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sentir qu'ils sont bienvenus dans le monde. Etrangement pourtant, le nombre accru de familles monoparentales nous renvoie à la situation d'antan où les familles n'étaient pas monoparentales de fait mais l'étaient pour ainsi dire symboliquement, tellement les pères étaient manquants. [...] Ces considérations étant faites, les questions qui guident ma réflexion pourraient se formuler ainsi : Comment se fait-il que les rapports de proximité entre mère et enfant finissent par heurter le développement de l'une et de l'autre au niveau de leur individualité ? Comment arrivent-ils à inhiber le développement naturel du fils vers l'autonomie et l'indépendance et le développement personnel de la femme devenue mère ? Comment se fait-il qu'une relation qui commence généralement dans l'amour réciproque se termine pitoyablement avec une grande

attente déçue du côté d'une mère solitaire et une rage inavouable chez un enfant qui fait tout pour tenir sa mère à distance ? La relation mère-enfant se doit-elle d'être un drame d'amour qui finit mal ?

[...]

Ne pas savoir où l'un commence et où l'autre finit

L'enfant vient au monde et il n'est pas facile dans les premiers mois de savoir où l'un commence et où l'autre finit. Mère et fils sont mêlés l'un à l'autre dans l'amour. Cette confusion bienheureuse devra pourtant se défaire peu à peu pour permettre à chacun de poursuivre son développement. Sinon, elle laissera des empreintes psychiques importantes dans la vie de l'enfant. A cet égard, le rapport mère-fils est un terrain particulièrement délicat en raison du fait que, contrairement aux filles, les fils auront, devenus adultes, à entrer en relation amoureuse et sexuelle avec une personne de même sexe que leur mère. Pour qu'une distinction psychologique se fasse bien entre leur partenaire potentielle et leur propre mère, il faudra qu'il y ait séparation. Sinon, les territoires demeureront confondus et les fils prêteront à leur femme les attributs que portait leur mère. Ils se retrouveront vite en position de tout-petits sans défense devant une partenaire désemparée qui ne saura trop que faire de la toute-puissance qui lui est accordée. Ou encore, elle aura à essayer des coups et des colères qui ne lui sont manifestement pas adressés. Cette difficulté particulière aux garçons et les conséquences qu'elle produit sont souvent difficiles à comprendre pour les mères. Mais si une femme tente d'imaginer, à l'inverse de la réalité, qu'elle est née du ventre du père, qu'elle a été abreuvée à son sein pendant de nombreux mois, qu'elle a été cajolée par lui et qu'elle s'est baignée dans son odeur, elle pourra avoir un aperçu de ce qui se passe du côté du garçon. A l'idée qu'elles devraient entrer dans un rapport amoureux et sexuel avec une personne de même sexe que celle qui leur avait donné la vie, plusieurs femmes qui se sont prêtées à cet exercice ont réagi en disant : « Il me semble que j'aurais absolument besoin de la présence d'une femme pour me tirer du côté de la féminin avant de pouvoir faire l'amour avec un homme. » Voilà précisément ce qui n'arrive pas du côté du garçon, trop souvent il n'y a personne du même sexe que lui pour le tirer du côté du masculin. Pourtant, pour que la confusion entre mère et fils s'éclaircisse, il doit y avoir séparation et une figure paternelle a été de tout temps l'artisan naturel de cette séparation. Voilà pourquoi le père doit être présent. Voilà aussi pourquoi la mère doit lui faire de la place chaque fois que possible. Voilà pourquoi on doit faire circuler du masculin dans la famille quand le père a déserté ou qu'il est mort. Cette séparation mère-fils est tellement importante sur le plan psychologique que, dans certaines peuplades, on a remarqué que la phase de séparation entre la mère et son enfant peut durer quinze ans. Par exemple, dans certaines tribus, le garçon qui vient d'être arraché au monde maternel à l'aube de sa puberté ne peut revoir sa mère que lorsqu'il a pris une épouse. On a remarqué également que plus les symbioses étaient longues et profondes entre mère et fils, plus les rites initiatiques s'avéraient cruels et violents. Cela concerne en particulier ces

peuples où l'enfant partage longtemps et le lit conjugal et où on le sépare très progressivement de la mère.

