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Cassation, Chambre Commerciale, 3 Novembre 1992

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alyser cet arrêt en s’intéressant en premier lieu à la faute contractuelle constituée par un manquement à l’exécution de bonne foi (I) puis en analysant en second lieu l’’importante consécration de la bonne foi qui pourrait mener à l’acceptation de la révision pour imprévision (II).

I. Une faute contractuelle née de la carence de bonne foi dans l'exécution du contrat

Dans cet arrêt la Cour de Cassation assimile la bonne foi, notion aux contours ambigus (A), à une obligation contractuelle qui entrainerait la responsabilité contractuelle en cas de manquement (B).

A. Force obligatoire du contrat et bonne foi ; à la recherche d’un équilibre

La société demanderesse au pourvoi souligne l’absence d’inexécution d’une de ses obligations contractuelles pour justifier sa demande d’annulation de la décision d’engager sa responsabilité contractuelle.

Le contrat a une force obligatoire en ce qu’il a pour effet de faire naître des obligations. L’article 1134 du Code Civil lie la force obligatoire du contrat à l’obligation d’exécution de bonne foi : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi » .

La force obligatoire du contrat peut s’expliquer par la place centrale de la volonté, dans le respect de la dignité humaine.

Néanmoins, dans nombre de situations, les obligations peuvent être inégales, ou bien même le devenir par la suite. C’est alors que bien souvent l’une des parties ou le juge va faire appel à l’obligation d’exécution de bonne foi pour demander la révision du contrat.

La bonne foi peut être exécutée comme le « comportement loyal que requiert notamment l’exécution d’une obligation. Attitude d’intégrité et d’honnêteté. Souci de coopération » (Cornu, vocabulaire juridique). La bonne foi amène à la prévisibilité qui est au cœur du contrat, d’autant plus lorsque celui-ci se prolonge dans le temps.

Il faut cependant prendre garde au contre-sens. La bonne foi n’est pas une limite à la force obligatoire du contrat, mais plutôt un « prolongement » (L.Aynès) en ce qu’elle a pour finalité de rendre le contrat plus efficace en respectant les intérêts de chacun.

En l’espèce, bien qu’aucun manquement à une obligation contractuelle prévue dans le contrat n’ait été constaté, la Cour de cassation approuve la décision des juges du fond de voir dans le refus de renégociation du contrat suite à un changement de circonstances économiques de la part de la société pétrolière un manquement à l’exécution de bonne foi.

B. La bonne foi et les incertitudes quant à la faute contractuelle

Dans l’arrêt étudié, la sanction de la Cour de Cassation est donc prononcée au motif du manquement à l’obligation d’exécution de bonne foi.

La violation du devoir de bonne foi est sanctionnée par une responsabilité. Pour engager la responsabilité contractuelle, il faut une faute et un dommage corrélatif.

Comme vu précédemment, la faute a été entendue par la Cour de Cassation dans le sens d’un manquement à l’exécution de bonne foi du contrat, alors même qu’aucune obligation contractuelle entrant dans le champ contractuel n’avait pu être soulevée.

Dès lors, il convient d’en rechercher le dommage. Pour le caractériser, les juges ont ici pris en compte les conditions de l'accord de initial, l'engagement d'approvisionnement exclusif souscrit par le distributeur, la durée de la relation contractuelle ainsi que l'importance des investissements effectués par ce dernier dans sa station-service ; la Cour souligne dans cette affaire un dommage financier pour le distributeur du fait du refus de renégociation par la société pétrolière.

Mais alors, peut-on considérer que toute partie au contrat est dorénavant obligée de le renégocier, sur le fondement de la bonne foi, dès lors que les conditions qui présidaient lors de sa conclusion ont été substantiellement modifiées au cours de son exécution ? Les conditions de fait, telles le caractère exclusif de la clause d'approvisionnement entre les deux parties ou encore la durée importante des relations contractuelles, ayant nécessité l'intervention du juge invitent à une interprétation minimaliste de l'arrêt. Sa portée pourrait donc être limitée aux seuls « contrats de distribution qui impliquent une plus étroite coopération entre les parties parce qu'il s'agit de réaliser sur la longue durée une oeuvre commune, fût-ce en dehors même d'un réseau ».

La réparation par versement des dommages et intérêts est ici prononcer pour sanctionner le refus de renégociation du contrat. Faut-il alors considérer que la Cour de cassation a ici permis une révision pour imprévision ?

II. La reconnaissance d’une obligation de révision du contrat ; vers une consécration de la théorie de l’imprévision ?

La sanction ici prononcée prend source dans le manquement à l’obligation de renégociation imposée par les juges (A), amenant à se questionner sur la consécration possible d’une révision pour imprévision.

C. La renégociation du contrat ; une obligation reflet de l’étendue des pouvoirs judiciaires.

L’ exigence de bonne foi visée par l'article 1134, oblige ici l'une des parties à modifier, en cours d'exécution du contrat, un système de prix pourtant fixé librement ou, au moins, conventionnellement à l'origine parce que des circonstances nouvelles (la libération des prix et la dure concurrence qui en découle) rendent très lourde l'obligation souscrite par l'autre, et donc très précaire sa situation.

De plus, la partie à laquelle un tel devoir d'adaptation est ainsi imposé ne peut valablement se retrancher derrière le refus de son cocontractant de s'adapter lui-même, par l'adoption du changement de statut qui lui avait été proposé. Autrement dit, ce dernier a droit au respect de la loi contractuelle initiale, alors que le premier a le devoir de la réviser dans l'intérêt de son partenaire. Force est de souligner l’importante avancée, même si deux limites lui sont ici assignées : la réserve de la force majeure qui libèrerait le débiteur de ce devoir en cas d'impossibilité et aussi sans doute de risque pour lui-même d'y satisfaire, et le support conventionne de la révision puisque les parties se sont vues suggérer par les juges la conclusion d'un accord de coopération commerciale pour améliorer la situation du distributeur.

Il semblerait que soit dégagée sous l’égide de cette bonne foi très conquérante la voie de la révision du contrat pour imprévision.

D. L'apparence d'une ouverture à la révision du contrat pour imprévision.

Traditionnellement la jurisprudence française a toujours refusé de consacrer la théorie dite « de l’imprévision » qui permet aux parties et le cas échéant au juge de réviser voire résilier un contrat en cas de changement imprévisible des circonstances. Ce refus est né de l’affaire « canal de Craponne » (Civ. 6 mars 1876), dans laquelle la Cour énonce que le juge ne peut réviser le contrat à la demande des parties lorsque à la suite d’un élément extérieur et imprévisible l’équilibre voulu par les parties à la formation

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