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Le Territoire De L'État

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n SENTENCE ARBITRALE DU 4 AVRIL 1928, ÎLE DE PALMAS (Extrait)

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AFFAIRE DE LA SOUVERAINETÉ SUR PULAU LIGITAN ET PULAU SIPADAN (INDONÉSIE/MALAISIE) ARRÊT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE DU 17 DÉCEMBRE 2002

[Pulau Ligitan et Pulau Sipadan sont deux îles situées dans la mer des Célèbes, au large de Bornéo. De dimensions réduites et quasi inhabitées elles présentent pourtant un réel intérêt dans la mesure où elles se situent dans une zone de prospection pétrolière. Aussi l'Indonésie et la Malaisie revendiquentelles toutes deux la souveraineté sur ces îles. Saisie par voie de compromis (c’est-à-dire par accord mutuel des deux États) en 1998, la CIJ est amenée à déterminer « sur la base des traités, accords et de tout autre élément de preuve produit par les parties si la souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan appartient à la République d'Indonésie ou à la Malaisie ». Après avoir rejeté les titres conventionnels invoqués (à savoir les traités conclus par les puissances coloniales, les Pays-Bas et le Royaume-Uni), la Cour a également refusé de retenir les arguments des deux parties selon lesquels elles seraient détentrices de la souveraineté pour avoir succédé aux droits de sultans locaux. En dernier recours, la Cour examine donc les effectivités alléguées par l'Indonésie et la Malaisie.]

126. La Cour examinera donc à présent si les éléments de preuve fournis par les Parties en ce qui concerne les effectivités invoquées par celles-ci peuvent l’amener à déterminer ⎯ comme elle en est priée dans le compromis ⎯ à qui appartient la souveraineté sur Ligitan et Sipadan. La Cour rappelle qu’elle a déjà eu à se prononcer dans un certain nombre d’affaires sur la relation juridique existant entre les effectivités et le titre. Le prononcé pertinent, aux fins de la présente espèce, peut être trouvé dans l’arrêt rendu en l’affaire du Différend frontalier (Burkina Faso/République du Mali), dans lequel la Chambre de la Cour a déclaré, après avoir indiqué que «plusieurs éventualités doivent être distinguées», que : «[d]ans l’éventualité où l’«effectivité» ne coexiste avec aucun titre juridique, elle doit inévitablement être prise en considération» (C.I.J. Recueil 1986, p. 587, par. 63; voir aussi Différend territorial (Jamahiriya arabe libyenne/Tchad), C.I.J. Recueil 1994, p. 38, par. 75-76; Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria; Guinée équatoriale (intervenant)), arrêt, fond, C.I.J. Recueil 2002, par. 68). * * *

possession et une administration pacifiques et continues de celles-ci sans protestation de la part de l’Indonésie ou de ses prédécesseurs en titre. Ayant conclu qu’aucune des deux Parties ne détient un titre conventionnel sur Ligitan et Sipadan (voir paragraphes 92 et 124 ci-dessus), la Cour examinera la question des effectivités de manière indépendante et distincte. * *

127. Les Parties font toutes deux valoir que les effectivités sur lesquelles elles s’appuient ne font que confirmer un titre conventionnel. A titre subsidiaire, la Malaisie prétend avoir acquis un titre sur Ligitan et Sipadan par une

128. L’Indonésie souligne que c’est pendant les négociations de 1969 sur la délimitation des plateaux continentaux respectifs des deux États que la Malaisie émit une revendication de souveraineté sur les îles de Ligitan et Sipadan. Selon l’Indonésie, ce serait donc à ce moment que se situerait la «date critique» dans le présent différend. Elle soutient qu’en effet, par échange de lettres du 22 septembre 1969, les deux Parties se sont engagées à ne rien faire qui pourrait modifier le statu quo quant aux îles en litige. A partir de 1969, les prétentions respectives des Parties se seraient par conséquent trouvées «juridiquement neutralisées», et, pour cette raison, leurs actions ou déclarations ultérieures seraient sans pertinence aux fins de la présente espèce. L’Indonésie ajoute qu’à partir de 1979 la Malaisie a cependant pris une série de mesures unilatérales fondamentalement incompatibles avec l’engagement ainsi pris de respecter la situation existant en 1969. L’Indonésie cite à titre d’exemples la publication par la Malaisie

