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Aventure Indienne Voltaire

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er l'humanité.

Dans Aventure indienne, Voltaire transpose des faits qui se sont produits à son époque. On pense bien sûr à l'affaire Calas. Voltaire s'inspire du sort de Jean Calas, condamné en 1762 au supplice de la roue, avant d'être exécuté par strangulation. On ne peut isoler le conte de ce fait divers dramatique. Voltaire obtiendra la réhabilitation de la famille Calas en 1765. Cette affaire peut expliquer la réflexion amère sur la prétention des hommes à rendre « justice » : «Elles ne savent pas qu'il n'y a point au fond de nation plus cruelle que la française. ».

Dans le conte, introduit par la formule présentative « il y avait », le cadre spatio-temporel est décalé, mais les allusions aux superstitieux et aux fanatiques (« gredins et gredines », périphrase ironique « les bonnes femmes de la ville » pour désigner les fausses dévotes et autres davidées) démontrent que la visée de Voltaire consiste dans une même dénonciation de l'esprit de superstition, de l'abomination du fanatisme religieux.

Outre le fait que l'un est un récit et l'autre un article de dictionnaire, les deux textes de Voltaire, s'ils traitent d'un sujet très similaire, sont de registres néanmoins sensiblement différents. Aventure indienne est mené avec une vivacité amusée: c'est le ton du conte philosophique (donc une fiction, un univers fictif, avec une histoire totalement inventée – mis à part le personnage de Pythagore, qui d'ailleurs, n'a pas été brûlé vif à Crotone). C'est l'univers du merveilleux ( les animaux comme dans les fables ou fabliaux) parlent et donnent une leçon à un grand philosophe de l'Antiquité); s'il y a du pathétique dans le discours de ces animaux qui se plaignent de leur sort, c'est un pathétique parodique qui multiplie les interjections («Ô nature... »), les exclamations plutôt candides ou naïves (« Que je suis malheureuse d'être née herbe ») et les procédés oratoires en décalage complet avec l'identité réelle de celui qui parle (une herbe, une huître). Ainsi le conte est traversé par l'humour, parfois par l'humour noir (l'autodafé assimilé à une « fête ») qui tient à la parodie, au comique burlesque du paradoxe ; c'est pourquoi l'ironie est légère et amusée (en raison de la présence de l'absurde dans la narration). Enfin, l'ironie tragique (ou ironie du destin, de l'histoire, du sort) du fait que celui qui a fait le bien et a sauvé des flammes deux victimes innocentes périt par le feu!

L' article du Dictionnaire philosophique portatif (en fait, un livre de petit format, imprimé pour sa première édition en juillet 1764 dans la ville de Genève chez Grasset , sans nom d'auteur et vendu clandestinement ) fait référence à un événement réel, qui se déroula à Abbeville le premier juillet 1766. Le jeune François Lefèbvre, Chevalier de La Barre, âgé de vingt ans, fut décapité et son corps affreusement mutilé (autour duquel on avait attaché avec des cordelettes le Dictionnaire Philosophique de Voltaire - mis à l'index dès sa première impression par l'Eglise catholique) fut jeté avec la tête et la langue arrachée dans un bûcher. Voltaire, occupé à une autre affaire, celle de Sirven, n'apprit la mort du jeune chevalier qu'une semaine après le supplice organisé à Abbeville. Ce récit a donc un caractère nettement historique : Voltaire ne met plus en scène les êtres fictionnels habituels de la fable politique ou morale, mais une personne réelle, désignée par son véritable nom. Le texte est un factum, une entreprise de propagande. Il présente un mélange de registres... Il allie le pathétique et le tragique dans la description des tortures infligées au jeune chevalier de La Barre au registre polémique (Voltaire, co-inculpé dans la sentence, fait la satire de ces juges inquisiteurs qui sont aussi ses persécuteurs) et à l'ironie, non plus amusée, mais mordante et amère. L'indignation est ici beaucoup plus sensible, puisqu'il s'agit d'un réquisitoire, d'un pamphlet contre un procès inique, un libelle contre les « rôtisseries judiciaires ».

PLAN DU COMMENTAIRE LITTERAIRE

1. Pittoresque de la description et du récit: les séductions du conteur

1.1. Structure du récit et personnages

• Des changements de lieux, des péripéties, du dialogue; du suspense;

un retournement de situation et le coup de théâtre final.

• Un héros intelligent et sage, mais simple et à valeur symbolique.

• Des sortes d' « adjuvants » (l'herbe, l'huître, le sage de l'Inde).

• Des opposants: les juges inquisiteurs et les dévotes, les préjugés.

• Une quête: celle de la paix et de la tolérance

(insister dans cette première partie sur les critères définitoires de l'apologue, un genre littéraire systématique et stéréotypique, qui inscrit les personnages dans une construction narrative méticuleuse...)

1.2. Pour dépayser le lecteur, le pittoresque d'un croquis caricatural

• De la couleur locale, des précisions documentaires sur les coutumes, des mots et une réalité « exotiques» : Indiens, place publique, bûcher allumé, peuple hindou, Brama, Xaca...

• Les juges et le tribunal (gestes et tenues vestimentaires: le « bonnet » en lieu et place du chapeau cardinalice des ecclésiastiques catholiques), les « bonnes femmes », les « dévotes » pantins cocasses de l'hystérie répressive des tyrans)

• Marques et procédés de l'ironie : les antiphrases naïves (« mes braves confrères »), l' absence de lien logique entre « il fut brûlé » et « lui qui avait tiré deux Indous des flammes...», mais l'opposition est évidente; les sous-entendus nombreux ( la queue de vache, en guise d'allusion au chapelet de l'extrême onction), l'anticatastase (la fête au lieu de « autodafé »), l'absurde (« à point nommé »), l'exagération ( « Les bonnes femmes de la ville ont été si effrayées » - participe passé à valeur hyperbolique, précédé d'un adverbe d'intensité), l'humour noir (effet comique produit par l'assimilation d'un bûcher à une cuisson de petits légumes), fausse naïveté de Pythagore (qui croit qu'on se dispute au sujet d'un plat de lentilles, autre allusion biblique)

• des allusions à des rites liturgiques catholiques : la substance de Xaca ou de Brama fait référence au dogme catholique de la transusbstantation dans la célébration eucharistique (impanation ou présence du corps du Christ dans l'hostie), au dogme trinitaire (Dieu serait à la fois le Père, le Fils et le Saint-Esprit , ce que les conciles appellent la Sainte-Trinité)

• Voltaire, d'une manière implicite, dénonce la religion catholique qui attribue des pouvoirs miraculeux aux sacrements, ce qui est pour lui, comme pour les Evangéliques et les Pauliniens (Epître aux Romains de Paul qui fustige l'idolâtrie de la Loi, de la Chair), la négation même du sentiment religieux qui doit être un sentiment intérieur (cf opposition entre les « charnels » et les « spirituels » dans les Epîtres, l'Exode 20,4 « Tu ne feras pas de statue, d'idole, d'image », Matthieu 22, 34-40, Jérémie 7-11, Esaïe 1-21)

• critique de la fausse dévotion ; la queue de vache est une allusion à peine voilée aux patenôtres (chapelet servant à réciter le Pater Noster) : pour Voltaire, il est inutile de savoir, de réciter ou marmotter ses patenôtres (les patenôtres blanches étaient censées mener les gens droit en paradis) à l'oraison dominicale (Voltaire a une vision « pascalisante » de la religion)

• L'impassibilité apparente du narrateur : pas de longs commentaires, pas de leçon morale à visée didactique ou philosophique explicite. Voltaire se réfugie derrière une formule atropopaïque

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