Loi 2005

u’acheteurs de vin. L’auteur peut être contacté par courriel à l’adresse suivante : Cauet.jeanmarie@neuf.fr

Du coq au vin 3/10

Raoul est assis à table. Il boit un verre de vin blanc en regardant Marthe qui fait le ménage. Raoul T’as quand même une drôle de dégaine ! Marthe Qu’est-ce que tu lui reproche, à ma dégaine, comme tu dis ? Raoul Ta robe est moche, on dirait une serpillière. Et ce qu’y a dedans, j’aime mieux pas en parler ! T’es sexy comme une tranche de saumon ! Marthe Non mais, tu ne t’es pas regardé ! (prenant des poses) J’suis encore bien roulée, j’airais pu plaire à un vrai monsieur, si j’étais pas tombée sur toi ! Raoul (ricanant) Tu parles ! Si on en rencontrait un, on lui demanderait ce qu’il pense de toi, ça te rabaisserait ton caquet ! Marthe Méfie-toi : je risquerais de partir avec ! Raoul Chiche ! On sonne (ou on frappe) Va donc ouvrir Marthe. Ça te reposera. Marthe Qui c’est-y qui vient nous embêter à c’theure-ci ? Marthe va ouvrir à cour. Gontran et Gwladys entrent. Gwladys Bonjour madame, bonjour monsieur. Gontran Bonjour. Vous êtes bien madame et monsieur Tourin ? Raoul Jamais de la vie ! Je m’appelle Bourdu. Gwladys Tiens ? Pourtant, sur la départementale, il y a une pancarte avec une flèche, et c’est marqué « vente de vin Achille Tourin » Marthe (à Raoul) J’tavais bien dit d’la remplacer, feignant ! Raoul Ah ouais, c’est une vieille pancarte. J’ai racheté les vignes de ce type. Gontran

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Vous êtes bien un œnologue ? Raoul (se levant) Un nœud comment ? Faudrait voir à être poli ! Gwladys Enfin, vous connaissez les œnologues ? Marthe Ah non ! Je les connais durs ou sur le plat, mais pas les nologues. Comment ça se cuit ? Gontran (rire bête) Amusante méprise ! Nous vous demandions de concert si vous produisez du vin. Raoul De concert ? Vous êtes musicien ? Gontran Point du tout, je suis promoteur immobilier. Gwladys Je ne voudrais pas laisser paraître un semblant de début d’agacement, mais nous aimerions savoir si vous vendez du vin, comme votre prédécesseur. Marthe Ah là d’accord ! Si vous causiez comme tout le monde j’aurais compris. Bien sûr qu’on vend du pinard ! Gontran Du pinard ? Mon Dieu, j’eus préféré un bon petit vin de pays ! Raoul C’est pareil ! Pourquoi, vous en voulez ? Gontran Ma foi oui ! C’est pour ça que nous sommes venus ! Raoul (surpris et joyeux) Des clients ! Tu te rends compte Marthe ? Marthe Ouais, c’est super ! Asseyez-vous m’sieur dame ! Gwladys (s’asseyant) Il semble que vous n’exercez pas cette profession depuis fort longtemps… Gontran En effet ! Nous allons en parler, mais d’abord permettez-moi de me présenter. Je suis Gontran Mavrille, promoteur, ainsi que je vous l’ai dit, et voici mon épouse Gwladys. (il s’assied) Raoul (se levant) Enchanté. Moi c’est Raoul Bourdu, ainsi que j’vous l’ai dit, et pis v’là mon épouse Marthe. Vous trinquerez bien avec moi ?

