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Safaa

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r l'actant Adjuvant: c est la catégorie. polémico-contractuelle.

Ce modèle, issu de la lecture proppienne du récit, reste cependant très proche de l'univers narratif de référence, le conte populaire. Il en épouse la perspective dominante, qui est celle du sujet-héros: celui-ci, porteur des désirs et des craintes du groupe, incarne les valeurs sociales de référence. Mais le modèle occulte du même coup le parcours du «traître» (l'opposant). Celui-ci n’intervient qu’occasionnellement, pour contrarier, lors des épreuves, le parcours du héros et mettre en danger les valeurs dont il est porteur. Ce faisant, le modèle reste ancré dans l' univers axiologique propre à l'ethno-littérature, exclusivement relatif à la perspective adoptée: le conte, à travers le parcours de son héros, fait subir aux valeurs collectives le risque de l'épreuve à seule fin de les retrouver, au terme du récit, consolidées. Or, comme les théoriciens de la littérature l'ont montré (de Lukács et Bakhtine à Ricœur et Kundera), le roman moderne est fondé lorsque, avec Rabelais et Cervantès, le récit met en scène une rupture d' adhésion avec ces valeurs, lorsqu'il adopte la perspective d'un autre personnage central que celui qui est a priori représentatif des valeurs collectives de la sphère sociale, mettant ainsi l'ironie à la naissance de l'écriture romanesque de la modernité: Panurge par exemple dans Le Tiers-Livre, ou Sancho dans le Don Quichotte.

l.l.2. Des actants positionnels

Afin de se détacher des contraintes spécifiques d'un univers narratif de référence et de se doter d'un instrument de plus large portée, la sémiotique a progressivement adopté une seconde formulation du dispositif actantiel. Se substituant à la précédente, elle se présente comme un système plus épuré, plus abstrait et plus général, réduit à trois positions relationnelles: celle du sujet (en relation avec ses objets valorisés), celle du destinateur (en relation avec le sujet-destinataire qu'il mandate et sanctionne au regard des valeurs dont les objets sont investis), celle de l'objet (médiation entre le destinateur et le sujet).

Un second dispositif se dessine, parallèle, symétrique et inverse au modèle centré sur le sujet, celui de l'anti-sujet. Établissant une relation d'opposition avec le sujet, l'anti-sujet se réfère à des valeurs inscrites dans la sphère d’un anti-destinateur. La dimension polémique se trouve ainsi installée au coeur des processus narratifs. Les deux actants sont appelés à se rencontrer et à s'affronter, soit de manière conflictuelle (par la guerre ou la compétition), soit de manière contractuelle (par la négociation et l'échange).

Adjuvant et opposant ont disparu: le premier est intégré à la sphère du destinateur, qu'il représente lorsqu'il intervient dans le récit et dont il constitue par conséquent un rôle actantiel ; le second est intégré à la sphère de l'anti-sujet. L'introduction de cette «sphère» modifie sensiblement la représentation des univers narratifs: non seulement elle met en évidence la structure polémique sous jacente à tout déroulement narratif, que celle-ci se manifeste sous la forme du contrat ou celle du conflit, mais surtout elle laisse ouvert le passage d'un pôle à l'autre (le contrat jugule le conflit latent, le conflit se résoud en contrat). Elle fait apparaître par ailleurs le dédoublement des parcours narratifs en deçà de toute assomption de valeurs (le parcours peut être lié à la perspective du destinateur, ou à celle de l' anti-destinateur). La notion de perspective, libérée de l'appartenance à un univers axiologique de référence, prend alors tout son sens. Un récit peut sélectionner, comme parcours central, celui du héros positif ou celui du héros négatif, celui de Sherlock Holmes ou celui d'Arsène Lupin...

