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Bill Viola - The Passing (1991)

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le flottement dans l’eau d’un corps enveloppé d’un drap. Dans l’histoire de l’art le drap blanc a non seulement eu fonction de composition (ex : mettre le corps en valeur, introduire la lumière) mais aussi de symbole, c’est ce que l’on peut retrouver chez la Danaé de Tintoret en 1570. Chez Bill Viola, cette succession d’image crée le lien entre la naissance et la mort et le drap fait ainsi symboliquement office de linceul. Outre cela, les nombreux plans où l’on distingue un corps nu immergé (peut être celui de Bill Viola) et flottant dans l’eau sont aussi une référence au maniérisme dans le processus de travail de la déformation, de la torsion des corps mais aussi dans la recherche du mouvement. En effet, lorsque que l’on perçoit un extrait de la naissance de son fils filmée d’abord grâce à un gros plan sur le visage du nouveau né encore recouvert de placenta, l’auteur choisi d’y coller juste après la scène d’un corps immergé dans une eau trouble recouverte de particules. Il est ainsi, difficile de déterminer si l’on se trouve avec le fœtus dans le ventre de la mère. Mais, au fur et à mesure des morceaux d’un corps d’homme baignés de lumière apparaissent et voguent dans cette eau trouble. Ce moment de doute autour d’un corps adulte ou d’un fœtus est amplifié par les plans que Bill Viola donne à la scène (plans rapprochés des orteils, des mains, du dos…).

On peut apercevoir, en plus de cela, plusieurs allusions aux scènes de la vie quotidienne des frères Le Nain. Les frères Le Nain ont aussi traité la peinture religieuse et mythologique mais c’est surtout les scènes de familles qui englobent la majorité de leurs œuvres (familles singulières, ni riches, ni pauvres). Ce sont les pionniers de ce genre de scène avant le XIXème siècle et les tableaux de Jean François Millet. Il règne dans leurs tableaux une atmosphère poétique étrange, avec des personnages paisibles, au regard humble. Les enfants sont très présents et sont accompagnés d’une nourrice protectrice. Les familles représentées sont très souvent le témoignage des différents âges de la vie. Le Concert, de Mathieu Le Nain, donne à voir une scène conviviale où un homme, une femme, un enfant et un vieillard se prêtent à un exercice musical. Dans The Passing, on retrouve aussi des scènes familiales avec les parents et le fils de Bill Viola, notamment lors du baptême de ce dernier. Durant cette scène paisible, on peut voir la mère de Bill Viola allumer un cierge pour son petit fils, et prendre alors les traits des nourrices bienveillantes des frères Le Nain. Les frères Le Nain, comme le maniérisme ou la technique de Seurat sont des références utilisées par Bill Viola comme matières de son film mais aussi comme processus pour amener sa thématique du passage entre la vie et la mort. Si les références sont nombreuses et appuyées, Bill Viola ne néglige pas le pouvoir des images et du son qui vont façonner son film et faire découler de cette notion de passage d’autres questionnements.

Que ce soit à travers ses films ou ses installations le thème du passage entre la vie et la mort est récurrent chez Bill Viola dès 1986. Beaucoup de ses travaux sont perçus par le spectateur comme une expérience vécue, c’est le cas notamment avec son installation Heaven and Earth qui est une mise de face à face entre le sol et le plafond de deux images vidéos : l’une donnant à voir le visage de son fils qui vient de naitre et l’autre celui de sa mère qui rend son dernier souffle. Ici, le spectateur est obligé de se contorsionner pour voir ces deux visages. Mais le thème du passage que Bill Viola étudie ne se limite pas simplement à celui entre la vie et la mort. En effet, d’autres œuvres évoquent le passage du monde réel au monde intérieur (les corps endormis de The Sleepers, 1992), des pensées et du rêve (The Stopping Mind, 1991), ou encore de l'image et du temps (Passage, 1987).

Dans The Passing, l’image récurrente du corps dans l’eau évoque la vie (parfois presque image d’un fœtus) mais aussi la mort. Les prises de vues et changement de scènes se font brutalement, pourtant l’atmosphère se veut impalpable et zen. L’ensemble de cette vidéo semble faire défiler sous nos yeux une partie d’une vie très personnelle, par ailleurs nous retrouvons beaucoup d’éléments de la vie quotidienne commune à n’importe quelle autre famille. Le choix du noir et blanc, pour Bill Viola, est nécessaire pour que ce film ne soit pas entièrement perçu comme personnel mais qu’il puisse au contraire permettre aux spectateurs de s’y refléter. Le film est scandé par le son oppressant de la respiration difficile de sa mère ou de sa propre respiration et par les prises de vue de Bill Viola, lui-même, se réveillant effrayé. Le film prend alors une dimension de rêve ou les songes se succéderaient entre noir (« la couleur de l’intérieur de notre tête ») et lumière. L’image de ses parents âgés est souvent collée à celle de son fils et à la neuvième minute Bill Viola choisit la prise de vue d’un tunnel urbain sombre dans sa symbolique du passage pour ouvrir et fermer l’assemblage de ces deux âges de la vie. Il introduira ainsi une succession de paysages urbains (traités en négatif) ou naturels déserts aux habitations détruites et abandonnées, seules vestiges d’une présence humaine passée. Des paysages qui semblent à la charnière entre le monde réel et le monde métaphysique, et que seuls les phares des voitures viennent perturber. Le déclin inexorable de sa mère suffocant et l’apparition de paysages fantomatiques appartenant au

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