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La Subordination

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, A peut, en revanche, être pronominalisé dans l’enchâssante C, sans que la relation causale soit perturbée (ex. 1b) : 1b- Julie le sait parce qu’elle l’a vu. 2b- * ? Julie le sait parce qu’il avait faim. L. Gosselin (1993) a utilisé d’autres critères, pour mettre en évidence le détachement ou l’insertion d’une causale par rapport à la portée de la négation, qui peuvent également s’appliquer à la propriété qui nous préoccupe ici. Une proposition est dite détachée : - s’il y a antéposition de la circonstancielle : 1c- Parce qu’elle l’a vu, Julie sait que Paul a mangé tout le gâteau. 1d- *Julie sait que, parce qu’elle l’a vu, Paul a mangé tout le gâteau.4 2c- ?* Parce qu’il avait faim, Julie sait que Paul a mangé tout le gâteau. 2d- Julie sait que, parce qu’il avait faim, Paul a mangé tout le gâteau. On voit ainsi que la causale ne peut être antéposée que conjointement à la proposition à laquelle elle s’applique. - si la causale accepte l’insertion d’une incise parenthétique ou d’un adverbe d’évaluation subjective :

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Je tiens à remercier Danielle Leeman pour ses suggestions et remarques. En ce qui concerne la traditionnelle distinction entre les conjonctions de coordination et les conjonctions de subordination, cf. M. Grevisse (1986), M. Riegel et al. (1994). 3 L’énoncé (1a) est seulement interprétable dans le contexte d’un discours métalinguistique de type : Ecoute, si je te dis que A, c’est parce que B (construction qui se révèle d’ailleurs curieuse appliquée à (2b)). Ou bien, (1a) change complètement de sens par rapport à (1) : la raison pour laquelle Paul a mangé tout le gâteau est que Marie l’a vu. 4 Dans ce cas, l’interprétation n’est pas la même, cf. note 1.

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1e- Julie sait que Paul a mangé tout le gâteau parce que, justement / paraît-il, elle l’a vu. 2e- ??Julie sait que Paul a mangé tout le gâteau parce que, justement / paraît-il, il avait faim.5 D’après les analyses linguistiques du Groupe λ-1 (1975), il est établi que parce que est la seule conjonction susceptible de présenter les deux cas (i) et (ii). Les conjonctions car et puisque (mais aussi vu que et étant donné que) ne peuvent pas, quant à elles, illustrer la propriété (ii)6. Ces analyses utilisent les exemples suivants pour illustrer leurs propos : 3a- Je suis sûr qu’il est là, puisque sa voiture est en bas. 3b - Je compris qu’il était parti, car sa voiture n’était pas là. Les énoncés (3a) et (3b) sont considérés comme des « phrases dans lesquelles on a seulement enchâssé p et non (p car q) ni (p puisque q). C’est-à-dire que les membres de phrases introduits par car et puisque sont sentis comme l’explication ou la justification de J’ai compris que p et Je suis sûr que p et non plus de il était parti ou de il est là. » (Groupe λ–1, 1975, p.252). En revanche, avec parce que, deux interprétations sont possibles pour l’énoncé : 4- J’ai peur qu’il ne l’épouse parce qu’elle est riche. Ou bien il y a rupture du bloc, comme pour car et puisque, ce qui correspond à l’interprétation : « j’ai peur qu’il ne l’épouse et la raison de ma crainte est l’argent de ma fiancée ». Ou bien il y a conservation du bloc et l’interprétation est alors : « j’ai peur que la cause de son mariage ne soit l’argent de sa fiancée »7. 2- Confrontation avec l’analyse d’un corpus attesté Bien que cette distinction entre parce que d’un côté et puisque et car de l’autre semble parfaitement établie, il s’avère que l’analyse d’un corpus attesté et non plus forgé change quelque peu les données. En effet, on a pu constater l’existence d’énoncés dont la proposition causale, introduite par puisque, vu que, étant donné que, mais également car, entre bien dans la portée d’un enchâssement. Le bloc « A conj. B » peut ainsi être inséré dans une complétive : 5- Il me semblait que, puisque eux dormaient, Tsurukawa devait dormir. (P. Roze, Le chasseur zéro, p.93) 6- Je lui ai dit que puisque c’était comme ça j’irai sans elle. (F. Seguin, L’arme à gauche, p.88) 7-On pourrait répondre superficiellement que, étant donné que les colorados ne disposent pas d’une majorité parlementaire, ils sont bien obligés de lancer des ponts vers les autres. (Le Monde Diplomatique, mars 1985) 8- Faut dire qu’elle mérite bien qu’j’y consacre une chanson, vu que j’suis amoureux d’elle. (Renaud, Mistral gagnant) 9- Je compris qu’il faudrait cacher ce deuxième regard sur les choses car il ne pourrait susciter que les moqueries de la part des autres. (A. Makine, Le testament français, p.59) Les trois premiers exemples sont de la même forme que l’exemple (2d) : la causale est antéposée à l’intérieur de la complétive. De plus, on peut supprimer l’enchâssante C, sans modifier l’interprétation sémantique qui s’établit entre A et B. Tel est également le cas en (8) et (9), et bien qu’une pronominalisation de A seul semble grammaticalement possible : 8b- Faut le dire vu que j’suis amoureux d’elle. 9b- Je le compris car il ne pourrait susciter que les moqueries de la part des autres. Il apparaît que dans ce cas, la causale est clairement sentie comme l’explication de Faut dire que B et Je compris que B, alors qu’en (8) et (9), une ambiguïté est ajoutée : la causale peut s’appliquer seulement à A, c’est-à-dire le fait qu’elle mérite une chanson et la nécessité de cacher ce deuxième regard. Une proposition causale peut également apparaître à l’intérieur d’une proposition circonstancielle : 10- L’embêtant : c’est pas simple à pratiquer parce que si tu y vas mollo tu rates ton coup vu que personne devine ce que tu as derrière le crâne et si tu y vas trop fort c’est plus de l’allusion. (F. Seguin, L’arme à gauche, p.27) 11- Comme il savait où elle était, car il ne doutait pas qu’elle fût allée vadrouiller, et pis, avec Paradis, une jubilation se mit à bouillonner en lui, qu’il eut peine à contenir. (R. Queneau, Pierrot mon ami, p.119) Il n’est pas possible d’appliquer ici les tests de pronominalisation ou de suppression, puisqu’il s’agit d’une circonstancielle et que, en conséquence, elle est dépendante de C. Mais, pour l’exemple (10), on remarque que la causale ne peut pas être antéposée à l’ensemble « C + B » :

