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Dom Juan

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de scène répété avec des variations selon la classe sociale... « Voulez-vous dîner avec moi ? Prenez un siège »... Il veut retenir chaque nouvel arrivant, mais les réactions diffèrent. Cette scène nous permet aussi de bien définir la différence bourgeoisie/noblesse et d’illustrer le mépris de la noblesse pour l’argent. Supprimer la scène de M. Dimanche supprimerait toute la gradation rigoureuse de l’acte... ».

On trouvera la lecture du schéma actantiel pour cette scène sur le site de P. Misandeau.

Intérêt psychologique

Don Juan, quoi qu’il en dise, a été troublé par sa visite précédente au tombeau du commandeur. C’est l’occasion ici pour lui de retrouver confiance en lui, de réaffirmer son talent, de retrouver une certaine supériorité (certes un peu facile comme avec les paysannes dans l’acte II).

Le théâtre dans le théâtre

Autre contribution : « De plus, le propos n’est-il pas de parler du théâtre, de ses artifices ? C’est une lecture possible. Ici, Don Juan joue et se joue de M. Dimanche. Il est chez lui, maître des lieux, il règne. »

L’image complexe de Don Juan dans cette scène

On peut voir : un Don Juan joueur, presque enfantin, qui s’amuse de et avec M. Dimanche, un virtuose de la parole, qui improvise et sait comment séduire par les mots, un grand aristocrate qui méprise les valeurs bourgeoises. Mais aussi un Don Juan cruel, qui s’acharne sur M. Dimanche humilié, qui ne paye pas ses dettes, qui transgresse les valeurs morales, sociales, économiques.

Une première contribution : « Pour ma part, je trouve cette scène avec M. Dimanche très précieuse pour montrer aux élèves la différence (essentielle !) entre un noble et un bourgeois - qu’ils confondent généralement : ils sont "riches" l’un et l’autre... Molière écrit pour les nobles et ses pièces sont avant tout jouées à la Cour. Il va dans le sens de son public en ridiculisant les bourgeois qui veulent jouer à être nobles (le Bourgeois Gentilhomme) ou en se moquant des banquiers qui croient aux vertus de l’épargne (l’Avare). En effet, un noble ne doit pas épargner, il doit tout donner, et même gaspiller (fêtes, banquets...). L’épargne et l’économie sont des vertus uniquement bourgeoises. Dans cette scène, Molière semble dire à son public endetté : voici comment vous débarrasser de vos créanciers roturiers. Les spectateurs nobles en profiteront pour se moquer de la vision bourgeoise étriquée de la famille de M. Dimanche : ses enfants, son petit chien... (comme c’est moderne !). Les valeurs nobles sont bien différentes : l’honneur, le nom. En même temps, il s’agit d’un vol caractérisé et d’un "abus de position dominante" : n’importe qui peut le reconnaître. Les nobles rient donc jaune. Et c’est toute l’ambiguïté de la pièce : un grand seigneur (méchant homme) critiqué par un roturier (Molière) devant d’autres nobles et grands seigneurs... Pas facile à faire accepter ! »

Une seconde contribution : « J’ajoute, pour la scène avec M. Dimanche, qu’elle est essentielle si on tient compte de l’analyse de Michel Serre dans Hermès ou la communication : selon lui, Don Juan c’est aussi celui qui pervertit l’ordre social en refusant de s’intégrer dans la circulation des biens, donc dans l’ordre social, "un don pour un don", l’offre et l’échange. Cela permet de comprendre le tout début de la pièce, "Quoi qu’en dise Aristote et toute la philosophie, il n’est rien d’égal au tabac" (voir la synthèse n°197, Molière et le tabac. Sganarelle explique que l’échange du tabac, en offrir à la ronde, c’est le modèle de la vertu, cela rend vertueux. Ce serait un paradigme de la pièce tout entière, la vie sociale repose sur la circulation des biens. Et le fait est que Don Juan prend (des femmes) mais ne rend pas, il "paye" les autres de paroles, il truque en prenant quelque chose pour rien. Donc la scène avec M. Dimanche, en plus de toutes les analyses sur "Don Juan grand seigneur qui ne paye pas ses dettes", ou "Don Juan transgressant chacun des dix commandements", ou "Don Juan méprisant les autres", ou "Don Juan maître de la parole manipulatrice", est essentielle : il ne paye pas ses dettes, de même qu’il ne paye pas la "dette" contractée en épousant Elvire pour l’abandonner, qu’il se félicite d’être acquitté pour le meurtre du Commandeur, sans "payer" ce meurtre par un remords, etc. On pourrait cependant réfléchir à la question suivante, pour moduler l’analyse : Don Juan certes s’exclut de la circulation sociale, cependant il entre dans l’échange social "attendu" deux fois : en se battant contre les voleurs pour aider un noble en détresse (qui s’avère être un frère d’Elvire) il se conduit comme un noble seigneur. Et au dénouement, quand il accepte effectivement le souper promis à la statue du Commandeur, il tient sa promesse. Cependant, cela ne contredit pas l’analyse, et même peut la confirmer : en se jetant au secours de don Carlos, Don Juan offre son épée, pas forcément sa vie, par sens de l’honneur, c’est une autre morale que celle de la circulation des biens, c’est un acte "gratuit" (pas de témoins), relevant de la morale aristocratique, et peut-être un jeu, se précipiter dans l’action, en solitaire. Quant au dénouement, même si l’on conçoit que Molière devait "punir" son personnage (et suivre la tradition, qui permettait un dénouement très spectaculaire, pour un public friand de "comédies à machines"), cela ne contredit pas non plus l’analyse de Michel Serre et même la confirme : Don Juan, encore une fois, n’échange pas un bien contre un bien (repentir et conversion contre le salut de son âme), il accepte un "souper" mortel, ce faisant il refuse l’ordre moral, du repentir, et se jette dans la mort et la damnation - peut-être lucidement - pour refuser cet "échange". Le texte de Michel Serre est vraiment passionnant ! »

Les mises en scène

La scène est supprimée par Patrice Chéreau, qui donne lui-même des explications, dans Avant-scène : cette scène avait « quelque chose d’indéchiffrable dans l’optique où nous nous placions » (contre-temps, triomphe trop facile de celui qu’il condamne à l’échec). La scène intervient à un moment où les rapports entre Don Juan et Sganarelle se sont durcis, ce que ne reflète plus le comportement du valet singeant le maître ; la farce triomphe à un moment

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