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La dimension picturale dans l'éducation sentimentale de Flaubert

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Par   •  17 Mai 2019  •  Dissertation  •  2 522 Mots (11 Pages)  •  1 005 Vues

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Sujet de la communication: la dimension picturale dans L'Education Sentimentale de Flaubert

Introduction :

D'aucuns considèrent l'écrivain comme le concurrent du peintre et le roman le rival du tableau. Toutefois, l'ekphrasis le terme grec ancien réduit cette dualité en un mélange indissociable, une dualité qui consiste à faire voir la chose par le biais de la magie des mots. Depuis l'Antiquité la littérature et l'art notamment la peinture sont deux formes d'expression qui se conjuguent pour donner lieu à une appropriation spéculaire du réel. L'éducation sentimentale de Gustave Flaubert le roman centré sur l'échec et l'insuccès de son héros devient une aire favorable à une dominante picturale qui se profile au fil de l'œuvre. Comment Flaubert a pu maitriser cette métamorphose de l’univers verbal en un univers pictural ? Comment l’image génère-t-elle le texte ? Comment les deux personnages, Frédéric et Pellerin reflètent-ils cette dimension ?

1- . Relevé complet de toutes les occurrences de la peinture dans le roman

Au XIXème siècle, à une époque où les écrivains se font critique d’art , écrivent des romans sur les arts et les artistes , où certains ont pratiqué eux-mêmes le dessin ou la peinture comme Emile Zola , Théophile Gautier , Eugène Fromentin .. Flaubert était « l’ennemi des illustrations » pour prendre l’expression des Frères Goncourt. Il se montre hostile aux rapprochements entre l’art et la littérature, il refuse déjà d’illustrer ses livres. Selon lui l’image visuelle risque de tuer le texte littéraire.

Malgré ce refus, son roman l’Education Sentimentale montre que les références à la peinture sont nombreuses. L’étude des dossiers et des notes préparatoires prouve d’ailleurs qu’il a consulté des documents iconographiques pour préparer ce roman.

Dans cette partie nous tenterons de relever toutes les occurrences et les allusions à l’art pictural qui nous aident à mieux percevoir la place de la peinture dans la formation et la réflexion esthétique de l’écrivain.

Les occurrences de la peinture les plus évidentes et les plus explicites occupent un espace assez visualisé dans les séquences descriptives, lieu d’intrusion du narrateur et des focalisations du regard du protagoniste.

Attachons-nous tout d’abord à l’ « Art industriel ». « C’est un établissement hybride, comprenant un journal de peinture et un magasin de tableaux » (Chap1/P1). Ainsi, Flaubert nous plonge dés le début dans un milieu « artiste » que Jacques Arnoux s’est plu à construire autour de lui, un bric-à-brac d’objets où règnent des tendances chromatiques bariolés comme le montre la fabrique de faïence (Chap1/P2) où le chatoiement, les variations des teintes et des reflets soulignent un effet d’uniformisation, d’une résistance au monochrome et à l’aplat de couleur ce qui rappelle l’art impressionniste. Les verbes de perception qui expriment un regard-lecteur d’objets artistiques picturaux, comme « regarder », « voir », « contempler », etc., sont omniprésents dans la description, en particulier, dans les scènes verbales. Ces verbes se déploient dans les descriptions interprétatives d’œuvres d’art, nous citons l’exemple suivant : « On apercevait, contre les murs, de grands tableaux dont le vernis brillait.. »(Chap1/P1). En fait, d’entrée de jeu, dés le début de l’Education Sentimentale, Frédéric regarde les anciennes peintures de son nouvel ami Pellerin « il les admira » dit le narrateur deux fois. La récurrence de ces verbes témoignent que cet art trouve une signification marquante dans l’intrigue. Ceci est perceptible aussi dans les adjectifs qui se manifestent dans les passages dialogiques tels que « original, bien touché » utilisés par le personnage M. Dambreuse en qualifiant les tableaux de Pellerin lors de l’exposition de peinture dans la deuxième partie du roman. En outre, Les substantifs à valeur sémantique fort liée à la peinture illustrent la magnitude de cet art « Elle alla chercher le portrait. Le rouge, le jaune, le vert et l’indigo s’y heurtaient par taches violentes, en faisaient une chose hideuse, presque dérisoire. » Ces impressions visuelles et sensorielles renforcent le parallélisme avec l’observation d’un tableau impressionniste.

Flaubert décrit aussi certaines images en les nommant d’une manière explicite comme « les sujets équestres d’Alfred De Dreux » (P2) que Frédéric accroche au mur de sa chambre, « les gravures de Marc-Antoine » qu’il va voir au cabinet des estampes, etc.

