Justice, Force.
Rapports de Stage : Justice, Force.. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoiresste."). Puis, il dénonce ironiquement la force qui se prétend juste (de "La justice est sujette à dispute …", jusqu'à la fin).
Le texte est construit comme une boule-de-neige qu'on pose en haut d'une pente et qui se met à rouler et à grossir, sans que l'on puisse l'arrêter. L'enchaînement des arguments est comme une suite d'événements irrémédiables qui conduit à la catastrophe finale, trahissant le pessimisme de Pascal en ce qui concerne le genre humain.
Pascal attaque son argumentation par deux mots : "Justice, force", deux concepts qui semblent tout d'abord opposés.
Le concept de justice est pris à la fois comme norme du droit, c'est-à-dire comme le système abstrait des valeurs fondamentales qui défend les idéaux d'égalité entre les hommes, de liberté individuelle et de droit à la sécurité et sur lequel se fonde la légitimité; et comme institution judiciaire, c'est-à-dire comme le système concret de la justice dans la société, chargé de faire respecter ces principes et sur lequel s'appuie la légalité.
Quant au concept de force, Pascal joue sur son ambiguïté : est-ce une force d'oppression, violente, ou une force vertueuse, puissance au service du bien? Si l'on prend "force" comme "force d'oppression", elle est antagoniste avec la justice car dans cette force-là règne l'inégalité, la hiérarchie, la domination, toutes choses contraires à l'égalité et à la liberté défendues par la norme de justice. Si l'on prend "force" comme "force vertueuse", alors on la met au service de l'idéal de justice, comme instrument du judiciaire, puissance qui défend la justice, va avec elle et lui est subordonnée.
Après avoir juxtaposé les deux concepts de justice et de force et les avoir ainsi implicitement opposés, Pascal va explicitement caractériser cette opposition.
"Il est juste que ce qui est juste soit suivi". En d'autres termes, nous sommes moralement obligés de faire ce qui est juste. Mais c'est justement parce que nous y sommes "obligés" que nous avons la possibilité de nous y soustraire. Et dans ce cas-là, si nous évitons de faire ce qui est juste, c'est soit par immoralité, soit parce que nous avons une autre conception de la justice et que nous remettons en cause tout ou une partie de l'idéal de justice ou de l'application particulière de cet idéal.
"Il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi". Il faut prendre ici "force" comme "force d'oppression". Cette force-là, on ne peut pas s'y soustraire. On la suit nécessairement, c'est-à-dire inévitablement, sans possibilité de choix.
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[Deuxième partie]
Ainsi, justice et force s'opposent en théorie comme l'obligation s'oppose à la nécessité. Mais, paradoxalement, force et justice s'associent en pratique. En effet, dit Pascal, "La justice sans la force est impuissante". Cette sentence déclare que la justice, comme norme du droit, a besoin de l'institution judiciaire pour s'appliquer. Sinon, elle est impuissante, vaine, dénuée d'application concrète. C'est tout le problème de l'application de l'idéal dans le réel qui est posé.
Par ailleurs, "la force sans la justice est tyrannique". "Force ne fait pas droit" disait Rousseau. Quel que soit le sens de "force" ici, appliquer la force indépendamment de la justice n'est que violence et absurdité. La force brute est dénuée d'intelligence, dévastatrice, sans raison. Un état fondé sur la force est tyrannique en ce sens qu'il est privé de l'accord des êtres raisonnables qu'il asservit et il n'a donc pas de légitimité, même s'il prend les apparences d'un état de droit. Il est une force privée de raison et de sens.
Ainsi, Pascal a posé les limites concrètes des deux concepts : la justice est dénuée de force, (d'efficacité) ; la force est dénuée de droit (de légitimité). Il va pouvoir énoncer sa thèse : il faut associer justice et force pour pallier leurs carences respectives. Il y a pour cela deux voies. Soit faire que "ce qui est juste est fort" et l'on confère la force bénéfique à l'institution judiciaire pour faire appliquer l'idéal de justice ; soit faire que "ce qui est fort est juste" et la force oppressive modifie l'idéal de justice à son compte et fait croire que ce qui est accompli par la force est accompli dans la justice. Quelle que soit la solution, Pascal voit l'homme de façon pessimiste.
