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Dissertation (Montaigne, Essais)

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on, non par la voix commune » (L. 8-10). Donc, en s’identifiant avec la Pyrrhus, Montaigne donne directement sa pensée et sa façon de juger.

L’identification est renforcée par la pensée qu’il présente dès le début, à savoir qu’il faut se méfier des apparences, c’est-à-dire qu’il faut appliquer la raison pour juger et non pas écouter ce que disent les gens. Il veut donc nous dire aussi qu’il est en train de parler, par ce biais, de lui, de ses pensées. Il se montre par ailleurs comme étant un témoin direct ou comme ayant accès direct au témoignage : « Il est rare d’y voir un homme malade » (L.185-186), « ils sont assis le long de la mer » (L. 187). Le cinquième paragraphe commence directement par son témoignage direct : « Ils ont je ne sais quels prêtes et prophètes… » (L. 239). Sans la transition du discours rapporté on a l’impression que c’est lui qui parle et qui a été témoin de ce qu’il dit. A cet effet, il utilise comme on vient de voir, très souvent le discours indirect libre.

Montaigne se montre dans le texte de deux façons différentes. Directement avec le « je » et d’une façon plus implicite avec le « nous » : « je voudrais que chacun écrivît ce qu’il sait, et autant qu’il en sait, non en cela seulement, mais en tous autres sujets » (L. 112). Dans cette citation, Montaigne est présent à travers le « je » et nous transmet aussi ses désirs et ce que, pour lui, il est important de faire. De cette façon, c’est comme s’il nous parlait de lui-même puisqu’il se donne le droit de parler de ce qu’il ne connait qu’à travers des témoignages. Quant au « nous », l’exemple suivant : « et nous voyons de grandes mont-joies d’arènes mouvantes qui marchent d’une demi-lieue devant elle, et gagne pays » montre que Montaigne s’inclut dans une « nation » qui n’est pas la sienne mais qui représente son idéal de vie. A la L. 127, apparaît un « nous » exclusif qui met en valeur la présence de Montaigne : « ils sont sauvages de même que nous appelons sauvages les fruits que nature, de soi et de son progrès ordinaire, a produit ». Précédemment, il intensifie sa présence avec l’ironie : « Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toute chose » (L. 125). Tout au long du troisième paragraphe, Montaigne abuse de la première personne et nous donne des informations sur ses racines : « Ma rivière Dordogne » (L.61), « qui n’ont aucune ressemblance aux nôtres » (L. 191), « en Médoc, le long de la mer, mon frère, Sieur Darsac, voit une sienne terre enseveli sous les sables » (L. 69-71). Il est à remarquer que Montaigne utilise « mon frère » comme le font les cannibales (L. 333). De plus Montaigne, dans ses Essais, ne traduit pas les citations latines qu’il introduit. Ceci est un signe de sa familiarité avec certaines langues essentielles pour lui. Les modalisateurs sont aussi présents tout au long du texte. Prenons comme exemple cette suite exagérée de négations dans le paragraphe 7 : « nulle connaissance des lettres ; nulle science des nombres ; nulle nom de magistrat (…) ; nulle usage de service, (…) ; nulle contrat ; nulle succession ; nulle partage ; nulle occupation qu’oisive ; (…) »

Tout en parlant des autres, Montaigne se présente comme parlant de lui-même à travers différents artifices : en s’identifiant aux autres, en s’intégrant dans leurs pensées, en étant directement présent à travers les premières personnes et les modalisateurs. C’est en découvrant la pensée de Montaigne que l’on découvre sa personnalité.

C’est bien son projet à lui, en tant qu’humaniste, qu’il veut nous montrer dans ce chapitre. A travers les exemples, il nous dit que les apparences sont trompeuses et que la vérité et la beauté est dans la nature, dans le naturel, et non pas dans l’art, non pas dans ce qui a été modifié par l’homme : « Ce n’est pas raison que l’art gagne le point d’honneur sur notre grande et puissante nature. » (L. 138-139). La nature n’a pas besoin d’être surchargée par « nos inventions ». La nature est tellement parfaite que « tous nos efforts ne peuvent seulement arriver à représenter le nid d’un moindre oiselet » (L. 148). Son projet, il l’explicite clairement au tout début du sixième paragraphe : « Or je trouve, pour revenir à mon propos, qu’il n’y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu’on m’en a rapporté, sinon que chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage. » (L. 120). Ce sont les idées de son époque qu’il débat. Il le fait d’ailleurs en intégrant, à la fois, la raison (« or »), l’opinion personnelle (« je trouve ») et l’opinion des autres (« à ce qu’on m’en a rapporté »). Ce paradoxe (il ne dit pas ce qu’on lui rapporte, il l’intègre dans sa pensée) est l’exemple de ce qu’il fait tout au long du chapitre : c’est en parlant des autres qu’il parle de lui, de sa pensée.

Montaigne veut nous persuader que ce que nous appelons, de manière péjorative, sauvage c’est ce qui a été « détourné de l’ordre commun » (L. 130), du naturel. Les habitudes des barbares sont, d’après Montaigne, des habitudes naturelles que l’on doit, donc, comprendre et respecter : « c’est don de Dieu que la divination ; voilà pourquoi ce devrait être une imposture punissable d’en abuser » (L.253-254) ; « ils ne demandent à leurs prisonniers autre rançon que la confession et reconnaissance d’être vaincus » (L. 345-346). Montaigne prône pour la simplicité des gens. Même l’homme qu’il avait à ses côtés « était homme simple et grossier, qui est une condition propre à rendre véritable témoignage » (L. 94-95). Ainsi que ceux

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