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Les causes objectives d'irresponsabilité pénale

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Par   •  30 Janvier 2023  •  Dissertation  •  6 169 Mots (25 Pages)  •  552 Vues

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Les causes objectives d’irresponsabilité pénale

Du seul fait qu’une infraction a été matériellement - consommée ou tentée - et moralement - intentionnelle ou non-intentionnelle - commise, le délinquant n’encourt pas de plein droit la sanction prévue par la loi. À la différence des législations primitives, le droit pénal moderne ne punit pas automatiquement l’auteur ou le complice de l’infraction ; celui-ci ne peut être condamné à une peine que s’il est reconnu pénalement responsable par le juge. La responsabilité consiste plus précisément en droit pénal dans l’obligation de répondre de ses actes délictueux et en cas de condamnation, d’exécuter la sanction pénale prévue pour cette infraction. Exceptionnellement, cette responsabilité pénale peut être écartée alors même que l’acte commis constitue une infraction.

En effet, il existe diverses causes d’atténuation ou de disparition de la responsabilité, celles-ci étant prévues dans la partie générale du code pénal de 1994. Les causes d’atténuation de la responsabilité n’écartent pas celle-ci, mais l’aménagent ; tandis que les causes d’irresponsabilité (ou d’impunité) suppriment totalement la responsabilité de l’auteur de l’acte. Bien que ces causes soient toutes présentées les unes à la suite des autres par les articles 122-1 à 122-9 du Code pénal, sans que soit mise en évidence une classification particulière, il est nécessaire de les examiner selon une distinction.

D’abord, il existe des causes objectives d’irresponsabilité. Indépendantes de la psychologie du délinquant, ces causes sont des circonstances, dans lesquelles l’infraction a été commise, qui neutralisent l’élément légal de ladite infraction et font donc disparaître le caractère illicite de l’acte prohibé ; on dit alors que ces « faits justificatifs » opèrent « in rem », en enlevant le caractère illégal du fait infractionnel. Partant, ces causes objectives bénéficient non seulement à l’auteur de l’infraction mais aussi aux complices et aux coauteurs parce qu’elles concernent l’acte.

Ensuite, on relève l’existence de causes subjectives d’irresponsabilité, celles-ci tenant à des circonstances personnelles attachées à l’individu poursuivi. Ces causes font disparaître l’élément psychologique de l’infraction, élément d’ordre subjectif. Il en ressort que ces causes, dites de non-imputabilité, opèrent « in personam », c’est-à-dire que si elles bénéficient à l’auteur de l’infraction, elles ne concernent pas les complices et les coauteurs de l’infraction en question. Autrement dit, à l’inverse des causes objectives d’irresponsabilité, celles subjectives n’écartent pas la responsabilité pénale des complices et des coauteurs.

D’autres intérêts pratiques importants s’attachent à la distinction des causes subjectives et objectives d’impunité. Par exemple, s’agissant de leur domaine respectif ; il y a lieu de noter que les faits justificatifs, contrairement aux causes subjectives d’impunité, ne peuvent pas soustraire à la répression pénale n’importe quelle infraction. Cela signifie que l’exonération de responsabilité liée aux faits justificatifs est moins étendue que celle pouvant résulter des causes subjectives d’impunité. Alors que ces dernières peuvent conduire à des non-lieu, des relaxes ou des acquittements même pour des infractions particulièrement graves telles que les crimes contre l’humanité (C. pén., art. 211-1 à 212-3), les tortures ou actes de barbarie (C. pén., art. 222-1 à 222-6) ou le viol (C. pén., art. 222-23 à 222-26), il ne saurait en aller de même pour les faits justificatifs, causes objectives d’irresponsabilité telles que l’ordre de la loi ou la légitime défense. Le Code pénal précise expressément s’agissant des crimes contre l’humanité que ni l’ordre de la loi, ni le commandement ou l’autorité légitime ne sauraient les soustraire à la répression (C. pén., art. 213-4). Ainsi, un fait justificatif peut être exclu en raison de la gravité de l’infraction commise.