Dans la première possibilité, la justice a besoin de la force parce qu'elle est contredite et "qu'il y a toujours des méchants", c'est-à-dire des hommes qui ne suivent pas le droit chemin et qui se donnent tous les droits parce qu'ils refusent de faire leur devoir. Mais ne pouvons-nous pas nous demander si la justice a réellement besoin de la force? A-t-elle réellement besoin de contraindre pour exister? Être juste par force, n'est-ce pas ruiner toute moralité? La moralité ne suppose-t-elle pas l'autonomie, c'est-à-dire une volonté libre qui se donne à elle-même ses propres lois et qui les suit par pur respect parce qu'il en reconnaît le bien fondé? "S'il faut obéir par force, on n'a pas besoin d'obéir par devoir" disait Rousseau (Du contrat social, Chap. III. -Du droit du plus fort). Ne peut-on pas éduquer à l'idéal plutôt que d'imposer l'idéal ? Une règle qui est librement acceptée de tous est bien plus efficace qu'une règle imposée à tous. Chacun a tendance de prime abord, à rejeter ce qui lui est imposé de force. C'est ainsi que la justice pourrait être vue par certains comme un moyen d'oppression alors qu'elle devrait éduquer à la liberté. Certes, il ne faut pas négliger le fait qu'en pratique, la justice ne s'applique pas toute seule et qu'il faut se donner les moyens de la faire respecter. Cependant, dans l'idéal, le judiciaire devrait tendre à disparaître, car il n'y en aurait plus besoin. C'est certainement une utopie, mais "soyons réalistes, demandons l'impossible" comme dit Che Guevara!
Autre question: les hommes ne respectent-ils la justice que parce qu'ils y sont contraints? On prétend qu'un don n'attend qu'un contre don. Il n'y aurait jamais d'acte désintéressé. Mais s'il y avait plus à gagner en étant juste qu'en étant injuste? Il ne s'agirait certes pas de moralité au sens de Kant, mais d'opportunisme. Mais il ne s'agirait pas non plus de violence. D'un point de vue moral, ce serait peut-être insuffisant, mais d'un point de vue politique, n'est-ce pas tout ce qui importe?
La deuxième possibilité, où la force se fait passer pour la justice, est illustrée par les événements récents en Serbie et par tous les pays sous régime totalitaire, comme la Tunisie. Les faits le prouvent: la force peut se faire passer pour la justice. Mais contrairement à ce que semble suggérer Pascal, personne n'est dupe du stratagème. Pascal ne reconnaît-il pas lui-même que la force est "accusée"? La force peut simuler la justice, mais jamais la remplacer, car le masque finit toujours par tomber, le plus difficile étant de déceler le masque ou d'apprendre à le déceler par soi-même: sortir de la minorité, apprendre à penser par soi-même et devenir majeur, pour reprendre les termes de Kant. Si forte que soit l'oppression et si soumis que soient les opprimés, Kant dit que, dans la masse oppressée acceptant passivement, en "mineur", sa tutelle, il y en aura toujours quelques-uns pour sortir de leur minorité intellectuelle dans laquelle les enferment leurs tuteurs (les dictateurs), et pour exercer leur liberté de penser et renverser la domination.
D'autre part, la force, en elle-même, a aussi sa fragilité : elle peut être à tout moment renversée par une autre force. Car dans la force, il n'y a pas de paix. Ainsi remarque Rousseau, "sitôt que c'est la force qui fait le droit, l'effet change avec la cause : toute force qui surmonte la première succède à son droit. Sitôt qu'on peut désobéir impunément, on le peut légitimement ; et, puisque le plus fort à toujours raison, il ne s'agit que de faire en sorte qu'on soit le plus fort." L'apparence de justice n'ajoute donc rien à la force. Si la force règne, elle n'a que faire de la justice.
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[Troisième partie ]
Après avoir montré l'incomplétude de la justice sans la force et de la force sans la justice, Pascal décrit le processus par lequel la force prend le pas sur la justice. C'est la dernière partie de la pente que dévale la boule-de-neige, et celle où elle écrase tout sur son passage. Un état de fait que Pascal dénonce ironiquement.
"La justice est sujette à dispute". En effet, la norme du droit est une norme, donc elle est discutable… même si de grands textes, comme la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, tentent de la définir de façon incontestable. De telles déclarations
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