Analyse "Le Déserteur" sous forme de procès

Avocat :

« L’accusé a déserté. Oui, mais n’a-t-il pas ses raisons ? La guerre lui a déjà tout pris. Sa mère, son père, ses frères, ses enfants, sa femme ; tout ce qui donnait un sens à sa vie. Toute sa vie il a subi les horreurs de la guerre, il a connu la douleur de la perte des siens dans une détresse extrême ; n’était-ce pas légitime que de ne pas vouloir ni même pouvoir aller au combat ? Comprenez qu’un homme comme lui ne puisse s’allier à ce qui a brisé sa vie et celle de ses proches. Un homme censé, n’irait jamais se jeter volontairement dans les bras de la mort et devenir celui qui l’apporte. La guerre, il la connait trop bien, il sait de quoi elle est capable, il l’a vue et ressentie dans sa chair. Pensez-vous sincèrement, qu’un homme traumatisé peut combattre de façon efficace ? Vous brisez peu à peu le peuple français en lui demandant de faire face à l’enfer et vous trouvez anormal que certains refusent de vouer leur vie à tuer avant d’être tués eux-mêmes. Vous qui jugez sa désobéissance, êtes-vous prêt à montrer votre dévouement pour la France ? A votre tour, partez ! Vêtissez-vous de votre uniforme, partez ! Prenez les armes, partez ! Battez-vous au front, tuez puis mourrez !  Je pense pouvoir affirmer que l’idée ne vous réjouit pas ; ai-je raison ? Alors, à la place de l’accusé, qu’auriez-vous fait ? Mon client, lui, a seulement décidé de ne plus perpétuer l’horreur. Est-ce normal de le blâmer pour cela ? »  

Procureur :

« Les lois sont les lois et aucune désobéissance ne peut être tolérée. Un homme Français se doit de protéger son pays, de se dévouer corps et âme pour lui et de mourir pour lui s’il le faut. Un homme Français doit même être fier de mourir pour sa patrie. C’est d’ailleurs la plus belle mort qu’il puisse espérer. Les déserteurs ne peuvent pas être considérés comme des Français, ils ont trahi leur terre et doivent être punis pour cette faute. Le pays est en guerre alors nous n’avons pas d’autre choix que de nous battre pour ne pas finir piétinés par les armées ennemies. Et dites moi Monsieur, si ce ne sont pas les hommes qui partent au front, qui le fera ? Qui sauvera nos femmes, nos enfants et tout ceux qui ne peuvent pas se défendre ? Le pays est en guerre, c’est donc le devoir des hommes que d’aller se battre. Qu’ils aient vécu le pire ou pas, ils se doivent de se montrer fiers, forts et unis. Devrait-on sacrifier ceux qui sont courageux, les français, les vrais, pour des traitres qui préfèrent tout abandonner ? Oui, ne trouvez-vous pas cela extrêmement égoïste ? Il faut œuvrer pour la patrie, être solidaire jusqu’à la mort avant de penser à soi-même. Déserter c’est trahir le pays tout entier, l’abandonner aux mains de l’ennemi. L’abandon de poste, Monsieur, est une faute grave punissable de prison. »