Devoir 3 Francais Seconde
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plusieurs reprises dans le roman.
Derville, en s’étonnant du destin de Chabert, fait réfléchir le lecteur : « Quelle destinée! s’écria Derville. Sorti de l’hospice des
Enfants trouvés, il revient mourir à l’hospice de la Vieillesse, après avoir, dans l’intervalle, aidé Napoléon à conquérir l’Égypte et
l’Europe ». Son ton exclamatif manifeste son étonnement. Il met en parallèle les deux hospices du début et de la fin de la vie
de Chabert dans des phrases sensiblement de même longueur (de onze à douze syllabes). C’est là encore une boucle qui se
ferme : dans les deux cas, il s’agit d’anonymat et d’abandon, et à Bicêtre, d’anéantissement. Le colonel n’a plus ni d’existence
civile ou sociale, ni de reconnaissance extérieure. Anonyme, privé d’identité propre, il appartient toujours à un groupe : d’abord
ceux des « enfants trouvés », puis ceux des « vieillards ». L’expression « Sorti de » rappelle en écho sa résurrection de la fosse
d’Eylau : « j’étais sorti du ventre de la fosse aussi nu que de celui de ma mère ». Pour Derville, le colonel n’a pas de mère, il est
issu des « Enfants Trouvés ».
Par ailleurs, la fin de la phrase de Derville est en antithèse avec le début : « sorti de rien », il est monté au plus haut point de
l’échelle sociale en « aid(ant) » le plus grand homme de son siècle à « conquérir » une partie du monde. L’Égypte et l’Europe
représentent, à elles seules, deux continents et deux grandes civilisations, une prise de possession de l’espace mais aussi du
temps. Derville souligne ainsi l’opposition entre ce néant et l’aspect grandiose du parcours du Colonel. Cependant, cet
« Intervalle » n’a servi à rien, puisqu’il tombe au plus bas après avoir atteint des sommets. Le mot « destinée » semble mettre le
colonel sous l’emprise de la fatalité : était-il destiné à être happé par le néant ? Nous allons retrouver cette fatalité dans la
conception balzacienne du monde et de la justice. Ce passage nous indique aussi ce que Derville va devenir : « moi, je vais
vivre à la campagne avec ma femme, Paris me fait horreur ». Par cette emphase, Derville s’affirme en tant qu’individu dans son
choix d’une existence privée à la place de la vie publique qu’il menait jusque-là. Cette phrase sur Paris est aussi une
conclusion des Scènes de la vie parisienne où Paris est souvent évoqué comme un monstre qui engloutit les êtres. La litote,
« Vous allez connaître ces jolies choses-là, vous » est empreinte d’ironie amère. [Transition] Ce dégoût de Derville est le
résultat d’une réflexion sur le monde.
En effet, spectateur privilégié de la société, l’avoué propose une réflexion sur « trois hommes, le prêtre, le médecin et
l’homme de justice ».
Par une métaphore filée, le narrateur met sur le même plan prêtres, médecins et hommes de justice, parce que tous trois
recueillent les confidences de leurs « patients » (au sens étymologique : celui qui souffre). Vers eux, convergent toutes les
misères du monde, morales, physiques et sociales. Le vêtement noir qu’ils portent est interprété par Derville de façon
métaphorique, comme étant un vêtement de deuil, et de façon hyperbolique, avec l’emploi répété de l’adjectif indéfini « toutes »,
lorsqu’il évoque en cette fin de phrase totalement désespérée, « toutes les vertus et toutes les illusions ». Le parallélisme
syntaxique met « les vertus et les illusions » sur le même plan. Mais, après avoir évoqué les médecins, au même titre que les
prêtres et les avoués, le narrateur ne les mentionne plus, puisqu’il s’intéresse davantage aux maux de l’âme qu’à ceux du
corps. Il oppose alors les deux autres catégories, prêtres et avoués. Cette opposition, introduite par la conjonction de
coordination « mais », est manifeste dans le rythme des phrases et dans le choix lexical. La phrase concernant les prêtres est
construite sur plusieurs rythmes ternaires et écrite dans un registre lyrique : « poussé par le repentir, par le remords, par des
croyances », « qui le rendent intéressant, qui le grandissent, et consolent », « il purifie, il répare, et réconcilie ». La répétition du
préfixe « ré » (dans « repentir, remords, répare, et réconcilie ») souligne l’idée d’un renouveau possible. Au contraire, la
phrase sur l’avoué est plus rapide, en asyndète, et semble s’effondrer sans aucune envolée lyrique : « Mais, nous autres
avoués, nous voyons se répéter les mêmes sentiments mauvais, rien ne les corrige, nos études sont des égouts qu’on ne peut
pas curer ». Derville constate l’impuissance des avoués, qui eux, ne trouvent « ni jouissance ni intérêt » dans leurs tâches.
Derville, après les avoir évoqués par un superlatif relatif « le plus malheureux des trois » désavoue leur rôle, auquel il a sans
doute cru, puisqu’il parle de « deuil » et de désillusion. Ainsi les avoués « ne peuvent pas estimer le monde » : le verbe
« pouvoir » exprime ici l’incapacité de le faire, même s’ils le voulaient, devant le spectacle ignoble du monde. Le constat est
amer : l’homme est incurable et il n’y a pas de justice efficace en ce monde : « nous voyons se répéter les mêmes
sentiments mauvais, rien ne les corrige ». Par la métaphore récurrente dans l’oeuvre des égouts : « nos études sont des égoutsqu’on ne peut pas curer », Derville souligne l’ignominie de la nature humaine par la double image des ordures et du gouffre
insondable. [Transition] En effet, Derville, las d’en avoir trop vu, fait toute une liste des crimes dont il a été témoin
La fin du roman offre des considérations sur la condition humaine et sur l’écriture romanesque
Tout d’abord, Derville dresse une sorte d’inventaire des délits dont sont capables les êtres humains : « abandonn(er) » un
père, « brûler des testaments », « dépouiller (ses) enfants », « vol(er) leurs femmes ». Ce sont aussi des crimes familiaux : « j’ai
vu des mères dépouillant leurs enfants, (…), des femmes tuant leurs maris», des histoires privées, sans doute secrètes, qui
concernent les membres d’une même famille : mères, pères, enfants, maris sont concernés au premier chef. Ces histoires sont
à l’image des tragédies antiques comme celle des Atrides. L’expression « des femmes tuant leurs maris afin de vivre en paix
avec un amant » fait penser à Clytemnestre tuant Agamemnon. On peut se demander quelle est la place du destin dans ces
histoires. C’est ici que l’on retrouve la fatalité évoquée par Derville au sujet du colonel. Comme toujours, dans les romans
balzaciens, le monde est partagé entre bourreaux et victimes. Dans cette lutte entre les forts et les faibles, ce sont les purs qui
sont détruits. L’anaphore de « j ’ai vu » montre la lassitude de Derville. Il s’agit d’une expérience, d’un témoignage, les
participes présents expriment, en effet, une action qui se déroule sous ses yeux : « dépouillant », « volant », « tuant », « se
servant». Ces termes génériques, précédés d’un article indéfini, désignent toute la société sans distinction de milieu social.
Tous ces pluriels provoquent un effet d’abondance, qui n’épargne personne.
Après cette conclusion pessimiste sur le monde et sur l’efficacité des avoués, Derville propose une réflexion sur le roman, par
une habile mise en abyme : « Enfin, toutes les horreurs que les romanciers croient inventer sont toujours au-dessous de la
vérité ». Il fait ainsi un parallèle entre fiction et réalité. En déclarant que «
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