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Testament de 1409

Commentaire de texte : Testament de 1409. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  29 Avril 2020  •  Commentaire de texte  •  3 598 Mots (15 Pages)  •  693 Vues

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L’énorme mortalité causée par la Grande Peste de 1348 apparaît de plus en de plus comme un des faits les plus importants de l’histoire de notre millénaire, puisqu’au XIVème siècle, l’Europe perd au moins un tiers de sa population. Pendant la guerre de Cent ans, de 1337 à 1453, rythmée par les guerres, les famines et les épidémies, la perception de la mort change et celle-ci est renforcée par la Peste Noire. L’Homme de ces temps redoute ainsi le moment de sa mort car la société est alors confrontée à une image de souffrance. Pour remédier à cette crainte, dont les contemporains ont parfaitement conscience, le testament est un moyen essentiel pour se racheter auprès de Dieu. Notre document, le testament de Jeanne la Heronne, poissonnière d’eau douce, rédigé le 20 août 1409 à Paris, le démontre. Rappelons qu’un testament est un texte juridique, plus précisément un acte notarial, qui prépare la répartition des biens et indique les dernières volontés du testateur selon le droit commun et le droit canon. Cet acte aussi civil que religieux, a un certain succès dans la noblesse, mais dès le XIVème siècle, il se généralise à tous les niveaux. A la fin du Moyen-âge, avec le développement du sentiment religieux on constate une insistance un peu plus lourde sur la mort. Tout le monde devait et se sentait obligé de faire son testament. Celui-ci possède un aspect terrestre et fait régner la paix sur terre et au ciel. Lorsqu’on lègue les biens, on peut estimer que le testament est un document honnête face à Dieu et aux hommes. Au moment de mourir, on fait son testament et on se confesse, ne pas laisser de testament signifie être mort sans confession. Cet acte civil, bien connu du Droit romain, a ainsi un caractère religieux très fortement marqué, que nous verrons dans l’étude de notre document.

Jeanne de Héronne est la femme à l’origine du testament étudié. Elle est l’épouse d’un certain Héron, dont on féminise le nom au Moyen-âge. Elle reprend la boutique de son époux après le décès de celui-ci, et devient donc marchande de poisson d’eau douce. Elle appartient ainsi à une corporation de métier extrêmement fermée à Paris, les vendeurs de poisson se décomposant en deux catégories à cette époque. Les poissonniers d’eau de mer et d’eau douce, dont les poissons sont originaires de Normandie, forment la première, ceux qui élèvent du poisson dans des viviers autour de Paris, fossés mis en eau avec des écluses à l’intérieur, la seconde. A l’époque, être poissonnier est un métier puissant et honorifique, en témoigne Jeanne qui possède ses étales près du petit Chatelet, place commerçante au cœur de Paris. Elle détient également plusieurs boutiques et des gens à son service, ce qui fait d’elle une chef ’entreprise respectée et parfois enviée. Cette famille de poissonnier, qui gère des affaires, est également liée à la famille royale et intègre de ce fait l’aristocratie. Dans son testament, elle s’adresse à sa famille, sa fille et son gendre, mais plus particulièrement à la paroisse à laquelle elle appartient, celle de son église Saint-Séverin, et ses œuvres de charité à qui elle décide de léguer son argent. Les notaires qui l’assistent, retranscrivent ses dernières volontés.

La tournure que prend ce testament, informe de la puissance de cette femme qui sent sa fin venir et tend ainsi à mettre de l’ordre dans ses affaires. Elle ne se contente pas d’un prêtre et d’un notaire, mais a également l’idée de faire valider son testament au Parlement de Paris, procédure n’étant pas courante. Ceci est fait pour solenniser le document, car n’ayant pas confiance en ses enfants, Jeanne craint des problèmes d’héritage après sa mort. Tout cela est donc fait pour éviter les procès posthumes.

Comment Jeanne de Héronne, bourgeoise parisienne, réussit-elle par l’écriture de son testament, à léguer ses biens tout en affrontant la mort avec sérénité ?

Nous verrons d’abord que le testament est un acte notarial et juridique fondamental. La classe bourgeoise sera ensuite étudiée avec l’illustration de Jeanne de Héronne. Nous finirons notre sujet par l’étude du lien entre Jeanne de Héronne et la religion, Jeanne étant une femme aux vertus théologales.

