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« Légalité de l’existant, jurisprudence Thalamy et régularisation »

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Par   •  19 Avril 2019  •  Cours  •  2 575 Mots (11 Pages)  •  625 Vues

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 « Légalité de l’existant, jurisprudence Thalamy et régularisation »

« Nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans ». Cette expression latine qui peut se traduire par « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude » trouve bien à s’appliquer en matière d’urbanisme.
Avant la loi du 15 juin 1943, l’obtention d’un permis de construire n’était pas exigée, donc il était rare de constater une illégalité ou une irrégularité en la matière. Toutefois, après cette loi de généralisation du permis de construire, toutes constructions devaient être précédées d’une autorisation. Aujourd’hui, cette exigence peut poser problème et fait l’objet de nombreux contentieux. En effet, il est des situations où la demande d’un permis de construire porte sur des travaux devant être réalisés sur une construction existante illégale. Le pétitionnaire souhaitant ainsi se prévaloir de sa propre turpitude, attendant dès lors de l’administration une réponse favorable quand ce premier se trouve déjà dans une situation d’illégalité. Ce cas n’est pas rare ; des travaux doivent être réalisés, mais nécessitent un avis favorable de l’administration, qui se retrouve ainsi dans une position inconfortable quand la base est une construction existante illégale, irrégulière. Concernant la construction irrégulière, il s’agit de celle réalisée sans autorisation d’urbanisme, ou non conforme à l’autorisation d’urbanisme délivrée
[1]. Est également irrégulière une construction dont le permis de construire a été annulé[2] ou retiré. Et, il ressort de la jurisprudence dite « Thalamy » qu’est irrégulière une construction qui, après sa réalisation a fait l’objet de travaux sans autorisation ou non conforme à l’autorisation qui avait été délivrée pour la réalisation de ces travaux.[3] Il ressort de cette jurisprudence, que le propriétaire souhaitant effectuer des travaux sur une construction sur laquelle des travaux non autorisés ont été réalisés, doit demander un permis de construire pour l’entièreté des travaux. Dès lors, il apparaît difficile pour le pétitionnaire de réaliser des travaux.
Cette exigence posée par le Conseil d’Etat semble toutefois être assez rigide, rendant difficile la conciliation entre la réalisation de travaux et la régularisation du fait de l’illégalité de l’existant. Une question se pose alors : L’illégalité d’une construction est-elle un impedimenta à la délivrance d’une nouvelle autorisation d’urbanisme ? Autrement dit, faut-il régulariser une construction irrégulière avant de demander une nouvelle autorisation d’urbanisme ?

La réponse à cette question est nuancée en ce qu’elle n’a pas d’issue fermée. La jurisprudence est passée d’une rigueur considérable quant à la nécessité de régularisation en matière de construction, à une remise en cause de son arrêt phare « Thalamy »  (I). Néanmoins, force est de constater que cette remise en question connaît quelques limites, ne rendant que partiel l’abandon de cette jurisprudence (II).

  1. D’une rigidité en matière de régularisation à un requiem de la jurisprudence Thalamy ?

Le Conseil d’Etat s’est montré strict en matière de régularisation de constructions ; il a exigé, dans son célère arrêt « Thalamy » que celui qui souhaite réaliser des travaux sur une construction sur laquelle des travaux non autorisés ont été effectués doit procéder à une régularisation de tous les travaux. (A) Toutefois, le Conseil d’Etat a tout de même procédé par la suite à une atténuation jurisprudentielle en la matière, permettant dès lors aux pétitionnaires d’échapper à cette contrainte dans certains cas. (B)

  1. Une régularisation exigée issue de la jurisprudence « Thalamy »

  Le Conseil d’Etat, dans cet arrêt « Thalamy » a considéré qu’une collectivité ne pouvait « légalement accorder un permis portant uniquement sur un élément de construction nouveau prenant appui sur une partie du bâtiment construite sans autorisation». Partant de là, le propriétaire se voit obligé de demander un permis pour l’entièreté de la construction illégale s’il veut obtenir l’autorisation d’effectuer des travaux . En effet, l’administration ne pourrait délivrer une autorisation de travaux sur une construction déjà illégale. Pour que cela soit possible, le pétitionnaire devra régulariser intégralement la construction. Toutefois, cette exigence posée par le Conseil d’Etat ne trouve à s’applique que si la construction initiale[4], ou les travaux dont elle a fait l’objet étaient soumis à une autorisation préalable[5]. En effet, cette exigence ne trouverait à s’appliquer pour les constructions ou travaux réalisés anté-1943, comme a pu le rappeler le Conseil d’Etat dans une affaire concernant un bâtiment du 19ème siècle.[6]