L'enfant a accès au sein de la mère à volonté, parfois jusque dans sa troisième année. Il vit dans ses bras, peau à peau, à dort nu avec elle jusqu'au sevrage. Après, garçons et filles dorment à part de leur mère, mais à trente ou soixante centimètres d'elle. Avec le temps, les garçons sont incités par leurs parents à dormir un peu plus loin de leur mère mais pas encore dans l'"espace mâle" de la maison. En dépit d'un contact grandissant avec leur père, les garçons continuent cependant à vivre avec leur mère et leurs frères et soeurs jusqu'à sept ou dix ans. Les tribus de Nouvelle-Guinée, conscientes du danger de féminisation du garçon, procèdent à des rites d'initiation généralement très longs et traumatisants, à la mesure du lien extrême mère-fils qu'il s'agit de dénouer.

Les primitifs avaient déjà saisi qu'il s'agissait de bien séparer le fils de la mère pour prévenir les conflits et encourager une saine relation d'amour. Ils avaient aussi compris que l'officiant par excellence de cette séparation est le père. Il s'agit en somme de créer l'importante triangulation père-mère-enfant. Ainsi ce dernier fait l'apprentissage nécessaire des limites et de la frustration. Et, du même coup, il gagne une relation au père.

Le hic ! C’est que le père n'est pas là

La véritable semence du conflit qui s'élaborera à travers les années entre une mère et son fils et qui les conduira du mariage d'amour au divorce amer est, un triangle père-mère-enfant dysfonctionnel, pour employer un mot de la psychologie moderne. Il y a un déséquilibre fondamental sur ce triangle parce que la plupart du temps la mère est présente sur le plan affectif et physique alors que le père l'est peu. Ce triangle défectueux résulte de la famille nucléaire qui a été fondée avec un membre manquant, le père, qui devait travailler à l'extérieur. Certains hommes éprouvent des difficultés à assumer une paternité engagée. Ils n'arrivent pas à céder la place d'enfant à l'enfant. Ils tolèrent mal que leur femme devienne mère parce qu'ils se sentent abandonnés. Ils se sentent tellement extérieurs à la naissance de l'enfant que l'attention accordée à ce dernier par la mère menace leur équilibre narcissique. En perdant l'attention de leur partenaire, ils perdent du même coup le soutien affectif qui les tenait e équilibre. Nous pouvons penser que ces hommes ne peuvent pas supporter de voir leur femme devenir mère, parce qu'alors le problème non résolu avec leur propre maman remonte des profondeurs. Les fantasmes se mêlent à la réalité et leur partenaire devient bientôt aussi menaçante que leur mère a pu l'être en l'absence d'un père pour les aider à se séparer. Cela explique peut-être le fait que 7% des mères soient victimes de violence pendant leur grossesse et que, d'autre part, les jeunes femmes soient quatre fois plus souvent soumises à des agressions que les autres, au moment où leurs conjoints n'ont pas encore suffisamment différenciée la mère de la partenaire. Ce triangle défectueux commence tout juste à se rééquilibrer grâce à l'entrée du père personnel sur la scène de l'histoire. La famille nucléaire n'est pas en train d'éclater, elle est en train de pendre forme sous nos yeux avec beaucoup de difficultés. Elle est encore à créer. On

peut même se demander si elle représente une stratégie de survie acceptable pour l'espèce humaine. Sans doute verrons-nous dans les prochaines années la naissance de nouvelles formes familiales, peut-être plus collectives, qui permettront aux enfants qui n'ont pas la chance d'avoir leur père ou leur mère naturelle de recevoir malgré tout un paternage et un maternage adéquats.

Le mariage mère-fils

Mais qu'arrive-t-il lorsque le triangle est défectueux ? Le lien puissant qui unit la mère à son fils ne sera pas défait, au contraire, il sera renforcé par la fascination naturelle d'un sexe envers l'autre. Il y aura mariage symbolique entre la mère et le fils parce que le père qui est l'accoucheur d l'enfant sur le plan psychique ne remplit pas sa fonction naturelle. D'autant plus que dans les faits le père manquant s'avère souvent un partenaire tout aussi manquant pour sa conjointe. La femme-devenue-mère, se retrouve ainsi délaissée sur le plan affectif alors qu'elle a plus que jamais besoin du rapport avec son partenaire pour rester présente au fait qu'elle est encore femme. En effet, se sentir encore désirée malgré les transformations de son corps peut être un élément déterminant pour garder la femme vivante en elle et l'empêcher de disparaître dans la tâche maternelle. Au mieux, le désir mutuel des conjoints permet

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