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de cartes qui représentaient les îles en litige comme étant malaisiennes, à la différence des cartes qu’elle avait publiées auparavant, ainsi que la construction d’un certain nombre d’installations touristiques à Sipadan. L’Indonésie ajoute qu’elle a protesté à chaque fois que la Malaisie a pris de telles mesures unilatérales. 129. S’agissant de la date critique, la Malaisie commence par affirmer qu’avant les discussions de 1969 sur la délimitation des plateaux continentaux des Parties, ni l’Indonésie ni ses prédécesseurs n’avaient manifesté un quelconque intérêt pour ces îles ou formulé de revendications sur elles. Elle souligne toutefois l’importance de la date critique, non pour la recevabilité des éléments de preuve, mais quant au «poids à leur donner». Selon la Malaisie, rien n’interdit donc à un tribunal de tenir compte d’une activité postérieure à la date critique, si la partie qui la fait valoir démontre que l’activité en question a débuté avant la date critique et s’est simplement poursuivie ensuite. En ce qui concerne les activités de plongée sous-marine à Sipadan, la Malaisie fait observer que le tourisme engendré par ce sport est né au moment où ce dernier est devenu populaire et qu’elle a elle-même accepté les responsabilités découlant de sa souveraineté pour assurer la protection de l’environnement de l’île et satisfaire les besoins essentiels des visiteurs. * *

130. A l’appui de ses arguments relatifs aux effectivités, l’Indonésie invoque les patrouilles effectuées dans la région par des navires de la marine royale des Pays-Bas. Elle mentionne une liste des navires néerlandais présents dans la région entre 1895 et 1928, établie sur la base des rapports sur les colonies présentés chaque année au Parlement par le Gouvernement néerlandais («Koloniale Verslagen»), en insistant particulièrement sur la présence dans la région du destroyer néerlandais Lynx, en novembre et décembre 1921. L’Indonésie rapporte qu’une équipe de patrouille du Lynx fut envoyée sur l’île de Sipadan et que l’hydravion qui était à son bord traversa l’espace aérien et les eaux de Ligitan, tout en respectant la zone des 3 milles autour de Si Amil et des autres îles sous autorité britannique. L’Indonésie considère que le

rapport soumis par le commandant du Lynx au commandant des forces navales néerlandaises après l’expédition montre que les autorités néerlandaises considéraient les îles de Ligitan et Sipadan comme relevant de la souveraineté néerlandaise, alors que d’autres îles situées au nord de la ligne de 1891 étaient considérées comme britanniques. L’Indonésie mentionne également les levés hydrographiques effectués par les Néerlandais, et notamment ceux réalisés en octobre et novembre 1903 par le navire Macasser dans toute la région, y compris la zone située autour de Ligitan et Sipadan. S’agissant de ses propres activités, l’Indonésie souligne qu’«[a]vant que le différend ne naisse, en 1969, la marine indonésienne était elle aussi active dans la zone et avait notamment effectué plusieurs visites à Sipadan». En ce qui concerne les activités de pêche, l’Indonésie déclare que des pêcheurs indonésiens ont exercé traditionnellement leur métier aux abords des îles de Ligitan et Sipadan. Elle a soumis une série de déclarations sous serment faisant état d’expéditions occasionnelles dans les îles, qui remontent aux années cinquante et au début des années soixante, voire au début des années soixante-dix, c’est-à-dire après la date à laquelle le différend a surgi. Enfin, évoquant sa loi n° 4 relative aux eaux indonésiennes promulguée le 18 février 1960, en vertu de laquelle sont définies ses lignes de base archipélagiques, l’Indonésie reconnaît qu’à l’époque elle n’a pas utilisé Ligitan ou Sipadan comme points de base pour le tracé des lignes de base et la définition de ses eaux archipélagiques et de sa mer territoriale, mais fait valoir que cela ne saurait être interprété comme montrant qu’elle considérait les îles comme n’appartenant pas à son territoire. L’Indonésie souligne à cet égard que la loi de 1960 fut préparée dans une certaine précipitation qui peut s’expliquer par la nécessité de créer un précédent aux fins de la consécration de la notion d’eaux archipélagiques, juste avant la deuxième conférence des Nations Unies sur le droit de la mer, qui devait se tenir du 17 mars au 26 avril 1960. L’Indonésie ajoute qu’elle entendait en outre s’écarter le moins possible du droit de la mer existant, dont l’un des principes était que le tracé de lignes de base ne pouvait s’écarter de façon appréciable de la direction générale des côtes.

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* 131. La Malaisie soutient que le nombre des prétendues activités navales néerlandaises et indonésiennes est très limité. Elle soutient que ces activités ne sauraient être considérées comme des preuves de l’exercice continu d’une activité étatique à l’égard de Ligitan et Sipadan qui traduirait une quelconque revendication de titre sur lesdites îles. S’agissant de la

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