Ces images désignées ne sont-elles pas le témoin d’une inspiration patente par l’art pictural du XIXème siècle ? Ne prouvent-elles pas que la peinture joue un rôle à la fois narratif, poétique et esthétique au sein de l’œuvre ? Dans cet exemple : «On regardait un portrait de femme, avec cette ligne écrite au bas en lettres noires : ‘Mlle Rose-Annette Bron, appartenant à M. Frédéric Moreau, deNogent.’ C’était bien elle, ou à peu près, vue de face, les seins découverts, lescheveux dénoués, et tenant dans ses mains une bourse de velours rouge, tandisque, par derrière, un paon avançait son bec sur son épaule, en couvrant lamuraille de ses grandes plumes en éventail. » Le figement de la femme en une image ne prépare-t-il pas les désillusions futures et n’anticipe-t-il pas sur le dénouement ?

En fait, la focalisation interne dans le dernier exemple semble mettre en évidence l’importance de l’art pictural en matière de décryptage de personnages et de l’intrigue.

Dans l’Education Sentimentale, personnages et paysages sont appréhendés à travers le regard de Frédéric. Ce rétrécissement du champ de vision se montre par le biais de la distribution des détails, la rigueur de l’organisation de la description et le déplacement dans l’espace.

Le premier portrait de Mme Arnoux illustre une contemplation artistique qui ressemble à un travail d’un artiste sur sa toile « il la regarda.

Elle avait un large chapeau de paille, avec des rubans roses qui palpitaient au vent derrière elle. Ses bandeaux noirs, contournant la pointe de ses grands sourcils, descendaient très bas et semblaient presser amoureusement l'ovale de sa figure. Sa robe de mousseline claire, tachetée de petits pois, se répandait à plis nombreux. Elle était en train de broder quelque chose ; et son nez droit, son menton, toute sa personne se découpait sur le fond de l'air bleu. » (Chap1 /P1)

Cette approche impressionniste implicite est non seulement justifiée par la posture contemplative de Frédéric mais aussi par celle de Mme Arnoux figée tel un personnage dessiné dans un tableau.

L’énumération des détails « réalistes », notamment vestimentaire de la plus extrême précision, les formes précises et le contraste entre les couleurs sombres et claires corroborent l’idée d’un tableau implicite. En effet , nous pouvons déceler dans cette description une représentation traditionnelle de la vierge , « assise » , la tête couverte ici par le chapeau, les plis nombreux qui rappellent le grand voile et la dominante de bleu et de rose , des couleurs associés aux présentations de « la madone » et puis, l’arrivée de sa petite fille vient à point nommé pour rappeler ‘la vierge à l’enfant’ , D’ailleurs on découvre plus tard qu’elle porte le même prénom « Marie ».

Plus loin, dans le premier chapitre de la troisième partie, l’escapade de Frédéric et Rosanette à Fontainebleu nous plonge dans un univers naturel que Flaubert décrit longuement tout en renonçant au performatif, à l’énoncé d’une information précise pour faire entrer le lecteur dans un cocon de silence et de verdure , semblable à un tableau, une suite de métaphores , des comparaisons et des analogies qui se dilatent dans un impressionnisme poétique des plus suggestifs, nous citons quelques exemples :

« Il y avait des chênes rugueux, énormes, qui se convulsaient [...] comme un

groupe de Titans immobilisés dans leur colère » , « Au milieu du jour, le soleil, tombant d’aplomb sur les larges verdures, les éclaboussait, suspendait des gouttes argentines à la pointe des branches, rayait le gazon de traînées d’émeraudes, jetait des taches d’or sur les couches de feuilles mortes »

Cette description prolifèrante se manifeste aussi dans l’épisode de la description des travailleuses de la fabrique où la dimension structurale qui sert à faire beau , en montrant un tableau en filigrane, est au service de la dimension réaliste qui sert à faire vrai.

D’ailleurs, l’étude des sources du roman indique le recours aux illustrations du cabinet des estampes sur la région de Creil.

Au terme de cette étude, Nous pouvons constater que la deuxième rencontre entre Frédéric Moreau et Mme Arnoux, le portrait de Rosanette dans le bal masqué, la description des scènes politiques et celles de la Révolution, en gros tous les dérives dans l’intemporel, l’imaginaire et la rêverie de Frédéric Moreaux , toute cette latence lexicale et sémantique suggèrent que l’écriture romanesque de Flaubert se nourrit de l’art pictural.

2-. Significations psychologiques et sociales de la peinture dans la vie de Frédéric et de. Pellerin.

L’accès à Paris représente pour Frédéric Moreau l’inauguration d’une nouvelle

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