Etudions pour commencer, le testament en tant qu’acte notarial et juridique fondamental pour cette époque. Rappelons qu’un testament est un acte de droit privé, destiné à la répartition des biens. Au Moyen-âge, trois moments fondent la vie d’un homme, la naissance, le mariage et la mort. Le passage entre la vie et la mort est très important car on passe de la vie terrestre à la vie éternelle. Le testament est premièrement intéressant en soi car il reste très honnête face à la mort et face à dieu. En effet, le testament était le dernier message du mourant sur la mort, son attitude ultime face à sa propre mort. C’est l’acte civil médiéval dont le caractère religieux est le mieux marqué. Il laisse apparaître la personnalité du mourant, de lui qui sent qu’il va bientôt mourir ou de celui qui veut préparer sa fin. Le commanditaire de ce testament est Jeanne, mais celle-ci est accompagnée dans cette démarche juridique par d’autres acteurs, mentionnés aux lignes 3 et 4 « savoir faisons que par devant Jehan Piece et Jehan de Saint Germain, notaires du roi notre dit seigneur ». Ces messieurs sont des notaires, ainsi que des témoins, qui attestent de la capacité de Jeanne à dicter ses dernières volontés. Ils sont chargés de retranscrire ses paroles à l’écrit. Son testament n’est donc pas écrit à la première personne, cela était pourtant habituel au Moyen-âge. Ainsi, pour appuyer la légitimité et la validité de ce document, les notaires emploient le pronom « elle » ou le mot « ladite ». D’autre part, le testament est le moyen pour connaître la manière dont un personnage conçoit la mort. Jeanne débute le sien par des invocations pieuses, puis énumère point par point, ses volontés, donations et prières. Le christianisme plaide partout et inlassablement pour le pardon et l’amour inépuisable de Dieu. De plus, ce testament est un acte religieux. Effectivement, ceci est souligné des lignes 11 à 13, par l’expression « désirant de tout son pouvoir pourvoir au salut et remède de son âme, des biens et des choses que Notre Seigneur Jésus Christ par sa grâce lui a prêtés en ce monde mortel ». Il permet de confesser ses péchés et se racheter auprès de Dieu par le biais de l’acte public, mais il est aussi important de rappeler que ce document a été écrit sous le témoignage de religieux. Nous avons donc des membres de l’ordre des Célestins comme le frère Laurent de Crespy cité aux lignes 124 et 125 du texte par l’expression « frère Laurent de Crespy, de l’ordre des dits Célestins, ses frères. »

D’autre part, voyons la place que prend le testament dans la bourgeoisie. Le commanditaire de ce testament rappelons-le, est Jeanne, une femme sûrement âgée et qui sent sa fin venir. Elle cherche donc à mettre en ordre ses affaires, mais ne se contente pas d’un prêtre et d’un notaire puisqu’elle fait valider son Testament « au Parlement de Paris » expression de la dernière ligne, ce qui n’est pas la norme. Cela est rendu possible par son statut de bourgeoise, et son pouvoir. Effectivement, de par les sources qui nous sont aujourd’hui connues, nous savons qu’au Moyen-âge, le testament est peu représentatif de la diversité des classes, puisque peu de paysans et d’artisans comptent parmi les testateurs. Cependant, dès le XIVème siècle, cet acte civil et religieux, tend à se développer à tous les niveaux. De plus, ce document comprend la composition du patrimoine de Jeanne qui possède beaucoup de biens matériels et d’argent, elle possède par exemple « une petite maison à Paris » ligne 106, et a besoin de savoir qu’ils tomberont entre des mains sûres. Mais cette poissonnière n’a pas confiance en ses enfants car elle sait que l’héritage va poser problème. La rédaction du testament pour les personnes aisées est nécessaire pour que leurs biens ne soient pas spoliés. En effet, après la mort de personnes appartenant à la bourgeoisie, il arrive que des vols aient lieus si la victime n’a pas rédigé de testament. Cet acte leur permet donc de mettre en ordre ses affaires et d’empêcher les futurs conflits qui pourraient toucher ses descendants. Il nous démontre également les liens sociaux que les bourgeois entretenaient entre eux par le biais de ce corporations ou de confréries que nous étudierons par la suite.

Le testament forme un document intéressant face à la religion ainsi que face à la mort. Il permet au testateur de préparer sa mort, et d’organiser son héritage. Cet acte reste très fréquent dans la classe bourgeoise qui, grâce à ses nombreux biens et à argent, peut prévoir de façon convenable une mort sereine. D’ailleurs, il est rédiger par un notaire au nom d’une bourgeoise, Jeanne La Héronne.

Ce testament est rédigé au nom de Jeanne La Héronne, une femme qui illustre la classe bourgeoise. Cette classe sociale particulière est formée par les détenteurs de fortunes essentiellement mobilières et les membres des professions libérales. Abordons dans un premier point la place de Jeanne La Héronne dans cette société.

Jeanne de Héronne est une nouvelle figure de la classe bourgeoise parisienne. Elle est une célèbre poissonnière de la capitale et qui tient un commerce fleurissant près du petit pont où elle vend des poissons d’eau douce, comme le stipule la ligne 5 « Jeanne La Héronne, poissonnière d’eau douce, bourgeoise

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