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ycée de Pau entre 1941 et 1944, Georges Lapassade, après de nombreuses péripéties, devient instituteur. Puis, il poursuit des études de philosophie, d’abord à Montpellier, puis à Paris où il “ monte ” en 1948. Dans les années 1950, il fréquente le quartier latin et se confronte à tous les Intellectuels parisiens de l’époque. Très tôt, il est confronté à l’écriture. Merleau-Ponty lui propose d’écrire dans les Temps modernes. Mais, il a des doutes sur sa légitimité d’auteur. Agrégé de l'Université, puis docteur ès lettres (1962), il a été maître-assistant de

sociologie à Tunis où il découvre le Strambali qui le questionne sur les phénomènes de transe. Suite à une grève, il est exclu de Tunisie. Il arrive à Tours en 1966. Il vit Mai 68 à Paris. G. Lapassade devient professeur de sciences de l'éducation à l'Université de Paris VIII en 1971. Il y devient alors l’un des personnages clé, dans la mesure où il ne dissocie pas sa recherche de sa pratique pédagogique quotidienne. Il crée de nombreux départements. Il occupe même les fonctions de “ doyen ” de l’UER de Droit ! Il faudrait cinquante pages pour faire la liste de toutes les initiatives qu’il a eu à Paris 8. Nous développerons cet aspect de son travail dans un autre contexte. Lorsqu’il prend sa retraite, en 1992, G. Lapassade quitte son appartement de l’île SaintLouis pour s’installer à Saint-Denis dans une maison, en face de l’université où il a enseigné plus de vingt ans. Il y héberge de nombreux étudiants sans abri, sans papier. Il aide, à la mesure de ses moyens, l’activité universitaire, notamment des étudiants étrangers. Et il continue à préparer de numéros de revue, et à publier de nouveaux livres, à faire des émissions de radio, à voyager, encore que depuis 1999, il doive suivre une dialyse tous les deux jours ! Son nom est associé à de nombreuses recherches tant sur le front philosophique que sociologique, ethnologique ou pédagogique. II). Groupes, organisations, institutions, un manifeste de l’analyse institutionnelle ? On peut dire que c’est lors des colloques de Royaumont, dont les actes sont parus dans Le psychosociologue dans la cité, que G. Lapassade a inventé l’analyse institutionnelle. C’était en 1962. C’est donc cinq ans plus tard qu’il publie Groupes, organisations, institutions. Ce livre installe la prophétie de l’analyse institutionnelle dans le “ mouvement des groupes ” qui se développe alors en France. Le livre oppose à la montée du phénomène bureaucratique une alternative : celle du mouvement des groupes. Si l'homme veut être sujet, acteur conscient de son histoire, il doit analyser les institutions dont il dépend, il peut analyser les institutions qui le traversent, et trouver dans l'action de groupe une issue à l'atomisation bureaucratique dont il est victime. Ce livre est très important dans la mesure où il a eu une postérité assez considérable. Dans le courant de l’analyse institutionnelle, on a longtemps pensé que Groupes, organisations, institutions n’était pas encore un ouvrage d’analyse institutionnelle au sens strict, que c’était un livre “ pré-institutionnaliste ”, et que le premier livre fondateur de ce courant était celui de René Lourau, L’analyse institutionnelle, en 1970. Mais aujourd’hui, mes dernières recherches1 m’obligent à remettre en cause ce point de vue. En effet, je suis persuadé que c’est dans Groupes, organisations, institutions que l’on trouve le véritable point de départ de notre courant, et ce point de départ, c’est la question de la bureaucratie. D’ailleurs, c’est sous ce titre qu’il aurait dû paraître puisque Jacques Ardoino qui avait demandé à G. Lapassade d’écrire cet ouvrage voulait très précisément un livre sur la bureaucratie. En effet, quand J. Ardoino a demandé à Georges Lapassade d’écrire ce livre, l’auteur, qui venait de terminer la publication de sa thèse sur L’entrée dans la vie (Minuit, 1963) était très préoccupé par cette question, et cette préoccupation avait commencé bien avant. G. Lapassade était, en effet en 1959, professeur conseiller à la résidence universitaire d’Antony. Et il s’intéressait de très près au fonctionnement de cette résidence universitaire. Il avait découvert, depuis peu, la dynamique de groupe. Il avait participé à des T-Groups et à des psychodrames, et il voulait transposer ce qu’il savait de la psychosociologie dans une analyse interne de la vie de la cité universitaire. Ainsi, G. Lapassade assistait régulièrement, mais dans la mesure où il y était autorisé, aux réunions de l’association locale des étudiants (AERUA) qui participaient à la cogestion de cette Résidence universitaire. Ces étudiants étaient élus sur la base des pavillons. Mais la vie administrative de la résidence était centralisée. G. Lapassade en avait conclu qu’il y avait une contradiction entre cette centralisation et la décentralisation des élections

1

Voir R. Hess, La mort d’un maître, René Lourau et la fondation de l’analyse institutionnelle (Loris Talmart, Paris, à paraître).

