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es aspects de la littérature maghrébine de langue française

La littérature maghrébine de langue française est un phénomène assez récent, elle

constitue, elle aussi, un nouvel espace littéraire, qui vient se greffer sur une tradition

Ce texte est une version légèrement adaptée d’un exposé fait aux VIIIes

« Journées de la francophonie »

de l’Université de Iasi (Roumanie), du 20 au 23 mars 2002. Je remercie les éditeurs des actes dem’avoir donné l’autorisation de les publier dans Romaniac. Nous traduisons de l’anglais.

millénaire de littérature arabo-persane. Elle recouvre trois périodes, qui sont évidemment perméables, ne fût-ce que parce que les auteurs les plus âgés les ont vécues toutes

les trois.

On pourrait distinguer en effet trois grandes générations : celle des pionniers (les années trente), la génération des « aînés », les « grands frères (et sœurs) », et puis, la nouvelle génération : les premiers ont commencé à écrire sous la colonisation, les seconds

ont connu la déchirure des luttes d’indépendance, les derniers vivent les indépendances

et l’époque post-coloniale, connaissent la France, et y séjournent parfois. Les derniersnés, ceux qu’on dit « nés en France », les beurs et les beurettes, pourraient constituer la

quatrième génération, mais, font-ils encore partie de la littérature « maghrébine » ?

La richesse actuelle de la littérature maghrébine de langue française est dans une certaine mesure tributaire de la politique coloniale qui a été menée. Ainsi, elle est très riche

en Algérie, colonie de peuplement, où la francisation de l’enseignement a été la plus

poussée : « La littérature algérienne est aujourd’hui encore la plus abondante des productions littéraires francophones du Maghreb. » (Joubert, 1994 : 8). Comme l’enseignement en arabe ne fut pas vraiment démantelé au Maroc et en Tunisie, (ces deux pays

étaient des protectorats), la littérature francophone y naît un peu plus tard, à côté d’une

très riche littérature en arabe : la littérature d’expression française au Maroc est née aux

alentours des années cinquante, pour connaître son apogée avec la revue Souffles (création en 1966), celle de la Tunisie a pris son envol après l’indépendance.

Les textes maghrébins sont surtout écrits dans un contexte national, par des auteurs qui

affirment leur identité algérienne, marocaine, ou tunisienne, ce qui constitue une première différence par rapport à la littérature beur, mais aussi une ressemblance : il s’agit

d’une littérature-témoignage. Certains romans continuent la tradition thématique du

« roman colonial », dans une tentative de plaire au colonisateur, ou de l’intéresser à la

problématique du colonisé. D’autres relatent la période des « événements » en Algérie,

des luttes pour l’indépendance en Tunisie, au Maroc. En cette période surtout, certains

auteurs ne savent pas trop quelle attitude adopter envers la langue française. Si certains

l’utilisent pour revendiquer l’indépendance, d’autres se voient contraints à l’exil (Malek

Haddad), ou choisissent le silence. Leurs textes répondent à l’urgence de la situation

historique : il n’y a guère de texte algérien (tunisien, marocain, dans une moindre mesure) qui ne fasse allusion à ce qui est en train de se passer. Le malaise par rapport à la

langue française se traduit dans les citations suivantes :

Assia Djebar : « Le français est ma langue marâtre » (L’amour, la fantasia, 1985).

Malek Haddad : « Je t’aime. En arabe, c’est un verbe qui dépasse l’idée. » (Je t’offirai

une Gazelle, 1959 : 97). Mais aussi : « Il dit “Ah ! Bon ?” quand il n’y a rien à dire. Il

admire les Français parce qu’ils savent parler. La langue est peut-être française. »

(id. p. 54). Citons encore : « Je suis moins séparé de ma patrie par la Méditerranée

que par la langue française » (cité par Memmi, 1985 : 159). Pour Haddad, la langue

française symbolise clairement l’exil…

Abdelkebir Khatibi : « Et j’aurai jalousement retenu mon être sacrifié à la langue

française. Sacrifié, mais pas dans le sens qui avait prévalu vers les années soixante.

On soutenait avec légèreté que l’écrivain colonisé de langue française, en retournant sa rage contre le colonisateur, aurait pulvérisé – ou du moins défiguré – les

lois de cette belle langue que j’aime. » (La mémoire tatouée, 1971 : 11).

L’éloge de la langue maternelle est un passage obligé, de même qu’une justification duchoix du français.

La troisième vague, c’est l’après-colonisation. On avait prédit que la littérature en fran-

çais allait s’éteindre lentement : le contraire s’est passé ! Les thèmes des livres restent

souvent très près des réalités post-coloniales : de jeunes – et moins jeunes – écrivains

révoltés expriment leur déception par rapport à l’évolution de leur pays, la crise économique, l’absence de démocratie, le caractère étouffant d’un islam sclérosé et archaïque.

Beaucoup d’auteurs, en désaccord avec les régimes, choisissent l’exil : Mourad Bourboune (Algérie) après la prise de pouvoir de Boumedienne ; Tahar Ben Jelloun (Maroc)

vit à Paris, Rachid Boudjedra a fait un va-et-vient entre Paris et Alger, avant de se fixer

à Alger, tout en en connaissant les risques. Les nouvelles voix portent souvent un

regard lucide, désabusé sur la société actuelle ; ainsi Fériel Assima dans Une femme à

Alger (Arléa, 1996), mais surtout S. Garmadi (Tunisie), qui écrit :

« Il est formellement interdit de créer des chefs-d’œuvre et absolument obligatoire

d’adorer les chefs d’État. (Jeune dicton en voie de développement) ». Dans Nos

ancêtres les bédouins.

Parfois, il y a des témoignages sur l’émigration en Europe, thème qui n’est pas vraiment

neuf (cf. Mouloud Feraoun, Le fils du pauvre). La différence avec les émigrés décrits par

les aînés, qui se sentaient avant tout Maghrébins, c’est que les jeunes décrivent des émigrés qui ne savent plus très bien où ils en sont. Ils deviennent des A.N.I. (Arabes Non

Identifiés). Ceux qui sont « nés en France », les beurs (cf. infra), franchiront l’étape suivante : nés de cette immigration, sont-ils des francarabes ?

Un autre thème, que l’on retrouve dans la littérature beur, est la révolte contre le père

(Driss Chraïbi (Maroc), Le passé simple).

Les thèmes évoqués donnent déjà une réponse implicite à la question que nous avons

posée : née dans un autre contexte, la littérature beur sera différente, mais tributaire de

ses ancêtres et de ses contemporains maghrébins.

3. L’espace littéraire « beur »

Un peu comme aux débuts de la littérature maghrébine en langue française, priorité est

donnée au témoignage : les beurs veulent que l’on sache comment ils vivent, comment

ils se sentent mal aimés, parfois, de la société française. Ces premiers romans n’échappent pas toujours à une tendance de « misérabilisme » ; les plus grands, cependant, réussissent à s’en distancier par une solide dose d’humour. Ainsi, Le gone du chaâba (Azouz

Begag) montre-t-il la vie dans un des bidonvilles de Marseille. Ce type de romans, que

Pinçonnat (2000) qualifie d’«

...

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