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Jules Valles L'Enfant

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drames de la Commune Venu à Paris pour se consacrer aux lettres, l'adolescent hanta le pavé, mangea le pain amer de l'infortune citadine, côtoya les irréguliers de la grande ville. À peine arrivé au quartier Latin, il fit de la politique et des vers... Et c'est dans l'ordre : il serait fâcheux qu'un provincial fraîchement débarqué sur le pavé parisien ne sacrifiât point à ces deux passions de la jeunesse intellectuelle. Il est vrai que le Deux Décembre déflora bientôt les illusions de ce révolutionnaire mélancolique. Combien de vers produisit-il? Dix mille ou presque, dont il ne reste que de banales épaves. Mais il comprit lui-même la vanité de ses projets, et démissionna, jeune encore, de la carrière poétique. Ayant échoué dans le genre poétique, Vallès risqua sa chance dans le théâtre. Mais, dans ce genre encore, son insuccès fut complet : soit qu'il ne parvînt pas à nouer une intrigue, soit qu'il versât trop souvent dans l'extravagance ou dans le paradoxe, soit, enfin, qu'il ne réussit jamais à sortir tout à fait de lui-même, à insuffler la vie à des personnages vraiment autonomes. C'est comme chroniqueur que Vallès connut ses premiers succès. La chronique, avec son cadre, sa technique, son objet, répondait mieux, en effet, à son tempérament, elle lui laissait plus de liberté dans le choix des sujets ; elle s'accommodait fort bien du pittoresque, de l'ironie et de la confidence ; elle permettait à son audace révolutionnaire plus de licence, du fait même qu'elle passait pour anodine aux yeux des censeurs. Dès 1857, au “Présent”, la signature de Max apparaissait fièrement à côté de celles de Baudelaire et de Leconte de Lisle ; mais c'est au “Figaro” que s'épanouit, de 1858 à 1868, son talent. Il collabora aussi à “L’événement” où écrivait aussi Émile Zola. Mais il se lassa bien vite de son métier d’«amuseur du boulevard». Mais, déjà, encouragé par ses triomphes, Vallès ne voulait plus se contenter du rôle de chroniqueur. Il rêvait d'un organe de combat bien à lui, rien qu'à lui, où il pourrait attaquer à sa guise (jusqu'à la prison, inclusivement), les ridicules ou les injustices de son temps. il lança avec brio l'une des feuilles les plus curieuses du Second Empire : “La rue” (1867), la formule de l'hebdomadaire d'avant-garde, essentiellement littéraire l'habile pamphlétaire s'entoura d'une équipe ardente de collaborateurs. Cette maîtrise dans le journalisme et dans la chronique, Vallès eût voulu l'égaler dans les œuvres d'imagination. Il s'eflorça d'y atteindre, mais ce fut en vain ; et il semble bien que cette impuissance à briller dans le genre romanesque ait été la douleur secrète de sa vie. Mais eût-t-il réussi à «machiner» ses petits romans, qu'il se fût aussitôt heurté à un autre obstacle : la femme. C'est ce que nous fait observer Léon Séché : «Cet homme terrible, qui tombait si facilement en puissance de femme, était incapable de faire parler la femme, dans ses livres». Vallès ne pouvait qu'échouer dans le romanesque, car il ne savait conter que ses souvenirs et que traduire ses propres sensations. Il déclara : «Je voudrais, moi aussi, bâtir ma “Comédie humaine”». Ce furent “Histoire de vingt ans” (1848-1868), puis, quelques années plus tard, “Histoire de la génération 1848-1871”. Mais ce beau

