...) dans le cadre de leur activité professionnelle (le doute subsistant pour les dettes mixtes...). Le texte précise in fine la validité des cessions d’antériorité entre bénéficiaires de telles hypothèques mais reste regrettablement mutique sur d’autres difficultés techniques (par ex., quant à la transmission de la faculté de rechargement en cas de vente de l’immeuble). Cette restauration vise à faciliter l’accès au crédit des entreprises et ainsi de dynamiser l’activité économique. L’utilité de cette technique pour les professionnels est toutefois douteuse. Il n’est pas certain qu’elle serve réellement leur capacité d’endettement, ne serait-ce que parce qu’ils ne l’ont guère utilisée par le passé. Il lui est aussi reproché de ne procurer qu’un avantage relatif aux créanciers bénéficiant d’une recharge, étant classés entre eux selon la date de la mention en marge. L’intérêt existe néanmoins puisque le créancier prend rang à la date de l’inscription hypothécaire à l’égard des tiers. Certains regrettent que l’hypothèque rechargeable n’ait pas été réintroduite pour tous ; d’autres se demandent s’il n’aurait pas été plus pertinent de la laisser dans sa tombe, de privilégier d’autres moyens, telle la réduction de la taxe de publicité foncière, afin de diminuer le coût du crédit hypothécaire. (V. Fiche pédagogique n° 3335 : Rédiger une dissertation) OUTILS 1. Glossaire □ Bénéfice de discussion : permet au tiers acquéreur de demander aux créanciers titulaires d’une hypothèque légale générale de saisir prioritairement les autres immeubles hypothéqués du débiteur □ Droit de préférence : droit du créancier de se faire payer préférentiellement sur la valeur de l’immeuble □ Droit de suite : permet au créancier d’exercer son droit de préférence en quelques mains que soit l’immeuble □ Prêt viager hypothécaire : grevant un immeuble servant exclusivement à l’habitation du débiteur, il garantit un prêt accordé par un établissement de crédit à un particulier pour un usage non professionnel et qui ne deviendra exigible en principe qu’au jour du décès de l’emprunteur Page 13 □ Hypothèque rechargeable : le constituant d'une telle hypothèque peut l'affecter ultérieurement à la garantie d'autres créances que celles mentionnées dans l'acte constitutif, tout en conservant le rang de l'inscription initiale 2. Conseils / Pièges à éviter □ Le principe de spécialité de l’hypothèque a 3 facettes : la créance, l’immeuble et l’inscription. Les 2 premières n’intéressent que l’hypothèque conventionnelle ; la dernière s’applique à toute hypothèque. □ Le constituant de l’hypothèque n’est pas nécessairement le débiteur : il peut s'agir d'un tiers. □ La péremption de l’inscription se distingue de l’extinction de l’hypothèque.

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