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Faut-il toujours dire la vérité ?

Dissertation : Faut-il toujours dire la vérité ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  26 Février 2021  •  Dissertation  •  3 274 Mots (14 Pages)  •  6 924 Vues

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Faut-il toujours dire la vérité ?

Analyse du sujet :

Ici les termes ne sont pas ambigus, il n’est pas nécessaire de s’attarder sur leur polysémie. Il suffit de préciser, au cours de la problématisation du sujet (afin d’éviter de faire une analyse lexicale de chacun des termes, de manière séparée, ce qui rend l’introduction peu fluide et peu agréable à lire), le sens classique de la « vérité » et que le verbe « falloir » renvoie à l’idée d’obligation, de devoir.

Le ressort problématique du sujet réside dans l’adverbe « toujours » qui insiste sur l’universalité des cas auxquels devrait s’appliquer l’obligation de véracité. En effet, le sens commun approuve le fait de dire la vérité, mais trouve difficile, voire mauvais de la dire en certaines situations. Mettre en parallèle la valeur morale de cette attitude générale avec un cas singulier bien choisi où il semble contre-indiqué de dire la vérité permet de mettre en tension le sujet, d’en révéler l’intérêt, le caractère problématique.

Introduction :

Au milieu de la troisième partie du récit, la princesse de Clèves, du roman éponyme de Madame de Lafayette, se trouve comme piégée dans une situation tragique. Confrontée aux soupçons de son mari, elle est pressée de s’exprimer sur son trouble intérieur. Le dilemme est cornélien, ou plutôt racinien ici. La jeune princesse, éduquée très droitement, ne mentira pas à son mari, mais cet aveu, conduira indirectement au chagrin fatal de celui-ci. Comment mentir à l’égard duquel on donne sa vie ? Mais comment dire une vérité pouvant ruiner tout son bonheur ? Mentir aurait empêché probablement cette conséquence tragique, mais au prix de l’unité intérieure de la princesse. Dire la vérité est bon est lui-même. Cette opinion semble bien universellement partagée. Mais les effets d’une telle action ne peuvent que faire réfléchir à ses alternatives.

Problème : Il convient donc de se demander s’il faut que chacun dise la vérité en toutes circonstances car toute action morale n’est morale qu’en tant qu’elle est universalisable, ou bien s’il faut chercher à adapter sa conduite selon les situations, quitte à mentir ?

Plan : Ainsi, nous tâcherons de fonder rationnellement et absolument les devoir de véracité et de sincérité, avant de considérer qu’une conduite s’y conformant est concrètement intenable et qu’une telle impossibilité nous amène à user avec intelligence. Enfin, estimant que le mensonge n’en demeure pas moins toujours un moindre mal, nous esquisserons les lignes d’un devoir de s’exprimer en vérité et de se taire, selon les circonstances, et toujours avec à propos .

I _ Il faut toujours dire la vérité

Si la forme (universelle) d’une action détermine sa moralité, alors il faut agir toujours pareillement, en toutes circonstances.

A/ La moralité d’une maxime consiste en le fait qu’elle soit valable pour toute conscience et que chacun doive la suivre dans tous les cas.

L’homme ne trouve-t-il pas en lui-même, de par sa raison, la loi morale ? Elle est un « fait de la raison » , puisque la loi morale émane de la raison. Or, émanant de la raison, la loi morale est structurée à son image, si l’on peut dire, c’est-à-dire qu’elle est universelle. Elle vaut donc en toutes circonstances. La loi morale universelle est exprimée par l’impératif catégorique, lequel connaît quatre formulations dans les Fondements de la métaphysique des mœurs, dont voici la première : « Agis de telle sorte que tu puisses vouloir que la maxime selon laquelle tu agis puisse être érigée en maxime universelle ». Donc, une action pour être morale, doit embrasser la forme de l’impératif catégorique, c’est-à-dire être applicable dans tous les cas. Ainsi Kant garde-t-il, dans un ouvrage ultérieur traitant précisément de notre sujet, de toute entorse à la maxime « il faut toujours dire la vérité ». Cette maxime a la même forme que celle de l’impératif catégorique, tout en précisant l’objet de l’action concernée : la profession de la vérité. Ainsi, tout mensonge est immoral, car il déroge au respect du à la loi morale universelle, à savoir le devoir. La maxime « dire toujours la vérité », quelqu’en soient les conséquences, est donc bien un « devoir formel » qu’il faut accomplir en toutes circonstances.

