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Ciel Brouillé

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brouillard, la vapeur. Au second vers justement, il contraste ce ciel obscur avec

ces prunelles pensives au vague regard. Au vers suivant, Baudelaire a inséré une versatilité

inquiétante. En effet, il combine trois traits de caractère à cette femme, en l'occurrence « tendre »,

« rêveur », « cruel », la gradation est d'ailleurs ici très marquée. Et déjà, au dernier vers s'esquisse la

correspondance entre la femme et le ciel, ou le climat. Dans cette première strophe, le poète maudit

accorda une sollicitude cocasse particulière aux trois couleurs du deuxième vers. Assurément, le ciel

renvoie au bleu, la pâleur renvoie au vert, verdâtre, tout comme la couleur des yeux de Marie

Daubrun, et puis le gris peut aussi se rapporter au ciel voilà, à la brume, plus singulièrement à la

vapeur du premier vers. Baud reste captivé par un charme d'ordre esthétique – le mot « ciel » est un

terme de peinture – et d'ordre affectif, puisqu'il s'agit du regard de l'être aimé. Son amour pour elle

bouge, il se pose des questions, il est dans le brouillard !

A la strophe suivante, le poète y démontre les conséquences du climat sur son psychisme ; ce

thème-là étant un sujet cher à Baudelaire comme dans un des poèmes ultérieurs, notamment « Le

Spleen ». Cette strophe-là fait référence à une expérience, vu que l'on y ressent du vécu. Ainsi, cette

strophe évoque le passé. Les deux prochains quatrains iront d'ailleurs crescendo, chronologiquement

parlant, à partir du moment où la strophe suivante est au présent et la dernière est au futur.

Il est dès lors logique d'en conclure qu'il y a déjà une évolution de type temporel. Pour revenir à ce

second quatrain, Baudelaire s'adresse à sa muse Marie Daubrun, dont il a subi la séduction,

généralisant cet envoûtement aux « coeurs ensorcelés » (v. 6). Effectivement, ce vers est certainement

dû au fait que Marie Daubrun n'eut pas que Baudelaire pour amant, mais entre autre le poète

Théodore de Banville. En étendant ce malheur qui est le sien, Baudelaire conjugue cette esclavage,

cette soumission sensuelle (v. 7) avec une douleur plus profonde, un mal psychique. Le dernier vers

de cette strophe pourrait dûment signifier que le terrible style de vie de Baudelaire, homme

cruellement nerveux, est encore plus grand, lorsque ce qui relève du caractère sensuel est bien vif et

intense (« les nerfs trop éveillés » et que les facultés spirituelles sont mornes, ici assoupies

(« l'esprit qui dort »). En résumé, ce quatrain est très spleenétique si on met le champ lexical en

évidence : « mal inconnu », « pleurs », « ensorcelés », « tord » et « raillent ». On peut parler d'une

lente agonie de l'amour, peut-être en plein automne.

Ce troisième quatrain s'oppose au précédent. En effet, le côté spleenétique de la strophe

d'avant est très contrasté avec cette strophe plutôt liée à l'idéal. Au vers 9, Baudelaire associe à cette

muse des « beaux horizons ». Jusqu'alors, la distinction était nette entre le visage de la femme et le

ciel, mais cet horizon la fait s'estomper au point que le paysage devient allocutaire. La

correspondance subtile avec cette ligne d'horizon marque exemplairement l'union entre le paysage

et le sujet qui le regarde. C'est comme si le paysage sémantique et sensible à la fois s'informent en

un échange constant. La nuance du « parfois » (v. 9) tend justement à ce qui vient d'être dit. Il est

alors important de souligner ces tableaux de paysages – procurant peine et joie – qui apparaissent

ici. Ces horizons pourraient être ceux auxquels Baudelaire a fait référence dans « L'invitation au

voyage », c'est-à-dire la Hollande. Ainsi, les « brumeuses saisons » (v. 10) sont certainement

connues du pays qui est imprégné de la présence de l'eau, d'où ce « paysage mouillé » (v. 11) rimant

de manière notoire avec le « ciel brouillé » du vers d'après (et qui donne aussi son titre à l'oeuvre).

Encore, les vers 11 et 12 confèrent au poème une grande indétermination, vu que ce « paysage

mouillé » à l'image du regard de Marie Daubrun « d'une vapeur couvert », ne peut être mentalement

immobilisé par le lecteur. En bref, ce quatrain charnière forme un pivot entre les deux strophes

contiguës. C'est le seul quatrain où Baudelaire parle de réconfort (« allument », « soleils »,

« enflamment », « resplendis » et « rayon »). cette agonie, cette incertitude de l'amour mène

implacablement à la chute, la mort, l'extinction des feux de l'amour !

Dans le dernier quatrain, la fusion indissociable de plusieurs morphèmes va en se précisant

entre la « femme dangereuse » et les « climats séduisants » au vers lyrique 13. Avec l'anaphore du

« ô » au début des deux hémistiches, on ressent l'épreuve causée par cette correspondance pénible,

ponctuée d'une exclamation en fin de vers. Il est manifestement évident que les deux groupes

nominaux du vers 13 sont un chiasme, même un hypallage qui laisse sous-entendre que Marie

Daubrun, avant de se révéler dangereuse, était séduisante. De par cette figure de rhétorique

précisément, Baudelaire fait primer la déception venue. Mais étant donné que le coeur du poète est

ensorcelé (v. 6), Baudelaire doit continuer à adorer à la fois les « frimas » du pays et la « neige » de

sa maîtresse, dont la frigidité est nettement marquée. Marie Daubrun évoque selon le quinzième

vers la pureté de la neige, les frimas ; elle est implacable comme l'hiver. Justement, l'automne s'est

achevé, l'agonie a abouti à la mort de l'amour et au retour des question et de l'incertitude aux deux

derniers vers (qu'on peut donc lier au conditionnel du premier vers) reflétées par les rimes

renvoyant aux deux premiers vers du poème et par le temps verbal incertain de cette dernier

question : le futur.

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