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Dissertation Dépassement D'Une Épreuve

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, de l’épreuve puisqu’il perd Eurydice, la femme qu’il aime, et tente de la retrouver. On retrouve ensuite le registre lyrique dans toute la poésie. Ce dernier traduit les sentiments et les émotions du locuteur, du « je ». Le poète emploi un langage recherché, une rhétorique et une musicalité. La poésie devient un moyen de soulager le cœur, de guérir la douleur. Ainsi, le motif de la mort est très récurrent dans la poésie. Pierre de Ronsard, dans le poème « Je n’ai plus que les os, un squelette je semble », évoque sa propre mort dans une ultime tentative de surmonter l’épreuve de la vieillesse. Victor Hugo évoque la mort de sa fille et annonce : « Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps » dans son poème « Demain, dès l’aube », extrait du recueil Les Contemplations. Paul Eluard tente de surmonter la mort de sa femme adorée Nush dans le poème « Notre vie », extrait du recueil Le Temps déborde, publié en 1947 et exprime sa douleur dès le premier vers : « Notre vie tu l’as faite elle est ensevelie ».

De plus, la poésie est une forme pratique pour dire les états d’âme du poète. En effet, la grande liberté octroyée par le genre, l’existence de formes fixes comme le sonnet ou le rondeau ou de formes libres, la multiplication des images et la création d’une musicalité propre permettent au poète de dire l’épreuve et de renouveler la manière de la dire. Ainsi, chaque poète dit à sa manière le même sentiment. Evoquons l’exil par exemple. Joachim Du Bellay, exilé à Rome pour son travail, emploie le sonnet pour évoquer sa nostalgie de la France. Ainsi, il prend la plume et, dans le sonnet « Heureux qui comme Ulysse ... », tiré des Regrets, chante la beauté de son « petit village » et peint « la cheminée» fumante de sa chaumière angevine tout comme Villon évoque les « neiges d’antan ». La forme même du sonnet permet en peu de mots d’évoquer ce sentiment. Victor Hugo, dans le poème « Ultima verba », extrait des Châtiments, indique qu’il « accepte l’âpre exil » en onze quatrains et emploie l’exagération pour dire son combat contre le despotisme et pour la République. Après tout, il affirme : « Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là ! ». Blaise Cendrars, dans son recueil La prose du Transsibérien, publié en 1913, utilise le vers libre et la prose pour signifier sa nostalgie tandis que le poème « Exil » de saint John Perse, écrit dans une révérence à la langue, est une introspection symbolique et fantasmagorique de l’exil. Charles Baudelaire, dans son poème « L’Albatros », évoque un exil plus intérieur et emploie l’image de l’albatros comme double du poète, maladroit au sein du monde. Chacun évoque un exil personnel et utilise des moyens différents : poèmes plus ou moins longs, musique, images différentes, etc. tous révèlent ainsi les multiples possibilités du langage poétique à dire l’épreuve.

La poésie a donc une fonction autobiographique réelle. Le poète se livre dans son œuvre. Il dit dans une nouvelle forme ce qui est confié au journal intime ou au recueil de mémoires. Ainsi, Victor Hugo répond à la question « Qu’est-ce que les Contemplations ? » en indiquant « C’est ce qu’on pourrait appeler, si le mot n’avait quelque prétention, les Mémoires d’une âme. Ce sont, en effet, toutes les impressions, tous les souvenirs, toutes les réalités, tous les fantômes vagues, riants ou funèbres, que peut contenir une conscience, revenus et rappelés, rayon à rayon, soupir à soupir, et mêlés dans la même nuée sombre. » Le poète Henri Michaux, dans son recueil Passages, publié en 1950, avoue : « J'écris pour me parcourir. Peindre, composer, écrire: me parcourir. Là est l'aventure d'être en vie. » Cette traversée du dedans, de l’être est l’un des intérêts de la poésie. Il s’agit d’exorciser ce qui se cache, de qui n’est pas dit. La poésie est intéressante en ce sens où elle permet au poète d’exorciser ses sentiments d’une manière très personnelle, elliptique ou non. Arthur Rimbaud, dans son ouvrage Une Saison en enfer, livre à demi-mots, sa traversée des Enfers. Le poème « Mon cœur mis à nu » de Charles Baudelaire est l’écriture fragmentaire d’une pensée (Le poète au jour le jour note ses impressions). Finalement, comme le dit Baudelaire, « le premier venu, pourvu qu'il sache amuser, a le droit de parler de lui-même ». Toute poésie dit l’être et ses épreuves, celles de la vie quotidienne. La poésie, parce qu’elle est écriture de l’homme par l’homme, est efficace pour aider à surmonter des épreuves.