Ajoutons de plus que pour être véritablement morale et non hypocrite, l’action découlant de cette maxime doit être accomplie non pas conformément au devoir, mais par devoir. Par cette distinction, Kant signifie que la valeur morale d’une action consiste bien en sa forme, qui est en fait l’intention de respecter la loi morale universelle, et non sa matière (si l’on peut dire), son apparence extérieure. Par exemple, faire un compliment à quelqu’un sur des qualités qu’il possède véritablement, en vue d’obtenir à son tour un compliment, n’est pas moral. Ce qui est alors source de l’action n’est pas le motif qu’est le devoir, mais un mobile, issu de notre nature humaine, de notre sensibilité, qui nous fait désirer être reconnu par autrui.

B/ De plus, si l’on tient la maxime selon laquelle on peut mentir parfois, alors la société n’a plus de fondement pour entretenir une confiance mutuelle entre ses membres.

La nécessité de l’intransigeance d’une telle maxime a donc un sens au-delà de l’échelle individuelle. Certes, elle se fonde subjectivement, en ce que c’est chaque être rationnel qui se donne à lui-même la loi morale universelle, mais elle a aussi une portée collective, sociale, politique. En effet, sans le respect de cette maxime, toute vie collective, toute société politique est impossible. Le mensonge, dit Kant, « rend vaine la source du droit » , c’est-à-dire ce qui doit préciser et expliciter la morale afin d’assurer l’unité de la communauté des personnes .

Et, en effet, si l’obligation de véracité n’était pas, si chacun était libre moralement de dire vrai ou de mentir, alors quelle valeur resterait-il à toute instance judiciaire ? Et même, quelle valeur pourrait-on encore accorder à un contrat, à une promesse ? Ce n’est donc pas seulement l’organisation proprement politique d’une société qui serait littéralement sapée, mais aussi toute vie économique.

C/ Que l’homme s’il n’est pas motivé par la loi morale pour dire la vérité, qu’il agisse du moins par crainte des conséquences de sa transgression

Là n’est peut-être pas le fondement véritablement moral de la profession de la vérité, mais ce mobile n’est peut-être pas seulement inclus dans la vie affective de l’homme... En effet, bien que cela semble fort exotique à nos sociétés occidentales de plus en plus athées, l’une des constantes de l’humanité étudiées par les historiens et les anthropologues est de penser, sous une forme ou une autre, un jugement des morts. Toutes les cultures, ou presque, développent des récits selon lesquels nous serons rétribués en récompenses ou châtiments après notre mort en fonction de la moralité de nos actes . Aussi, s’il est fait justice de chacun de nos actes, tout mensonge, étant reconnu comme mauvais par notre conscience, à moins que celle-ci ne se soit aveuglée elle-même tout en restant responsable, sera puni. Cette fois, dire toujours dire la vérité rejoint clairement mon intérêt individuel. Si la crainte de la justice, immanente ou divine, n’est pas le couronnement de la vertu, peut-être est-elle le commencement de la sagesse.

Transition/ objection : Cependant, si je cache un homme juste, et que des brigands viennent le chercher pour le tuer tout en me demandant où se trouve cet homme, que dois-je faire ? Il semble bien que la conséquence du fait de dire la vérité soit moralement intolérable en ce cas. C’est l’exemple que propose Constant dans sa réponse à la morale kantienne dans son essai « Des réactions politiques ».

Et si ce principe moral absolu ne peut être appliqué en un cas, alors il perd son universalité, c’est-à-dire ce qui en faisait toute la valeur…

II _ Selon les conséquences engendrées par notre parole, il peut parfois convenir de mentir

L’évaluation morale du rapport de notre parole à la vérité s’effectue en fonction de ses conséquences.

A/ Après tout, certains mensonges sont tout à fait minimes et n’ont aucune conséquence négatives ; et d’autres même n’ont que des conséquences positives.

Avec son fameux exemple, Constant fait mouche en nos consciences. Qui serait assez cruel pour dire, en ce cas de figure, la vérité ? Certes, l’acte en lui-même aurait la bonne forme, pourrait-on dire, en ce qu’il conformerait notre action à la loi morale, mais les conséquences en seraient terribles. Il en résulterait le meurtre presque certain d’un innocent. Mais plus encore, si j’ai pu prédire la conséquence de l’acte que je pose, même si je n’en suis pas directement la cause, je n’en suis pas moins en partie responsable et donc coupable. Cette responsabilité variera selon la prévisibilité de l’effet résultant de mon action, certes. Il n’en reste pas moins qu’elle est plus ou moins engagée.

Par ailleurs, certains mensonges sont si

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