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Utopie

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ît ainsi chargée d'une qualité empirique : sa connaissance résulte d'une expérience. Ce souci de vraisemblance accrédite le discours, même s'il peut faire l'objet d'un jeu ironique comme dans le texte C, dont l'humour relativise ce principe de réalité. En second lieu, la relation de voyage installe entre la réalité du lecteur et le monde utopique une distance qui contribue à accréditer le discours.

La description entretient cette illusion de réel par la précision liée notamment à l'accumulation des chiffres : « deux mille pas », « soixante milles » (texte A), « sept grands cercles », « quatre points cardinaux » (texte B), « cinq avenues » (texte C), « vingtquatre heures » (texte D)... Cette précision inscrit l'espace utopique dans une géométrie rigoureuse, où domine la figure du cercle : « une ceinture de murailles » entoure la ville d'Amaurote chez T. More ; l'espace urbain de Campanella se définit par son « diamètre »; le voyageur de Cyrano se déplace entre des lunes. Cette circularité porte en elle-même les caractéristiques majeures du monde utopique : le cercle est d'abord l'indice de sa fermeture – de même que l'accès en utopie est périlleux, voire apparenté à une naissance dans le récit voltairien, le monde ainsi atteint est très nettement séparé des autres espaces connus : île (texte A), « colline » (texte B), « lune » (texte C), espace ceint de « montagnes inaccessibles » (texte D). Le monde utopique apparaît comme un espace préservé de toute contamination avec le monde réel, même si sa réalité est établie par contrat avec le lecteur. En outre, le cercle est figure de perfection, et le monde utopique repose sur ce principe. En témoigne l'extrême valorisation qui caractérise la description, par l'intermédiaire des modalisateurs : « merveilleusement » (texte B), « superbement » (texte C), des superlatifs : « les plus beaux chevaux » (texte D), ou l'insistance sur l'immensité (textes B, D) et la beauté. La description d'utopie comporte donc toutes les caractéristiques d'un éloge, qui pourrait démentir le principe de vraisemblance s'il ne reposait sur un contrat avec le lecteur.

En effet, si les procédés de la fiction paraissent entretenir un rapport avec le réel, celui-ci est une convention installée avec le lecteur. Conformément à la relation de voyage, le locuteur interpelle le lecteur : « vous décrire » (texte A), « vous pouvez bien juger » (texte C). Cette interpellation, associée aux excès de l'éloge, installe entre l'auteur et son lecteur une connivence qui sert la véritable intention du discours. Car, si l'utopie est un genre de fiction, celle-ci n'a pas pour but de divertir, mais de solliciter la réflexion. En témoigne la vertu symbolique des précisions apportées, notamment le cercle ; en témoigne également la référence constante aux valeurs qui fondent l'utopie. Les mondes représentés sont essentiellement urbains : cette caractéristique fait ressortir la dimension politique de l'utopie. Ainsi, l'excellence de cette organisation, manifestée par l'équilibre géométrique, se ressent dans le comportement des citoyens, qui véhicule des idées nouvelles : « le principe de la possession commune » (texte A), l'élévation constante du citoyen par et grâce à l'urbanisme (texte A), l'indifférence des habitants d'Eldorado à l'or et aux pierres précieuses (texte D). L'harmonie, également figurée par le cercle, est en outre entretenue par des principes éthiques d'émulation (texte A) et d'égalité (texte B). À ces deux systèmes de valeurs s'ajoute un plan métaphysique : dans les quatre documents, les mondes représentés se définissent par une relation privilégiée à la Nature, dont la présence est providentielle – le fleuve « apporte à la ville une eau douce et potable » (texte A), l'arbre de vie, par son « jus énergique », rappelle à la vie le voyageur éprouvé (texte C). L'Homme occupe le centre de ce paysage naturel et providentiel, d'où la présence de Dieu semble exclue : l'utopie rend à l'homme la responsabilité intégrale de son univers.

Au lecteur donc de dépasser la nature divertissante du texte utopique pour apercevoir sa dimension symbolique. Car tout fait sens dans l'utopie : la précision des paysages décrits est elle-même l'indice de la rigueur économe avec laquelle l'auteur installe le monde inventé. L'étymologie même du terme rappelle son caractère irréaliste puisque c'est le monde de « nulle part »; et cependant, le contrat installé avec le lecteur lui propose de considérer une part de réalité dans cet univers : car l'utopie n'est pas un rêve, elle est une proposition. Le discours demande au lecteur de s'affranchir de ses codes habituels pour renverser son regard sur le réel ; ainsi, Candide se trompe lorsqu'il interprète ses observations (texte D). L'auteur de l'utopie

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