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Dissertation Citation "Tu M'As Donnée Ta Boue Et J'En Ai Fait De L'Or"

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dans une interprétation fautive. Dans ce cas précis, il faut donc axer le commentaire sur la métamorphose évoquée, en suggérant éventuellement qu’elle se dit à travers une image alchimique ; mais il est inutile de spéculer sur l’origine de cette boue étrangement offerte au poète.

Point document

Devant l’inutilité avérée de consulter un manuel d’alchimie, la meilleure chose à faire est sans doute de relire quelques poèmes de Baudelaire : dans Les Fleurs du Mal, la section « Spleen et Idéal » et les « Tableaux parisiens », et dans Le Spleen de Paris (également appelé Petits poèmes en prose), les poèmes VIII, XIX, XXXIX, XL, et l’Epilogue. Pour information, le vers cité dans le sujet est le dernier d’un projet d’épilogue pour la seconde édition des Fleurs du Mal. Sur la poésie de la laideur, vous pouvez également lire Rimbaud.

EXEMPLE DE CORRIGE SEMI-REDIGE

Introduction

La poésie moderne se caractérise par une tentative inédite : prendre en compte la laideur du monde, non plus seulement pour s’en moquer (comme dans le genre ancien de la satire), mais pour tenter d’y déceler une beauté. C’est ce qui semble se dire dans ce vers de Baudelaire : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or », où l’activité poétique se voit donner comme objet la matière la plus vile, charge au poète de la métamorphoser en la plus noble, la plus belle, et la plus précieuse. S’il y a bien quelque chose de radicalement nouveau dans cette manière de figurer la poésie, on peut toutefois se demander si la formule de Baudelaire ne reste pas en deçà de ce que peut et doit faire le poète moderne de la laideur du monde et de la misère des hommes. Les métamorphoser en beauté, n’est-ce pas aussi leur imposer silence ? On verra que Baudelaire lui-même ne se contente pas d’évoquer la « boue » en la passant au filtre d’une alchimie et en clamant qu’elle est horrible, mais subit une fascination pour sa laideur, qui peut aller jusqu’à une reconnaissance esthétique.

I. Une ambition alchimique

A. Hors de la poésie

Traditionnellement, la laideur du monde et celle de l’homme n’ont pas droit de cité en poésie. Avec les romantiques, puis plus nettement encore avec Baudelaire, c’est une révolution que d’introduire en poésie des sujets et des mots que l’on considère à leur époque comme antipoétiques (« une charogne » chez Baudelaire, en étant le meilleur exemple, la vision détaillée d’un cadavre rappelant la vanité des choses humaines).

B. Une morale de l’écriture

Cette révolution n’est pas une simple provocation, elle ne procède pas seulement du désir artiste d’ « épater le bourgeois ». Elle répond, chez Baudelaire, en particulier, à une visée morale et esthétique. Le cœur de l’homme, « creux et plein d’ordure » à en croire Pascal à l’ombre duquel écrit Baudelaire, la ville moderne et ses laideurs demandent à être formulés : le poète serait malhonnête de les passer sous silence, son écriture ne trouve sa légitimité que dans un enjeu moral qui passe par la mise au jour du mal et du laid : c’est en particulier ce qu’il soutiendra lors du procès des Fleurs du Mal, et tout indique que la plaidoirie ne déformait pas son projet.

C. Une conversion

Il s’agira, dès lors, de faire apparaître la « boue » tout en postulant son salut : le monde n’est pas voué à la laideur, l’homme n’est pas voué à la misère et au mal, ils peuvent être sauvés. C’est tout l’enjeu de la poésie baudelairienne que de montrer les voies de ce salut, en cherchant dans les détritus et les laideurs de la ville une beauté nouvelle, la peinture du vice dans l’espoir de susciter la vertu. Il s’agit de transformer la « boue » en « or », de faire jaillir « les fleurs du mal ».

D. Point méthode

Le passage de la première à la deuxième partie est ici très souple ; on est moins dans une rupture que dans une continuité. Il est important de se dégager du modèle caricatural thèse-antithèse-synthèse : une dissertation est d’abord un mouvement de pensée, mouvement que l’on peut décomposer en plusieurs moments. Certes, ces moments sont appelés à prendre des directions différentes : il ne faut pas, pour autant, casser le mouvement général, qui doit tenir de la courbe que de la ligne brisée.

II. Une fascination pour la boue ?

A. Un mouvement inachevé

Mais Baudelaire ne trouve peut-être sa modernité que dans l’échec de sa tentative – en quoi il rejoint son maître Pascal, qui voulait faire croire et n’a réussi qu’à faire douter. Loin de s’imposer comme une voie vers le bien et la beauté, ses images du mal et de la laideur s’imposent comme un tableau fascinant : l’itinéraire promis, du laid vers le beau, s’arrête au laid, et il y a chez lui comme une délectation morbide envers les images de ce qu’il prétend dénoncer – ainsi de l’affirmation sans équivoque de goûts étranges : « Ta carcasse a des agréments / Et des grâces particulières » (« Le monstre »). Et d’enchaîner en confessant un amour éperdu pour « Tes yeux qui semblent de la boue ». Point n’est question d’en faire de l’or, ici, mais bien d’en goûter le charme troublant, voire d’en célébrer une « fangeuse grandeur » (poème XXV).

B. Le discours déjoué par l’écriture

Ainsi, le poète s’arrête-t-il étrangement sur ce qu’il voudrait faire haïr : on pourrait parler d’une érotique de la laideur. Encore ne s’agit-il jusqu’à présent que de ses sentiments. Mais l’écriture elle-même, dans le jeu des images notamment, trahit quelquefois la vocation affichée. Ainsi, dans le poème « Au lecteur », par lequel s’ouvre Les Fleurs du mal, le discours extrêmement moralisant s’appuie sur des images étranges, comme celle-ci : « Nous volons au passage un plaisir clandestin / Que nous pressons bien fort comme une vieille orange ». La comparaison semble dévaloriser le plaisir : mais elle crée en elle-même un choc esthétique qui sont en dernier ressort a un effet inverse du but recherché, en cassant le discours : interloqué par une image aussi étrange, le lecteur se détourne du sens pour se laisser aller à la rêverie.

C. Une ivresse ?

Il y a ainsi chez Baudelaire une tendance constante à détourner le discours, comme s’il ne parvenait pas à garder le cap. L’écriture, ainsi, serait à l’image de ce vin qui « sait revêtir le plus sordide bouge / D’un luxe miraculeux » (« Le poison ») : on pourrait parler ici d’une esthétisation du vice et des laideurs humaines. La conversion morale (faire naître l’espoir de la beauté du spectacle affreux du vice) tourne court, poète et lecteur se laissent aller à la fascination, de sorte que le constat

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