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Marthe Pourquoi avec toi ? J’y ai pas droit, moi, non mais ! Raoul Toi, dès qu’y s’agit de picoler, tu es toujours là ! Il reste du blanc à la cave ou faut aller en chercher dans la remise ? Marthe Il en reste une bouteille : on n’en a bu que cinq ce matin… Raoul J’y vais. Occupe-toi des verres. (il sort à jardin) Marthe Ça j’sais faire ! (à Gontran) C’est mon ancien métier : j’étais bistrote. Gwladys Vous étiez quoi ? Gontran Madame nous dit qu’elle gérait un débit de boissons Marthe (allant chercher trois verres dans un meuble) C’est bien ça ! Ça s’appelait le Coq Gaulois. Il est pas idiot vot’mari ! Gwladys (vexée) Ca je le sais ! Gontran Et un bistro où l’on sert du vin, c’est un local à boisson rouge ! (rire bête. Air stupide de Marthe) Gwladys Voyons Gontran ! Tes traits d’esprit ne peuvent atteindre cette brave femme ! Marthe (posant les verres sur la table) Vous appelez ça un trait d’esprit ? Je suis peut-être idiote mais pour moi c’est une ânerie ! Raoul entre à jardin, une bouteille de blanc débouchée à la main et la donne à Marthe. Raoul Voilà l’engin. Sers-nous, Marthe. (il s’assied. Marthe emplit les verres puis s’assied) Gontran Depuis combien de temps êtes-vous… Heu… Producteur de vin ? Raoul Depuis six mois ! A la vôtre ! Gontran et Gwladys boivent délicatement quelques gouttes, Raoul et Marthe avalent une gorgée et s’essuient la bouche avec le poignet. Gwladys

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Mmh ! Je suis agréablement surprise. Il n’est pas mal du tout ce petit vin. Bravo monsieur Bourdu ! Raoul Oh, il n’est pas de moi celui-là ! C’est du vin à Tourin. Vous pensez bien que depuis six mois j’ai pas encore eu le temps d’en faire ! Gontran C’est évident. Et vous ne ferez que du blanc ? Marthe Pourquoi ? Vous êtes raciste ? Gontran (rire bête) Vous ne ferez pas de vin rouge ? Raoul J’vais p’têt essayer le rosé. Avec un peu de teinture ça peut se faire. Mais pour le rouge il en faudrait trop ! Gwladys (effrayée) Mon Dieu ! Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de changer de métier ? Ils boivent (même jeu) Marthe C’est le loto ! Pas vrai Raoul ? Raoul Attends, faut expliquer. On a gagné au loto. Alors je me suis dit : plutôt que d’acheter du vin, au prix que ça coûte, autant le faire moi-même, c’est plus économique ! Marthe Surtout avec la consommation qu’on en fait ! Alors on a vendu le Coq Gaulois et on est venu ici. De toutes façons on en avait marre d’habiter dans un appartement. Ici au moins, on est au grand air, et au ras du sol ! Gontran Pourtant, il y a des appartements très agréables. Je le sais, j’en construis ! Gwladys Nous vivons en appartement, et j’en suis très contente ! Raoul Moi, ce qui m’fait peur, c’est l’ascenseur. Avec tous les accidents qu’il y a eu ces derniers temps… Faut croire qu’ils sont mal entretenus, ça doit coûter trop cher ! Gontran (avec fierté) Ah mais pour cela, j’ai trouvé la solution : il est vrai que les ascenseurs coûtent cher non seulement à la construction mais aussi à l’entretien. Et s’ils sont mal entretenus, il est également vrai qu’ils peuvent être source d’accident. Alors je supprime les ascenseurs dans mes constructions ! Marthe

Du coq au vin 7/10

Et quand on habite en haut, comment qu’on fait pour remonter le sac de patates et le cageot de pinard ? Gontran Ça ce n’est pas mon problème. Mais il est vrai que j’ai constaté une certaine désaffection de la clientèle pour les niveaux les plus élevés… Raoul Tiens donc, tu m’étonnes ! Allez, on remet ça. (il verse. Seul Raoul et Marthe boivent) Gwladys Quand même, c’est dommage que vous n’ayez que du blanc. Raoul Ah, mais il me reste encore quelques bouteilles de rouge du père Tourin ! Celles-là je peux vous les vendre si vous voulez ! Gontran Eh ! Ça m’intéresse, s’il est aussi bon que celui-ci. On peut le goûter ? Raoul Ma foi… L’ennui c’est que ça me fait entamer une autre bouteille ! Marthe C’est rien, je la finirai… Raoul Bon. Finissez vos verres, je vais en chercher. (il se lève et sort à jardin) Gwladys Vous n’auriez pas un autre verre ? Ça ne serait pas raisonnable que je finisse le blanc si je dois boire du rouge après ! Marthe Attendez, je vais vous aider ! (elle prend le verre de Gwladys, le boit et le repose. Gwladys