l.2. Le programme narratif

Le programme narratif (PN) est la structure syntaxique élémentaire qui «met en musique» le paradigme actantiel, à travers la relation entre le sujet et l'objet, érigés ainsi en hyper-actants. Il constitue un algorithme de transformation des énoncés narratifs. On vient d'en apercevoir les prédicats fondamentaux lors de l'analyse du texte de Le Clézio. Examinons-le à présent de plus près. Le programme narratif articule deux énoncés de base: les énoncés d'état et les énoncés de faire. Ceux-ci ont pour fonction de transformer les états. Les énoncés d'état quant à eux se fondent sur les prédicats élémentaires d' «être» et d' «avoir». Le récit minimal repose ainsi sur la transformation d'un «état de choses», par la privation ou par l'acquisition qui résulte d'un prédicat d'action. Pour comprendre ce mécanisme de transformation, il faut postuler deux types opposés d'énoncés d'état, définissant la relation qu'entretient le sujet avec les objets de sa visée: ou bien il possède les qualités et les valeurs inscrites dans ces objets (la beauté, la richesse, la reconnaissance...), ou bien il ne les possède pas. Le concept sémiotique de jonction définit cette double relation élémentaire: conjonction (lorsque le sujet possède l'objet, il y est conjoint) et disjonction (lorsque le sujet est privé de l'objet, il en est disjoint). Le programme narratif désigne donc l'opération syntaxique élémentaire qui assure la transformation d' un énoncé d' état en un autre énoncé d' état par la médiation d'un énoncé de faire. Ainsi, par exemple, état l disjonctif: Cendrillon est pauvre (non-avoir) et humiliée (être). Elle rencontre le prince et l'épouse (énoncé de faire). État 2 conjonctif: Cendrillon est riche et considérée...

La formule sténographique de ce programme narratif élémentaire se présente comme suit:

PN = Fonction (faire) (S1 (sujet de faire) à (S2 (sujet d'état) È O (objet de valeur))

PN = Fonction (faire) (S1 (sujet de faire) à (S2 (sujet d'état) Ç O (objet de valeur))

Le programme narratif est une fonction (un faire), par laquelle un sujet de faire (S1) fait en sorte qu'un sujet d'état (S2) se trouve disjoint (È) d'un objet auquel il était conjoint (Ç), ou inversement. Les deux actants sujets (de faire et d'état) peuvent être manifestés par deux acteurs distincts (pensons au cas du «don» par exemple), ou par un seul et même acteur (pensons au cas du «vol»).

Le PN se présente comme une formule élémentaire que les structures des récits effectifs déploient, complexifient et hiérarchisent à loisir. On pourra ainsi distinguer les récits d'acquisition de valeurs et des récits de déperdition. La typologie des programmes narratifs invite, par ailleurs, à hiérarchiser le programme de base, ou programme principal, et les programmes d'usage, ou programmes secondaires: l' accomplissement de ces derniers est nécessaire à la réalisation du premier. L'analyse narrative propose ainsi une formulation syntaxique à la topique des moyens et des fins, lui conférant une portée plus générale dans l'analyse des discours de l'action, et y réinscrivant par là même leur orientation téléologique.

2. Le schéma narratif

Le programme narratif modélise la structure élémentaire de l'action. Celle-ci s'inscrit dans une suite de séquences qui, bien entendu, n'est pas forcément circulaire. Afin de rendre sensible ce fait que les enchaînements d'actions mises en récit ont un sens et qu'une intentionnalité s'y dessine a posteriori. Greimas a mis en évidence l'existence d un cadre général de l'organisation narrative, cadre de portée, sinon universelle, du moins transculturelle: le «schéma narratif canonique».

Le terme schéma, repris à Hjelmslev, est essentiel dans la conception sémiotique du langage. Il désigne, d'une manière générale, la représentation d'un objet sémiotique réduit à ses propriétés essentielles. Plus précisément, Hjelmslev reformule ainsi la célèbre dichotomie saussurienne Langue vs Parole en Schéma vs Usage. Le schéma se définit alors comme une combinatoire ouverte, un système, à l'intérieur duquel l'usage sélectionne des combinaisons particulières. L'usage est ce que les communautés linguistiques, bien en deçà de la parole individuelle, font des disponibilités du système qu'offre la langue. Ainsi, qu'il s'agisse de langue ou de discours, le schéma est ouvert à une infinité de possibles, alors que l'usage réalise parmi ces possibles un ensemble relativement fermé de combinaisons effectivement produites à I' intérieur d' une aire linguistique et culturelle donnée. Fermeture de l'usage, ouverture du schéma: cette conception s'applique au domaine particulier de l'organisation narrative.

2.1. La formation du schéma narratif

2.1.1. Schéma 1: les trois épreuves

De même que pour l'actant, la genèse

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