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Cahier d'Un Retour Au Pays Natal Aimé Césaire

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poétiques ou pamphlétaires, Aimé Césaire a creusé le sillon de la reconnaissance et de la révolte. Ce concept, en réaction à l’oppression culturelle du système colonial français, vise à rejeter d’une part le projet français d’assimilation culturelle et à promouvoir l’Afrique et sa culture, dévalorisées par le racisme issu de l'idéologie colonialiste.

Construit contre l'idéologie coloniale française de l'époque, le projet de la Négritude est plus culturel que politique. Il s’agit, au-delà d’une vision partisane et raciale du monde, d’un humanisme actif et concret, à destination de tous les opprimés de la planète. Césaire déclare en effet : « Je suis de la race de ceux qu’on opprime ».

Ses livres marquent d'ailleurs une véritable prise de conscience de la condition inégalitaire des Noirs. Long poème constitué de vers libres, fortement influencé par le surréalisme, il est en quelque sorte son manifeste de la négritude. La violence des mots et l’utilisation d’une syntaxe syncopée illustrent le choc éprouvé par l’auteur en foulant le sol de son île. Il semble vouloir hurler au nom du peuple, le sortir de son aliénation. Il exhorte les Noirs de la Martinique à se faire entendre.

Aimé Césaire, agrégé de lettres, rentre en Martinique en 1939, pour enseigner.

LE COMBAT CULTUREL SOUS LE RÉGIME DE VICHY

La situation martiniquaise à la fin des années 1930 est celle d'un pays en proie à une aliénation culturelle profonde, les élites privilégiant avant tout les références arrivant de la France, métropole coloniale. En matière de littérature, les rares ouvrages martiniquais de l'époque vont jusqu'à revêtir un exotisme de bon aloi, pastichant le regard extérieur manifeste dans les quelques livres français mentionnant la Martinique. Ce doudouisme, dont des auteurs tels que Mayotte Capécia sont les tenants, allait nettement alimenter les clichés frappant la population martiniquaise.

C'est en réaction à cette situation que le couple Césaire, épaulé par d'autres intellectuels martiniquais, fonde, en 1941, la revue Tropiques dont le projet est la réappropriation par les Martiniquais de leur patrimoine culturel. Alors que la Seconde Guerre mondiale provoque le blocus de la Martinique par les États-Unis (qui ne font pas confiance au régime de collaboration de Vichy), les conditions de vie sur place se dégradent. Le régime instauré par l’Amiral Robert, envoyé spécial du gouvernement de Vichy, est répressif. Dans ce contexte, la censure vise directement la revue Tropiques, qui paraîtra, avec difficulté, jusqu’en 1943.

Il est alors surnommé « le nègre fondamental ». Sa pensée et sa poésie ont également nettement marqué les intellectuels africains et noirs américains en lutte contre la colonisation et l'acculturation.

Aimé Césaire passe ensuite six mois en Haïti, invité par le docteur Mabille, attaché culturel de l’ambassade de France. Ce séjour l’inspire pour publier un essai historique sur Toussaint Louverture (reconnu pour avoir été le premier leader noir à avoir vaincu les forces d'un empire colonial européen dans son propre pays. Né esclave, s'étant démarqué en armes et ayant mené une lutte victorieuse pour la libération des esclaves haïtiens, il est devenu une figure historique d'importance dans le mouvement d'émancipation des noirs en Amérique) et une pièce de théâtre dédiée au héros de l’indépendance. La tragédie du roi Christophe (1964) constitue une « tragédie de la décolonisation » ou comment le peuple haïtien s’est libéré et se construit un nouveau destin collectif. Cette pièce révèle toutes les difficultés et les contradictions d’une nation en devenir. Comment ne pas reproduire les mêmes erreurs que les colonisateurs ? Comment construire un pays neuf sur des bases aussi précaires que celles de l’oppression ?

APRÈS GUERRE, LE COMBAT POLITIQUE

En 1945, Aimé Césaire, coopté par les élites communistes qui voient en lui le symbole d'un renouveau, est élu maire de Fort-de-France. Dans la foulée, il est également élu député, mandat qu'il conservera sans interruption jusqu'en 1993. Son mandat, compte tenu de la situation économique et sociale d'une Martinique exsangue après des années de blocus et l'effondrement de l'industrie sucrière, est d'obtenir la départementalisation de la Martinique en 1946.

Il s'agit là d'une revendication qui remonte aux dernières années du XIXème siècle et qui avait pris corps en 1935, année du tricentenaire du rattachement de la Martinique à la France. Peu comprise par de nombreux mouvements de gauche en Martinique déjà proches de l'indépendantisme, cette mesure vise, selon Césaire, à lutter contre l'emprise béké (des descendants de colons) sur la politique martiniquaise, son clientélisme, sa corruption et le conservatisme structurel qui s'y attache. Césaire prend cette décision par mesure d'assainissement, de modernisation, et pour permettre le développement économique et social de la Martinique.

En 1950, sort Le Discours sur le colonialisme, une charge virulente et implacable contre l’idéologie colonialiste européenne. Aimé Césaire la compare audacieusement au nazisme. Il dénonce la barbarie interne à la civilisation occidentale :

« Oui, il vaudrait la peine d'étudier [...] les démarches d'Hitler et de l'hitlérisme et de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XXe siècle qu'il porte en lui un Hitler qui s'ignore, [...] et qu'au fond, ce qu'il ne pardonne pas à Hitler, ce n'est pas le crime en soi, [...], c'est le crime contre l'homme blanc, c'est l'humiliation contre l'homme blanc, et d'avoir appliqué à l'Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu'ici que les arabes d'Algérie, les colonies de l'Inde et les nègres d'Afrique [...] »

À des territoires européens de droits et de libertés, Césaire oppose des territoires extra-européens colonisés, soumis à l’oppression et à la haine, au racisme et au fascisme. À des pratiques démocratiques et policées en Europe, il oppose des actions violentes et criminelles commises dans les colonies. Moins d’un an après le début de la guerre d’Algérie, il s’élève contre la torture infligée par l’armée française.

« Pour ma part, si j’ai rappelé quelques détails de ces hideuses boucheries, ce n’est point par délectation morose, c’est parce que je pense que ces têtes d’hommes, ces récoltes d’oreilles, ces maisons brûlées, ces invasions gothiques, ce sang qui fume, ces villes qui s’évaporent au tranchant du glaive, on ne s’en débarrassera pas à si bon compte. Ils prouvent que la colonisation, je le répète, déshumanise l’homme même le plus civilisé ; que l’action coloniale, l’entreprise coloniale, la conquête coloniale, fondées sur le mépris de l’homme indigène et justifiées par ce mépris, tendent inévitablement à modifier celui qui l’entreprend. »

Quelques années plus tard, en 1956, cet esprit libre ne supporte plus le poids de l’héritage stalinien. Il quitte le parti communiste français et adresse à son secrétaire général la célèbre « Lettre à Maurice Thorez ». En 1958, il fonde le Parti progressiste martiniquais (PPM) qui se proclame nationaliste, démocratique et anticolonialiste, inspiré de l’idéal socialiste. Aimé Césaire y défendra longtemps l’idée d’une Martinique autonome, mais ne pourra jamais la réaliser.

La carrière publique du poète se poursuit entre l’Assemblée nationale – où il siège comme non-inscrit de 1958 à 1978, puis comme apparenté socialiste de 1978 à 1993- et sa mairie de Fort-de-France – jusqu’en 2001.

Le développement de la préfecture de la Martinique depuis la Seconde Guerre mondiale

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