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Enquete Sur l'Entendement Humain Hume

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particulière, telle action ou tel comportement. A ce sujet, ils reprochent à tous ceux qui ont écrit, que la philosophie n'ait pas encore fixé, dépassant toute controverse, le fondement de la morale, du raisonnement et de la critique artistique, et qu'elle parle toujours de vérité et de fausseté, de vice et de vertu, de beauté et de laideur, sans être capable de déterminer l'origine de ces distinctions. Tandis qu'ils tentent cette tâche ardue, ces philosophes ne se laissent détourner par aucune difficulté; mais passant des cas particuliers aux principes généraux, ils poussent encore leurs recherches à des principes plus généraux et ils ne connaissent aucun repos, aucune satisfaction, tant qu'ils n'atteignent pas ces principes premiers qui doivent, en chaque science, mettre un terme à la curiosité humaine. Alors que leurs spéculations semblent abstraites, et même inintelligibles, aux lecteurs ordinaires, ils visent l'approbation des savants et des sages; et ils s'estiment suffisamment dédommagés du labeur de leur vie entière, s'ils peuvent découvrir quelques vérités cachées qui puissent contribuer à l'instruction de la postérité.

Il est certain que la plupart des hommes préféreront toujours la philosophie facile et claire à la philosophie rigoureuse et abstruse et que nombreux sont ceux qui la conseilleront, pas seulement parce qu'elle est plus agréable, mais parce qu'elle est plus utile que l'autre. Elle s'engage dans la vie courante, forme le cœur et les affections, et, mettant en branle les principes qui font agir les hommes, elle réforme leur conduite et les rapproche du modèle de perfection qu'elle dépeint. Au contraire, la philosophie abstruse, étant fondée sur une tournure d'esprit qui ne peut entrer jusqu'aux occupations et actions des hommes, s'évanouit quand le philosophe quitte l'ombre et se montre en pleine lumière. Ses principes ne peuvent pas non plus facilement garder quelque influence sur notre conduite et notre comportement. Les sentiments de notre cœur, l'agitation de nos passions, la véhémence de nos affections, dissipent toutes les conclusions de cette philosophie, et réduisent le philosophe profond à n'être qu'un homme du commun.

Il faut aussi avouer que la plus durable, ainsi que la plus juste renommée a été acquise par la philosophie facile, et que les raisonneurs abstraits semblent jusqu'ici avoir seulement joui d'une réputation momentanée, due au caprice ou à l'ignorance de leur propre époque, réputation qu'ils n'ont pas été capables de maintenir auprès d'une postérité jugeant avec plus d'équité. Il est facile à un philosophe profond de commettre une erreur dans ses raisonnements subtils, et une erreur est le nécessaire parent d'une autre erreur, et alors il la tire jusqu'à ses conséquences sans être détourné d'adopter une conclusion d'apparence inhabituelle ou qui contredit l'opinion populaire. Mais un philosophe qui se propose seulement de représenter le sens commun de l'humanité, sous les plus belles et les plus engageantes couleurs, s'il tombe par accident dans l'erreur, ne va pas plus loin; mais faisant de nouveau appel au sens commun et aux sentiments naturels de l'esprit, il revient dans le droit chemin et il se garantit des dangereuses illusions. La renommée de CICÉRON fleurit à présent, alors que celle d'ARISTOTE est en plein déclin. LA BRUYÈRE traverse les mers et maintient encore sa réputation, mais la gloire de MALEBRANCHE est confinée à sa seule nation et à sa seule époque. Et ADDISON, peut-être, sera lu avec plaisir, quand LOCKE sera entièrement oublié .

Le pur philosophe est un personnage qui, le plus souvent, n'est pas considéré comme une relation mondaine possible, car on suppose qu'il ne contribue en rien au profit et au plaisir de la société, vivant à l'écart de toute communication avec l'humanité, entièrement absorbé par des principes et des notions également éloignés de la compréhension des hommes. D'autre part, le pur ignorant est encore plus méprisé, et rien n'est, pense-t-on, un signe plus sûr d'un esprit sans noblesse, à cette époque et dans cette nation où fleurissent les sciences, que d'être entièrement dépourvu de goût pour ces nobles divertissements. Le type d'homme le plus parfait, suppose-t-on, se trouve entre ces extrêmes. Ce type d'homme conserve une égale aptitude et un goût égal pour les livres, la société des hommes et les affaires, gardant dans la conversation ce discernement et cette délicatesse que procure la culture des lettres, et, dans les affaires, cette probité et cette rigueur qui sont les résultats naturels d'une juste philosophie. Afin de diffuser et de cultiver ce type de caractère aussi accompli, rien ne peut être plus utile que des écrits d'une manière et d'un style faciles, qui ne s'écartent pas trop de la vie, qui n'exigent pas une profonde application ou un isolement pour être compris, et qui renvoient celui qui étudie au milieu des hommes, plein de nobles sentiments et de sages préceptes applicables aux circonstances de la vie humaine. Par de tels écrits, la vertu devient aimable, la science agréable, la compagnie des hommes instructive et la retraite divertissante.

