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La Negritude

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sa brièveté, il contient deux définitions complémentaires du concept. En effet, […] le mot - et, partant, le concept – a un double sens : subjectif et objectif. Objectivement, la négritude est un fait : une culture. C'est l'ensemble des valeurs – économiques et politiques, intellectuelles et morales artistiques et sociales – non seulement des peuples d'Afrique noire, mais encore des minorités noires d'Amériques, voire d'Asie et d'Océanie. Je parle des peuples d'Afrique noire qui bâtirent les civilisations, élaborèrent les arts qu'historiens, spécialistes de sciences humaines, critiques d'art découvrirent et commencèrent d'exalter au début du siècle. Pour ne pas insister sur les négro-américains, dont les ancêtres venaient d'Afrique, les www.ville-verson.fr | Tél : 02 31 71 22 00 Copyright Mairie de Verson 2009.

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anthropologues, ethnologues et sociologues ont souvent signalés des affinités de civilisation entre Noirs d'Afrique, noirs d'Asie et Noirs d'Océanie. Les écrivains grecs les avaient déjà signalées, qui appelaient les uns et les autres Ethiopiens, distinguant seulement les " orientaux " (asiatiques) des " occidentaux " (africains). N'est-il pas significatif que l'écriture des premières civilisations indiennes – celles de Mohen-Daro et de Harappa - , qui florissaient 2500 ans avant Jésus-Christ, servît à exprimer des langues dravidiennes : des langues de Noirs ? Subjectivement, la Négritude, c'est " l'acceptation de ce fait " de civilisation et sa projection, en prospective, dans l'histoire à continuer, dans la civilisation nègre à faire renaître et accomplir. C'est en somme la tâche que se sont fixés les militants de la Négritude : assumer les valeurs de civilisation du monde noir, les actualiser et féconder, au besoin avec les apports étrangers, pour les vivre par soi-même et pour soi, mais aussi pour les faire vivre par et pour les Autres, apportant ainsi la contribution des Nègres nouveaux à la Civilisation de l'Universel. Il est donc entendu que, dans le présent exposé, le mot Négritude vise le concept dans son acceptation la plus générale, englobant ainsi tous les mouvements culturels lancés par une personnalité noire ou par un groupe de Nègres : aux Etats-Unis, mouvements de Niagara et de la Negro-Renaissance ; aux Antilles, mouvement de l'Ecole haïtienne ; en Afrique, mouvement anglophone de l'African Personality, aux Antilles et en Afrique, mouvement francophone de la " Négritude ". Je mettrai le mot entre guillemets pour désigner ce dernier mouvement. La querelle de la Négritude, par-delà le vocabulaire, est née de plusieurs raisons, qui touchent au fond des choses : à la problématique du concept. Ce sont , outre l'ambivalence du terme, les différends entre anglophones et francophones, négro-américains et négro-africains. Et aussi le conflit entre générations – sans oublier que la querelle fut d'abord soulevée et continue d'être alimentée par les Blancs de tous bords. Je commencerai donc par être d'accord avec Tchicaya U Tam'si lorsqu'on lui demande : " Qu'est-ce que la Négritude ? " et qu'il répond : " la Négritude est une affaire de génération et d'école aussi. Je suis d'une autre génération et d'une autre école aussi. Je suis d'une autre génération et d'une autre école, et je suis un rieur qui ne peut résister à l'envie de pouffer de rire à chaque leçon que l'on veut me donner. " Tchicaya ne renie donc pas la Négritude ; il veut seulement y apporter sa contribution, librement. Et il le fait magnifiquement, car sa poésie est l'une des plus neuves du continent, tout en restant nègre, voire congolaise. Mais voici Wole Soyinka qui nous dit : " Un tigre ne proclame pas sa tigritude, un tigre saute. " Je vous renvoie à l'Histoire de la Littérature néo-africaine par Janheinz Jahn, l'Allemand. Celui-ci, aux pages 242 et 243 de l'édition française, nous fait remarquer que les critiques blancs s'étaient déjà empressés de faire disparaître la proposition essentielle – " le tigre saute " - pour, une fois de plus, semer la discorde entre partisans africains de la " Négritude " et de l'African Personality. Mais laissons la parole à l'écrivain nigérian, cité par Jahn : " Je voulais distinguer la propagande et la véritable création poétique. Je disais, en d'autres termes, qu'une qualité poétique positive qu'on attendait de la poésie était la qualité poétique intrinsèque, et non pas simplement une étiquette. " En vérité, le débat est ancien : il remonte à l'aube du mouvement. Du Bois se déclarait fier d'être un " propagandiste ". Cependant, Alain Locke, son fils spirituel, préférait " choisir l'art et mettre de côté la propagande ". Nous avons connu les mêmes discussions parmi les francophones entre les années 30 et 40. Et je penchais pour la solution préconisée pas Soyinka. Voici ce que j'écrivais, en 1948, sur David Diop, trop tôt enlevé à notre amitié : "Nous ne doutons pas qu'avec l'âge David Diop n'aille s'humanisant. Il comprendra que ce qui fait la négritude d'un poème, c'est moins le thème que le style, la chaleur émotionnelle qui donne vie aux mots, eux non plus, d'autre prétention…" Le débat n'est donc pas entre "négritude" et "tigritude", et Mphahlele ne me choque pas outre mesure quand il recommande un "réalisme individuel", car, s'il s'agit d'un Nègre, il ne peut, en étant soi, qu'exprimer " sa manière d'être nègre ". Tant il est vrai que le zèbre ne peut se défaire de ses zébrures ni le tigre de sa tigritude, et qu'on ne dépasse ses déterminations ethniques et historiques – ce qui est le propre de l'artiste – qu'en allant dans leur sens. Le vrai débat n'est pas là. Il est entre les hommes de culture et les hommes de politique, entre l'idéologie de la

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