étudiantes. Il fit connaître cette opinion par quelques lettres qu’il adressait au président de cette association, dominée par les étudiants communistes de la RUA. Un jour, ces lettres furent publiées dans leur bulletin sous le titre : “ De quoi vous mêlez-vous Monsieur Lapassade ? ” Cette publication a beaucoup préoccupé G. Lapassade. Un petit groupe d’étudiants animé par un jeune intellectuel, Robert Paris, déjà spécialiste de Gramsci, et qui faisait de l’entrisme en tant que trotskiste dans la cellule communiste locale (les étudiants communistes de la résidence étaient inscrits à la cellule du PCF d’Antony) a aussitôt apporté son soutien à G. Lapassade. C’est à ce moment-là que G. Lapassade découvre qu’il est assez peu politisé. Robert Paris l’était davantage, et il aide G. Lapassade à décrypter cette attaque des étudiants communistes à l’aide de analyses trotskistes de la bureaucratie. Avec Robert Paris et ses amis, G. Lapassade décide de diffuser massivement dans la résidence universitaire un tract qui était une riposte à l’article déjà cité. Ce tract a provoqué une crise interne de l’association, immédiatement suivie d’élections générales. Dans le même temps, G. Lapassade se donne une culture politique. L’un des problèmes politiques essentiels de ce temps-là était celui de la bureaucratie comme classe dirigeante en URSS et dans l’ensemble des pays communistes. L’été suivant, G. Lapassade participe à une décade de Cerisy-la-salle, autour du thème : “ Genèse et structure ”. Un soir, l’animateur de la décade, le Professeur Maurice de Gandillac, demande à G. Lapassade de parler de ses recherches en cours. Il aurait pu parler de l’écriture de sa thèse sur l’entrée dans la vie, mais il raconte ce qui s’était passé quelques mois auparavant à la résidence d’Antony. Le récit de cette soirée a été publié dans les Actes de cette décade. Contrairement aux autres gens présents, et notamment Maurice de Gandillac qui estimait ces recherches “ oiseuses ”, le sociologue Serge Mallet apprécie le récit et l’analyse de ce qui se passait à la résidence universitaire d’Antony. Et il le commente tout au long d’un entretien avec G. Lapassade qui dure toute la nuit. Il soulignait, en particulier, la relation entre ce qu’il avait dit et les thèses du groupe Socialisme ou Barbarie que G. Lapassade ne connaissait pas encore2. On sait aujourd’hui que la question de la bureaucratie était au centre des travaux de ce groupe politique issu du Trotskisme. La bureaucratie y était considérée non plus comme une “ couche ” parasitaire de la société communiste, mais comme une nouvelle classe, et c’est d’ailleurs sur ce point que s’était effectué la coupure avec le trotskisme. À peu près dans le même temps, G. Lapassade participe au 4° congrès mondial de sociologie qui se tenait cette année-là à Stresa (Italie). Il y fait connaissance notamment d’Edgar Morin à qui il parle de sa préoccupation concernant la bureaucratie. Edgar Morin propose à G. Lapassade d’assumer la responsabilité d’un numéro de la revue Arguments consacré cette question. Naturellement, les collaborateurs habituels de cette revue connaissaient parfaitement la question : les uns venaient du Parti Communiste, les autres de la mouvance trotskiste. Le numéro de la revue prenait donc une orientation presque exclusivement politique. Mais, G. Lapassade avait, par ailleurs, une autre approche de la bureaucratie, acquise, non plus dans les débats politiques, mais à partir de la psychosociologie clinique à laquelle il s’initiait en même temps qu’aux problèmes des interventions psychosociologiques dans les organisations sociales. Et là, c’était les courants weberien et post-weberien de la sociologie américaine qui venaient au premier plan. G. Lapassade a donc introduit dans le numéro d’Arguments l’un des textes fondamentaux de Max Weber sur la bureaucratie, ainsi que des textes de sociologues américains comme Merton, Selznick et Gouldner, toujours sur la même question. Le tout a constitué le noyau central de Groupes, organisations, institutions. G. Lapassade y a ajouté quelques textes sur la dynamique de groupe et sur les interventions psychosociologiques, ainsi que sur la pédagogie institutionnelle.

2

G. Lapassade est resté ami avec Serge Mallet jusqu’à la mort de celui-ci en juillet 1973. J’étais avec G. Lapassade au Griffon, près d’Avignon,

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