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L’énoncé est curieux si l’on garde son sens originelle, à savoir celui d’une causale enchâssée. Cette propriété opposant parce que à puisque apparaît également dans R. Martin(1973), J.-C. Anscombre (1984) et A. Nazarenko (2000). 7 Ibid. p.253.

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10b- *Vu que personne devine ce que tu as derrière le crâne c’est pas simple à pratiquer parce que si tu y vas mollo tu rates ton coup et si tu y vas trop fort c’est plus de l’allusion.8 De même, pour l’exemple (11), chacun sait qu’une proposition introduite par car ne peut en aucune façon être antéposée, elle ne peut donc, dans cet exemple, que s’appliquer à la circonstancielle en comme. Enfin, on constate le même phénomène dans une relative : 12- Après la séance triomphale, Jacques plaqua ses copains et se glissa vers les artistes qui l’accueillirent en frère car ils subodoraient une tournée, qu’il offrit. (R. Queneau, Loin de Rueil, p.133) 13- On verra ça, reprit Petit-Pouce qui ne perdait pas sa piste, car il aimait la compétition. (R. Queneau, Pierrot mon ami, p.10) 14- On dit de lui que les ans et la vie retirée l’avaient rendu aussi aveugle que son maître, fait que je n’ai pas pu vérifier, vu que, par déférence et discrétion naturelle, je ne me suis pas approché suffisamment de sa personne. (Le Monde Diplomatique, décembre 1986) L’enchâssement est donc possible pour toutes les conjonctions causales, bien qu’il ne soit pas systématique. L’opposition entre phrases forgées et phrases attestées illustre cet aspect non systématique et prouve ainsi, d’une part, qu’il y a bien une différence de comportement entre parce que et les autres conjonctions mais, d’autre part, que celle-ci est, en fait, plus complexe et plus subtile qu’une simple propriété formelle. La confrontation entre les énoncés (4) et (5) à (14) laisse penser que cette différence se situe au niveau de l’interprétation sémantique des enchâssantes et des enchâssées. Autrement dit, pour résoudre ce problème, il s’avère nécessaire de procéder à une analyse sémantique des valeurs causales susceptibles d’être exprimées en langue par ces conjonctions9. 3. Les différentes valeurs causales A partir des travaux linguistiques traitant des principales conjonctions causales10, nous avons pu formuler une hypothèse globale sur les différentes valeurs introduites par ces conjonctions. Celle-ci repose essentiellement sur une opposition entre contenu, énoncé et énonciation11. L’analyse d’un corpus d’énoncés attestés (comprenant une cinquantaine d’occurrences pour chaque conjonction et tiré pour l’essentiel du corpus Frantex du CNRS12) a donc pris appui sur cette hypothèse globale, en se posant pour chaque énoncé les questions suivantes : 1- Est-ce que le fait B produit effectivement le fait A ? 2- Est-ce que B est la cause effective du fait A, de l’énoncé A ou de l’énonciation (i.e. de l’acte de langage contenu en) A ? 3- Y a-t-il prise en compte de l’auditeur ou bien intervention de l’énonciateur ? De cette analyse découlent trois principales valeurs causales13. La valeur explicative est de l’ordre du contenu. Les contenus de A et de B présentent deux faits réels et objectifs.

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