Reste à déterminer les faits justificatifs admis par le droit pénal. L’entreprise n’est pas aisée car aux faits justificatifs généraux bien connus (ordre de la loi, commandement de l’autorité légitime, légitime défense, état de nécessité) s’ajoute une multitude de faits justificatifs spéciaux relevant du droit pénal spécial (ex : la bonne foi en matière de diffamation ou dans les infractions douanières). En outre, le périmètre des faits justificatifs généraux a fait l’objet de débats doctrinaux. En particulier, on pourrait penser y ajouter le consentement de la victime. Cependant, l’assimilation de ce consentement à un fait justificatif est discutable. Le consentement de la victime ne supprime pas l’infraction car la répression est l’affaire de la société. Le droit de punir n’appartenant pas à la victime, elle ne saurait pas conséquent y renoncer (ex : l’euthanasie est réprimée comme meurtre même si le malade a supplié le proche de lui donner la mort). Il n’en est autrement que dans les cas où l’absence de consentement de la victime est un élément constitutif de l’infraction, parce que le droit violé est un droit dont elle peut disposer. Cela s’applique aussi bien aux infractions contre les biens (vol, violation de domicile) qu’aux infractions contre les personnes (séquestration arbitraire, viol). Cependant, on peut se demander si la notion de fait justificatif n’est pas alors superflue. En effet, le fait justificatif a pour objet d’assurer l’impunité dans des cas où l’infraction est constituée. Or, il n’en est pas ainsi quand il y manque un élément spécial à l’incrimination : l’absence de consentement de la victime. S’il n’y a pas répression, c’est parce que l’infraction n’est pas constituée. Le débat se situe alors sur le terrain des éléments constitutifs.

En tout état de cause, il faut s’interroger sur la prolifération des causes objectives d’irresponsabilité en droit pénal. Faut-il y voir une forme d’indulgence des pouvoirs publics ? Rien n’est moins sûr. Parce qu’elle affecte le droit pénal dans sa dimension répressive, en évitant la sanction de l’agent ayant commis une infraction, la justification peut générer une forte déception des parties civiles, qui se voient ainsi privées de la justice qu’elles attendaient, alors que leur dommage est bien réel. C’est pourquoi le législateur enserre les faits justificatifs dans des conditions strictes. Mais d’un autre côté, le législateur et le juge ont progressivement étendu le domaine des causes objectives d’irresponsabilité en raison de l’utilité de l’infraction commise (ou justifiée). En d’autres termes, parce que l’acte prohibé est utile et ne porte pas atteinte à l’ordre social, la société ne saurait trouver à redire à son existence, avec pour effet d’en accepter la réalisation, sous certaines conditions. Or, ce développement des faits justificatifs — avec dernièrement la loi du 9 décembre 2016 dite « Sapin II » et la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique — s’accompagne, selon la doctrine, d’une absence de véritable théorie générale, avec en pratique des incohérences quant au régime de certains faits justificatifs généraux qui nuisent à la pureté du raisonnement juridique. Mais, à dire vrai, il est possible de fédérer les différents faits justificatifs autour de l’idée de nécessité.

Il est certain que cette idée domine largement les causes d’irresponsabilité pénale traditionnellement admises (I), en particulier la légitime défense et l’état de nécessité. Elle irradie également les causes objectives nouvelles admises par la loi et la jurisprudence (II).

I – les causes objectives d’irresponsabilités pénales admises traditionnellement

À côté de certains faits justificatifs spéciaux, c’est-à-dire propres à une infraction comme la vérité du fait diffamatoire (excetio veritatis) et la bonne foi en matière de diffamation (art. 35 de la loi du 29 juillet 1881), le droit pénal admet des faits justificatifs généraux, qui s’appliquent à plusieurs infractions. Ces causes générales de justification peuvent être ramenées à deux groupes de deux. Parfois, le comportement constitutif d’une infraction semble autorisé par une loi dérogeant à celle qui l’incrimine, ce qui empêche sa qualification pénale (A) ; d’autres fois, ce comportement semble autorisé par les circonstances (B).

A - Les infractions justifiées par la loi

Un véritable conflit de lois peut apparaître lorsqu’un comportement semble prescrit par un texte, parfois même sous la menace de sanctions pénales, tout en étant constitutif d’une infraction en vertu d’un autre texte. La façon de résoudre ce conflit diffère suivant que la loi prescrivant le comportement susceptible de constituer une infraction s’adresse directement à l’agent ou s’adresse à son supérieur hiérarchique. Il convient donc de distinguer l’autorisation directe (1) de l’autorisation indirecte (2) de la loi.

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