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rêve s'évanouit, du fait des hésitations de l'éditeur et surtout du fait que l'auteur ne parvenait pas à tisser la trame de son grand roman social. Il dut s’astreindre à différents métiers, l’ordre social du Second Empire condamnant ce journaliste d’opposition à vivoter. Polémiste sans concession, il mettait de la politique partout, la politique n'étant cependant, à ses yeux, jamais l'excuse de la médiocrité : il voulut ouvrir l'horizon à toute force, il préféra parfois une droite farouche aux tièdes de la république. Pamphlétaire soucieux de formules hautes en couleurs, féroces mais d'une étonnante justesse d'oreille, il déclara, par exemple, son hostilité d'avant 1871 envers Hugo : «Je souffre à voir finir dans les sabots de Polichinelle celui qui avait chaussé les souliers du Dante» ; il attaqua Baudelaire, en 1867 : «Il n'avait pas la santé d'un débauché et avait dans son enfer une petite porte masquée par où l'on pouvait remonter au ciel» ; il se moqua de Thiers : «Soixante-douze hivers et quatre pieds dix pouces». Il réunit ses différents articles dans “Les réfractaires” (1865) et “La rue” (1866) où il montra un enthousiasme sincère pour les prolétaires. Il donna plusieurs récits d’inspiration autobiographique, notamment "Jean Delbenne" (paru en feuilleton dans “L’époque” en 1865) et "Testament d’un blagueur" (paru en feuilleton dans “La parodie” en 1869). La Commune dont il fut un des membres, siégeant à l’Hôtel de Ville, montrant alors un souci de justice et de modération, jouant sa partie dans le premier gouvernement populaire qui tenta d’exister dans l’Histoire, et qu’il défendit dans son journal, “Le cri du peuple”, qu’il appela «la grande fédération des douleurs», lui donna enfin le sentiment de connaître liberté et spontanéité. Durant la Semaine Sanglante, il fit preuve d’un héroïsme tranquille sur les barricades. Condamné à mort à la fin de l’insurrection, il se réfugia à Londres où, habitant un grenier, donnant quelques leçons, lisant dans les salles du “British Museum”, il connut la misère. Mais où il devint aussi un romancier, les drames de la Commune l'ayant obligé à faire un retour sur lui-même. Les souffrances de l'exil aidant, il put évoquer dans son amère solitude, avec une intensité et une émotion accrues, ses impressions des premières années, ses humiliations de la famille et du collège, tournant ainsi l'obstacle redoutable pour lui de l'intrigue. Il rédigea en quatre mois unn manuscrit dont son ami Hector Malot se chargea auprès des éditeurs, car il ne pouvait en effet publier sous son nom à Paris : ____________________________________________________________

_____________________ “L’enfant” (1879) Roman Jacques, le narrateur, a au début du récit, cinq ans. Le chapitre 1, intitulé "Ma mère", fait le portrait d’une paysanne aux conceptions archaïques, bornée, sournoise, oppressive et injuste, qui ne cesse de le fouetter : «Ma mère dit qu’il ne faut pas gâter les enfants et elle me fouette tous les matins ; quand elle n’a pas le temps le matin, c’est pour midi et rarement plus tard que quatre heures». Son père, petit instituteur de campagne, est moins arriéré, mais il fait également preuve d'une violence issue d'un sentiment de frustration sociale. Sous prétexte de l’aguerrir, on s’ingénie à lui rendre la vie rude, on le crétinise à longueur de journées, on finit par lui reprocher le pain qu’il mange. Quoi qu’il fasse, le pauvre garçon, qui est triste et seul, ne parvient jamais à gagner l’affection de ses parents. Heureusement, «la Famille» comporte un certain nombre d'oncles et de tantes, qui sont plus sympathiques, des cousines aussi, qu’il regarde énamouré (chapitre 2). C’est dans cette atmosphère viciée qu’il fait ses études, car, après l'oppression maternelle, il connaît une autre oppression dans un collège où on mange mal, où on est surveillé et puni et où il subit l’absurdité et la cruauté de l’éducation. Les professeurs sont d'affreux pédants. L'un d'eux, un philosophe ridicule, prétend même lui apporter les preuves de l'existence de Dieu (chapitre 3). Bien qu’il soit assez doué, il prend vite en aversion les «humanités». Il est écœuré par le latin et le grec, matières dont il ne perçoit pas la finalité, qui lui paraissent aussi barbares l’une que l’autre, qu’il «avale comme de la boue». Qu’il s’agisse de Thémistocle, de Scipion ou d’Amilcar, il se sent incapable de leur prêter sa voix pour haranguer des soldats qu’il n’a jamais vus. Aussi brûle-t-il du

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désir de déserter cette maison maudite. Il évoque aussi les rues et les magasins de «la petite ville», ainsi que «la toilette» ridicule dont sa mère l’affuble (chapitres 4 et 5). Heureusement, les vacances apportent une détente, car il y retrouve un semblant de liberté, un univers naturel, plein de sauvagerie (chapitre 6). Mais il faut rentrer et «les joies du foyer» ne lui proposent que des plaisirs peu chers ou gâchés (chapitre 7), même si un cirque égaie la grisaille du quotidien (chapitre 8, “Le fer-à-cheval"). Son père est nommé à Saint-Étienne, occasion d’une scène entre le mari et sa femme, et toute la famille déménage avec lui (chapitre 9). Or ce père dont il est le martyr, il n’hésite pas à le défendre quand il voit insulté par un tiers, fût-ce le plus justement du monde. Il se bat en duel, un duel à l’épée qui ne tourne pas à son avantage. Perdant son sang, il retourne au logis et passe la chose sous silence. Il y a heureusement de «braves gens», un cordonnier et un épicière grâce auxquels on peut parfois jouer (chapitre 10). Mais «le lycée» est pénible : Jacques y apprend la sournoiserie et l’ennui, malgré la lecture de “Robinson Crusoé” (chapitre 11). «Frottage», «gourmandise», «propreté» sont d’autres «joies» de la famille : les repas sont toujours pénibles car il faut manger ce que l’on n’aime

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