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Une Bonne Histoire

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beau détective s'abriterait derrière un autobus. Pas d'autobus en vue. L'homme à la Volga tire sur le privé qui s'effondre. Du sang s'étale sur sa poitrine.

La fille hurle.

La fille tourne en hâte la page 157. Elle espère apprendre la survie du détective aux yeux clairs avant l'arrivée du prochain 63.

Le voici. Un 63, direction gare de Lyon. Cette fois encore la fille n'a pas fait signe au machiniste, elle ne voyait que le sang répandu. L'autobus ne s'est pas arrêté. Pour appeler au secours elle a relevé la tête. Derrière le conducteur du bus était assis un jeune homme blond, mince et beau, le regard bleu. Elle a eu tout juste le temps de le reconnaître, elle n'a pas osé crier en courant derrière le bus. Elle n'osait pas non plus se hasarder page 158 de peur d'y trouver un cadavre.

L'homme au revolver avait fui. Du côté du pont de la Tournelle a soudain retenti la sirène d'une voiture de police.

La fille relit une dernière fois page 146 les paroles qu'a prononcées le beau blond, en Europe centrale sur la place au soleil, par une journée radieuse. Dans une violente lumière d'Europe centrale en juillet la fille attend l'arrivée d'un troisième bus 63. Il est midi à la pendule de l'arrêt facultatif, près des grilles du jardin public. Les arbres ont perdu leurs feuilles, le vent glacé les emporte. Il faudrait rentrer chez soi après avoir acheté en descendant du bus, dans un bistrot du quartier, des sandwichs pour le déjeuner. Elle attend, elle n'a pas faim. Elle tient toujours le livre ouvert. Elle ne lira plus de romans noirs. On s'attache aux personnages. S'ils meurent on souffre, c'est bête. Elle commence à écrire dans les marges l'histoire d'un amour heureux.

Annie Saumont, Après, 1996.

Document B – “Cauchemar en jaune”

Il fut tiré du sommeil par la sonnerie du réveil, mais resta couché un bon moment après l'avoir fait taire, à repasser une dernière fois les plans qu'il avait établis pour une escroquerie dans la journée et un assassinat le soir.

Il n'avait négligé aucun détail, c'était une simple récapitulation finale. à vingt heures quarante-six, il serait libre, dans tous les sens du mot. Il avait fixé le moment parce que c'était son quarantième anniversaire et que c'était l'heure exacte où il était né. Sa mère, passionnée d'astrologie, lui avait souvent rappelé la minute précise de sa naissance. Lui-même n'était pas superstitieux, mais cela flattait son sens de l'humour de commencer sa vie à quarante ans, à une minute près.

De toute façon, le temps travaillait contre lui. Homme de loi spécialisé dans les affaires immobilières, il voyait de très grosses sommes passer entre ses mains ; une partie de ces sommes y restait. Un an auparavant, il avait “emprunté” cinq mille dollars, pour les placer dans une affaire sûre, qui allait doubler ou tripler la mise, mais où il en perdit la totalité. Il “emprunta” un nouveau capital, pour diverses spéculations1 et pour rattraper sa perte initiale. Il avait maintenant environ trente mille dollars de retard, le trou ne pouvait guère être dissimulé désormais plus de quelques mois et il n'y avait pas le moindre espoir de le combler en si peu de temps. Il avait donc résolu de réaliser le maximum en argent liquide sans éveiller les soupçons, en vendant diverses propriétés. Dans l'après-midi il disposerait de plus de cent mille dollars, plus qu'il ne lui en fallait jusqu'à la fin de ses jours.

Et jamais il ne serait pris. Son départ, sa destination, sa nouvelle identité, tout était prévu et fignolé2, il n'avait négligé aucun détail. Il y travaillait depuis des mois.

Sa décision de tuer sa femme, il l'avait prise un peu après coup. Le mobile était simple : il la détestait. Mais c'est seulement après avoir pris la résolution de ne jamais aller en prison, de se suicider s'il était pris, que l'idée lui était venue : puisque de toute façon il mourrait s'il était pris, il n'avait rien à perdre en laissant derrière lui une femme morte au lieu d'une femme en vie.

Il avait eu beaucoup de mal à ne pas éclater de rire devant l'opportunité3 du cadeau d'anniversaire qu'elle lui avait fait (la veille, avec vingt-quatre heures d'avance) : une belle valise neuve. Elle l'avait aussi amené à accepter de fêter son anniversaire en allant dîner en ville, à sept heures. Elle ne se doutait pas de ce qu'il avait préparé pour continuer la soirée de fête. Il la ramènerait à la maison avant vingt heures quarante-six et satisferait son goût pour les choses bien faites en se rendant veuf à la minute précise. Il y avait aussi un avantage pratique à la laisser morte : s'il l'abandonnait vivante et endormie, elle comprendrait ce qui s'était passé et alerterait la police en constatant, au matin, qu'il était parti. S'il la laissait morte, le cadavre ne serait pas trouvé avant deux et peut-être trois jours, ce qui lui assurerait une avance bien plus confortable.

à son bureau, tout se passa à merveille ; quand l'heure fut venue d'aller retrouver sa femme, tout était paré4. Mais elle traîna devant les cocktails et traîna encore au restaurant ; il en vint à se demander avec inquiétude s'il arriverait à la ramener à la maison avant vingt heures quarante‑six. C'était ridicule, il le savait bien, mais il avait fini par attacher une grande importance au fait qu'il voulait être libre à ce moment-là et non une minute avant ou une minute après. Il gardait l'œil sur sa montre.

Attendre d'être entrés dans la maison l'aurait mis en retard de trente secondes. Mais sur le porche, dans l'obscurité, il n'y avait aucun danger ; il ne risquait rien, pas plus qu'à l'intérieur de la maison. Il abattit la matraque de toutes ses forces, pendant qu'elle attendait qu'il sorte sa clé pour ouvrir la porte.

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