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Commentaire De Texte Alain

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l'exercice de droits sans limites ne pourrait être que le privilège inévitablement égoïste de certains aux dépens des autres privilèges, soutenu par une violence au mépris de la justice. Le privilège, la « loi privée » illimitée que se réservent ceux qui imposent leur supériorité, est en contradiction avec l'idée de droits qui doivent être égaux pour tous, et donc limités. L'égalité est ici quantitative, la limite permet alors d'en calculer le plus précisément possible le contenu pour assurer que « les droits [de tous] forment un système équilibré ».

b) Reprenons le texte pour y suivre l'idée et l'exemple qui l'illustre : « il n'est pas dit que tous auront tous les droits possibles », « il n'est pas dit qu'on ne barrera pas une rue dans l'intérêt commun », « il est dit seulement que tous auront les mêmes droits », « la justice exige seulement que la rue soit barrée aux mêmes conditions pour tout le monde ». La justice n'est pas que tous aient des droits sans limites, mais que les droits, quand l'intérêt commun l'exige, soient limités de la même manière pour tous. Si la rue est barrée, personne ne passe ; si un droit a des limites, alors personne ne peut les transgresser. L'image de la rue illustre ce qu'est un droit, c'est-à-dire un espace de liberté à l'intérieur duquel je peux me déplacer comme je le veux. Mais il ne s'agit pas de divaguer ; une rue est aussi un espace construit, avec des contours et des limites qui rejoignent le sens étymologique du mot « droit », « ce qui me dirige », « la règle qui trace le chemin ». L'état de liberté évoqué par le texte ressemble à un espace vide dans lequel, sans repère, je ne sais où aller. La rue me rend habitable cet espace en me signifiant clairement où je peux aller, ce que je peux ou ne peux pas faire. Et à partir du moment où ceci est identique pour tous, alors la justice est effective.

3. La notion d'égalité peut, a priori, paraître simple puisqu'elle désigne un rapport algébrique entre des quantités, nous renvoyant à des mesures qu'un simple jugement de fait permet d'évaluer. Et si on la rattache à la justice, la balance que son allégorie tient dans la main droite semble le confirmer. Il suffirait de peser pour trouver la juste mesure. Mais l'égalité n'est pas seulement un fait. Elle est aussi une norme, une valeur, une exigence qui concerne l'appréciation qu'ont les humains de leur existence individuelle et collective. En passant du domaine des choses objectives à celui des significations, elle devient ambiguë et polémique. De même, la justice se présente à la fois comme un idéal, une institution, une revendication révolutionnaire. Quel peut être le contenu de cette attente : la justice consiste-t-elle dans l'égalité des droits ?

Dialectique des contraires, l'idée d'égalité ne peut naître que de situations inégalitaires. Les sociétés antiques sont inégalitaires, l'esclavagisme en témoigne. Or la question des relations entre la justice et l'égalité est centrale chez Platon et chez Aristote. Dans Les Lois, Platon distingue « deux égalités, qui portent le même nom, mais qui en pratique s'opposent sous bien des rapports ». Il précise plus loin que « la plus vraie et la plus excellente […] attribue davantage au plus grand et moins au plus petit, donnant à chacun en proportion de sa nature ». Cette justice, Aristote la définira comme une justice distributive reposant sur une égalité non pas absolue mais proportionnelle, celle qui tient compte de la diversité des mérites par exemple. Mais elle est néanmoins une justice au sens le plus fort puisqu'elle consiste à traiter inégalement des individus inégaux. L'idée directrice est simple : « La justice c'est l'égalité – mais seulement pour des égaux. L'inégalité […] est juste mais seulement pour des individus inégaux. » (La Politique). La justice distributive concerne alors principalement l'attribution des honneurs, récompenses et punitions – qui a le droit à quoi et en quelle proportion ? Telle est la question et elle renvoie à un contexte historique inégalitaire qui n'est pas contesté. Cependant, plusieurs siècles plus tard, les sociétés ont changé et si les valeurs (justice, égalité, droits) sont toujours actives, leur contenu s'est modifié. Prenons comme référence Du contrat social de Rousseau. Deux impératifs dominent cette analyse du pacte initial, fondateur de la société civile : la liberté et la sécurité, qui ne peuvent être associées et réalisées qu'à partir d'un seul concept, l'égalité. Le droit civil doit se fonder sur le principe de l'égalité qui considère les individus comme « libres et égaux en droits » et les fait ainsi passer de l'état d'individus à l'état de citoyens. Il est donc essentiel à la justice que soient abolis les privilèges pour que se mette en place un ordre social nouveau tout entier organisé par l'idée d'une égalité des droits. La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 présentera l'égalité des droits comme inaliénable et universelle, fondement essentiel de toute justice.

Mais de quels droits s'agit-il ? De se voir garantie la propriété des biens ? Encore faut-il être propriétaire. Dans sa Critique du programme de Gotha, comme dans d'autres textes, Marx ne cessera de poser cette question : l'égalité des droits, certes c'est cela la justice. Mais qui a les moyens réels de mettre en pratique ces droits ? L'égalité en cause ici est purement abstraite, elle ne concerne que des citoyens

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