Cette exigence ne concerne que les constructions illégales, réalisées après 1943.
Ainsi, si un propriétaire souhaite effectuer des travaux sur une construction déjà illégale, il devra réparer cette illégalité, donc de la construction initiale, ce qui impliquera de reprendre la totalité des constructions réalisées irrégulièrement dans une nouvelle demande d’autorisation, à savoir que la demande seule d’un permis modificatif ne saurait être suffisante.
[7] La question a pu se poser concernant les travaux projetés qui sont dissociables de la construction existante irrégulière. Autrement dit, les travaux qui ne sont ni « attenants, ni structurellement liées » à la construction existante. [8] La jurisprudence a considéré que dans ce cas-là, une régularisation de l’entièreté de la construction et des travaux n’était pas exigée, même si les travaux à venir se trouvent sur la même parcelle que la construction existante irrégulière. Toutefois, si les travaux envisagés sont suffisamment proches de la construction existante irrégulière, la régularisation de l’entière construction est exigée.[9] Cette exigence issue de la jurisprudence Thalamy paraît tout de même assez stricte, en ce qu’elle rend impossible toute construction nouvelle, ou travaux nouveaux sur une construction existante illégale si cette dernière n’a pas été régularisée. Cette jurisprudence peut être préjudiciable aux propriétaires qui souhaiteraient faire évoluer leurs biens et qui ne le pourraient pas en raison de travaux irréguliers dont ils ne sont pas à l’origine. De plus, dans certains cas la réalisation de travaux est nécessaire.

Le Conseil d’Etat a ainsi dû revenir sur sa célèbre jurisprudence, l’atténuant ainsi, afin de permettre aux propriétaires de réaliser des travaux, tout en échappant à l’exigence de régularisation complète de la construction existante illégale.

  1. Une remise en question de « Thalamy » par une atténuation jurisprudentielle


        Le Conseil d’Etat est venu atténuer la jurisprudence Thalamy par l’arrêt « Ely » du 3 mai 2011
[10], en affirmant que « dans l’hypothèse où l’autorité administrative envisage de refuser le permis sollicité parce que la construction dans son entier ne peut être autorisée au regard des règles d’urbanisme en vigueur à la date de sa décision, elle a toutefois la faculté, dans l’hypothèse d’une construction ancienne, à l’égard de laquelle aucune action pénale ou civile n’est plus possible, après avoir apprécié les différents intérêts publics et privés en présence au vu de cette demande, d’autoriser, parmi les travaux demandés, ceux qui sont nécessaires à sa préservation et au respect des normes, alors même que son édification ne pourrait plus être régularisée au regard des règles d’urbanisme applicables. » Ici, le Conseil d’Etat estime donc que l’administration peut autoriser la réalisation de travaux qui sont nécessaires à la préservation d’une construction ancienne qui est non régularisable, ou à sa mise en conformité aux normes récentes. Le Conseil d’Etat atténue dès lors la jurisprudence Thalamy en rendant possible des travaux de confortation, de sécurisation ou de mise aux normes, sur une construction non régularisable. Jusque cet arrêt, le Conseil d’Etat et les juridictions administratives appliquaient sans réelle distinction la solution de l’arrêt Thalamy. Toutefois, cette possibilité de passer outre la jurisprudence Thalamy est tout de même conditionnée.
En effet, l’autorité administrative peut certes autoriser les travaux nécessaires à la préservation de la construction et au respect des normes si la construction est ancienne, si la construction ne peut être régularisée au regard des règles d’urbanisme en vigueur, si aucune action pénale ou civile n’est plus possible sur les éléments existants irréguliers
[11], et si les intérêts public et privés ont fait l’objet d’une appréciation par l’autorité administrative. La jurisprudence Thalamy semble donc être remise en cause, surtout sa rigidité. En effet, le Conseil d’Etat est venu atténuer lui-même sa jurisprudence, ce qui ne peut qu’aller dans l’intérêt des propriétaires de constructions existantes illégales.

        Outre cette la jurisprudence, le législateur a également participé à cette atténuation de la jurisprudence Thalamy, laissant penser à un abandon de cette dernière. Toutefois, force est de constater que cet abandon semble n’être que spécieux, en ce que la jurisprudence Thalamy reste assez difficile à évincer.

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