Néanmoins, la poésie n’est pas toujours efficace pour dire et aider à surmonter une épreuve. En effet, le poète peut se complaire dans la douleur. La poésie peut être un refuge traître, une nouvelle prison où le poète semble incapable de dépasser sa douleur. Il ne fait que l’exprimer sans y trouver de solution. La poésie devient un remède incertain, temporaire et donc illusoire. Ainsi, Baudelaire, même s’il exprime ses difficultés dans son recueil Les Fleurs du mal, semble incapable de combattre le sentiment de spleen qui l’habite. De même, les auteurs romantiques ne savent lutter contre ce « mal du siècle » que Chateaubriand définit. Ils ont du mal à faire face aux bouleversements politiques de leur temps et vivent mal la perte de leurs idéaux. La poésie prend alors des accents de rêverie afin de fuir la réalité trop décevante. C’est ce qu’Alfred de Vigny propose dans ses quelques vers du recueil La Maison du berger :

Si ton cœur, gémissant du poids de notre vie,

Se traîne et se débat comme un aigle blessé, […]

Pars courageusement, laisse toutes les villes

Vaincre l’adversité par l’emploi de la poésie peut même mener à un échec. Gérard de Nerval a ainsi tenté d’utiliser l’écriture comme thérapie, notamment dans ses recueils poétiques Les Chimères ou Les filles de feu, mais n’a pu échapper à sa condition d’homme et a fini par se pendre. Son poème « Desdichado » introduisait l’épreuve : « Je suis le Ténébreux, le Veuf, l’Inconsolé, ». La poésie ne semble donc pas systématiquement la solution idéale et pérenne au dépassement de l’épreuve.

De plus, le poète peut transformer la douleur de l’épreuve, la déformer, la métamorphoser au moyen de la poésie. Le lecteur peut alors s’interroger sur la véracité de l’épreuve évoquée. En effet, la poésie est l’usage d’un langage différent qui peut déformer la réalité des sentiments. Le poète ment dans des formes. Puisque le poète use de formes préétablies, puisque le poète vise un lectorat, son discours est nécessairement travestissement de l'expérience biographique. Quand Victor Hugo évoque sa fille dans le livre IV « Pauca meae » des Contemplations, il cherche à surmonter une épreuve mais aussi à immortaliser sa fille. La poésie sert alors à magnifier, célébrer, exalter la peine. Certains poètes travestissent l’expérience parce que dire tout est difficile. La poésie signifie donc une totale honnêteté face aux autres et face à soi-même. Après tout, Arthur Rimbaud dit : « Je est un autre ». Le poète ne maîtrise pas ce qui s’exprime en lui. L’usage des mots est déjà une forme de trahison de la pensée. Si certains poètes oscillent entre rêve et ivresse, le poète reste un être de la retenue. De même, les mots ne sont pas interprétés de la même manière par tous. Délivrer un message ne veut pas dire qu’il sera entendu. Le dépassement de l’épreuve est donc un passage plus complexe à vivre par le biais de la poésie qui est multiplication de sens et d’interprétations. C’est ce qui fait la complexité de l’étude de la poésie, souvent considérée à tort comme hermétique. Il existe une disjonction entre le vécu (la réalité) et le poétique (le texte) qui interroge le ressenti final de l’épreuve évoquée.

Enfin, la poésie est une déformation de l’épreuve puisqu’elle doit parler à tous. Cette portée universelle, insérée dans l’œuvre par l’auteur lui-même, implique des choix. La poésie sert à tous mais trahit le poète puisque c’est moins la singularité d'une épreuve qui se dit et se raconte en poésie qu'une expérience humaine universelle. En effet, le lyrisme fait intervenir deux personnes : l’auteur qui emploie la première personne du singulier et le destinataire, le lecteur, représenté par la deuxième personne du singulier. Les sentiments de l’un sont les sentiments de l’autre afin que la douleur et la peine ne soient pas incomprises. Victor Hugo, dans la préface du recueil Les Contemplations, annonce que « ceux qui s’y pencheront retrouveront leur propre image dans cette eau profonde et triste, qui s’est lentement amassée là, au fond d’une âme […] Ce livre contient, nous le répétons, autant l’individualité du lecteur

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