L'homme est un être raisonnable, et comme tel, il reçoit de la science de quoi le nourrir et l'alimenter en propre. Mais les bornes de l'entendement humain sont si étroites qu'on ne peut espérer que peu de satisfaction dans ce domaine, aussi bien pour l'étendue des certitudes que pour le nombre des connaissances acquises. L'homme n'est pas moins sociable que raisonnable. Mais il n'a pas toujours la possibilité de jouir d'une compagnie agréable et amusante ou de garder le goût requis pour cette compagnie. L'homme est aussi un être actif, et à cause de cette disposition, et par les diverses nécessités de la vie humaine, il est astreint aux affaires et au travail. Mais l'esprit exige quelque détente et ne peut pas toujours supporter sa propre tendance à se préoccuper et à agir. Il semble donc que la nature ait indiqué un genre de vie mixte comme la plus appropriée à l'espèce humaine, et ait secrètement averti les hommes de ne permettre à aucune de ces tendances de les tirer par trop à elles, et ainsi de les rendre incapables d'autres occupations et divertissements. Abandonnez-vous à votre passion pour la science, dit la nature, mais faites que votre science soit humaine et qu'elle puisse avoir un rapport direct avec l'action et la société. La pensée abstruse et les profondes recherches, je les interdis, et je les punirai avec sévérité, par la mélancolie pensive qu'elles font naître, par l'incertitude sans fin dans laquelle elles vous emprisonnent, et par l'accueil froid que rencontreront vos prétendues découvertes dès qu'elles seront divulguées. Soyez philosophe, mais au sein de votre philosophie, restez un homme.

Si la plupart des hommes se contentaient de préférer la philosophie facile à la philosophie abstraite et profonde, sans jeter de blâme et de mépris sur cette dernière, il conviendrait peut-être de se conformer à cette opinion générale, et de permettre à chaque homme, sans opposition, de trouver bons son propre goût et son propre sentiment. Mais la chose va souvent plus loin, jusqu'au refus total de tous les raisonnements profonds, bref de ce que l'on appelle couramment la métaphysique. Nous allons maintenant envisager ce qui pourrait être plaidé en sa faveur.

Nous pouvons commencer par observer qu'un avantage considérable résultant de la philosophie rigoureuse et abstraite est son utilité pour la philosophie facile et humaine qui, sans elle, ne peut jamais atteindre un degré suffisant d'exactitude dans ses opinions, ses préceptes ou ses raisonnements. La littérature cultivée n'est faite que de représentations de la vie humaine dans ses diverses attitudes et situations, et elle nous inspire différents sentiments, de louange ou de blâme, d'admiration ou de moquerie, selon les qualités de l'objet qu'elle nous montre. Est nécessairement plus qualifié pour réussir dans cette entreprise l'auteur qui, outre un goût délicat et une vive compréhension, possède une connaissance rigoureuse de l'organisation interne, des opérations de l'entendement, du jeu des passions, et des diverses sortes de sentiments qui différencient le vice de la vertu. Quelque pénible que puisse paraître cette recherche, cette enquête intérieure, elle devient, dans une certaine mesure, indispensable à ceux qui voudraient décrire avec succès les apparences visibles et extérieures de la vie et des coutumes. L'anatomiste présente à notre regard les objets les plus hideux et les plus désagréables, mais sa science est utile au peintre, même pour dessiner une VENUS ou une HELENE. Alors que ce peintre emploie toutes les plus riches couleurs de son art, et donne à ses représentations les airs les plus gracieux et les plus attrayants, il doit de plus porter son attention à la structure interne du corps humain, à la position des muscles, à l'organisation osseuse, à la fonction et à la forme de chaque partie ou de chaque organe. La rigueur est, dans tous les cas, profitable à la beauté, à la justesse du raisonnement et à la délicatesse du sentiment. Il serait vain de porter aux nues l'une en dénigrant l'autre.

En outre,

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