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Hugo Chavez et l'énergie vénézuelienne : le pétrole, une arme politique et géopolitique à double tranchant

Dissertation : Hugo Chavez et l'énergie vénézuelienne : le pétrole, une arme politique et géopolitique à double tranchant. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  15 Novembre 2017  •  Dissertation  •  6 210 Mots (25 Pages)  •  942 Vues

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Hugo chavez et l’energie venezuelienne : le petrole, une arme politique et geopolitique a double tranchant

par jamerman | etudier.com


HUGO CHAVEZ ET L’ENERGIE VENEZUELIENNE : LE PETROLE, UNE ARME politique et GEOPOLITIQUE a double tranchant

Un dicton populaire vénézuélien dit qu’il n’y a pas au Venezuela « de bons ou de mauvais politiques, mais seulement un prix élevé ou bas du pétrole ». De fait, le pays vit principalement de la rente énergétique : le secteur pétrolier représente 30% de son PIB et 80% de ses exportations. Bien que cela lui apporte une vulnérabilité importante face aux variations des cours de l’or noir, cela lui fournit surtout une puissance financière et diplomatique qu’il ne se prive pas d’utiliser. Ainsi, Hugo Chavez, chef d’État vénézuélien depuis son élection en 1998, a largement eu recours à la manne pétrolière, qui a augmenté en même temps que le prix du baril, pour développer la visibilité et l’influence internationale de son pays et mettre en place sa politique « bolivarienne » et anti-américaine. Le Venezuela a donc su profiter de cette situation pour développer une forme de « pétro-diplomatie » qui lui confère un poids international supérieur à celui auquel il pourrait prétendre au vu de sa puissance économique, démographique ou militaire. En quoi le pétrole représente-t-il une arme à double tranchant pour le Venezuela ? Comment Chavez utilise-t-il cette arme pour promouvoir sa vision politique de « révolution bolivarienne » sur la scène intérieure vénézuélienne et sur la scène internationale ? Nous verrons qu’il a profité de cette puissance pétrolière au niveau national grâce à une conjoncture favorable et qu’il engage unereprise en main du secteur énergétique vénézuélien afin de renforcer son contrôle sur cette manne qui lui permet de consolider la « République bolivarienne du Venezuela ». Au niveau international, nous étudierons son utilisation de la pétro-diplomatie pour développer sa vision d’un monde multipolaire grâce à l’établissement de partenariats bilatéraux Sud-Sud, en particulier sur le continent Sud-américain où il tente de se poser en leader, ainsi qu’à l’opposition aux intérêts des États-Unis d’Amérique.

Hugo Chavez remporte les élections vénézuéliennes du 6 décembre 1998 et accède à la présidence de la république du Venezuela avec la plus large victoire jamais connue par la démocratie vénézuélienne d’alors. De plus, le parti politique qu’il a fondé, le MVR, Movimiento Quinta República (Mouvement Cinquième République), est également en tête lors des élections législatives qui ont lieu en même temps que la présidentielle, mais la majorité à l’Assemblée est composée de nombreux petits partis de gauche qui se sont alliés avec le MVR ce qui rend les prises de décision difficiles. A cette époque, Hugo Chavez n’est pas un inconnu dans la vie politique vénézuélienne. De fait, l’ancien lieutenant-colonel de l’armée vénézuélienne a tenté un coup d’État en 1992 contre le président Carlos Andrés Pérez avec l’aide du MBR 200, Movimiento Bolivariano Revolucionario 200 (Mouvement révolutionnaire bolivarien 200), qu’il a fondé au sein de l’armée en 1983, lors de la commémoration du 200ème anniversaire de la naissance de Simon Bolivar, el Libertador, leader de lalibération du Venezuela et d’autres colonies espagnoles d’Amérique Latine. Le coup d’État échoue et envoie Chavez en prison pendant deux ans (il sera libéré en 1994 sur ordre du nouveau président Rafael Caldera qui en avait fait une de ses promesses de campagne). Néanmoins, cette tentative de prise du pouvoir par la force ne nuit pas à la popularité de Chavez car elle a lieu dans un contexte de forte défiance du peuple vénézuélien vis-à-vis de la classe dirigeante. En effet, la fin des années 1980 est une période de difficulté économique pour le pays qui se voit dans l’impossibilité de payer sa dette externe qui atteint 25 milliards de dollars. Le pays doit alors mettre en place un programme d’austérité qui provoque une réaction populaire brutale qui se caractérise par de grandes manifestations à Caracas réprimées par l’armée et par une abstention massive lors des élections suivantes. De plus, Carlos Andrés Pérez, le président qu’a tenté de renverser Chavez, est démis de ses fonctions par le Sénat en 1993 qui le fait juger pour détournement et abus de biens publics. Ainsi, Chavez arrive en 1998 dans un contexte de difficulté économique pour le Venezuela et de fort désamour entre les couches populaires et pauvres du pays et les classes dirigeantes. Le contexte est donc très favorable à un leader qui se veut le défenseur du peuple face aux riches : le slogan de campagne d’Hugo Cavez le proclame « fléau de l'oligarchie et héros des pauvres ». Il suffit de jeter un coup d’œil au graphique qui montre l’évolution des prix du pétrole (voir document 1 en annexe) pourcomprendre l’explication principale des difficultés vénézuéliennes : on constate alors une forte chute du prix du pétrole en 1985. Il passe de 70 à moins de 30 dollars le baril (en dollar constant 2005). En effet, il n’est pas difficile d’imaginer qu’après cinq ans de vie faste grâce à un prix du baril très élevé dans le contexte du second choc pétrolier, le retour à la réalité est cruel. Ainsi, l’économie vénézuélienne, très dépendante du pétrole, subit de plein fouet cette chute des prix et ceci est d’autant plus problématique que l’État n’a pas su profiter de la hausse des prix pour économiser. D’où une dette qui explose et l’obligation d’imposer un terrible plan d’austérité à une population qui a beaucoup moins profité de la hausse dans un pays qui souffre de grandes inégalités et de la corruption. En résumé, le Venezuela est frappé par le phénomène de la « maladie hollandaise ». Le contexte est donc favorable à une arrivée de Chavez au pouvoir. Mais il est aussi propice à sa popularité et à son maintien au pouvoir. En effet, le prix du pétrole repart à la hausse au début des années 2000, notamment après le 11 septembre 2001 qui provoque une légère baisse puis une remontée bien plus importante des cours du baril en 2002. Ainsi, Hugo Chavez profite de ce contexte de pétrole cher pour asseoir sa main mise sur le pays. Pour cela, il change d’abord la constitution du pays : il fait élire une nouvelle assemblée constituante afin de rédiger le nouveau texte constitutionnel qui sera approuvé par référendum le 19 décembre 1999 par plus de 70% des votants.Les grandes modifications sont : le passage au monocaméralisme avec l’abolition du Sénat, la possibilité pour le président de faire deux mandats consécutifs (il fallait attendre 10 ans auparavant pour pouvoir se représenter), l’allongement de la durée du mandat présidentiel de 5 à 6 ans et la création du « référendum révocatoire » qui permet au peuple de démettre de ses fonctions n’importe quel membre de l’État y compris le président de la République. Le pays change également de nom et devient la République bolivarienne du Venezuela. Des élections générales sont alors organisées en 2000 pour répartir les pouvoirs au sein de cette nouvelle démocratie : Hugo Chavez et le MVR l’emporte. Mais le pouvoir connait un période difficile avec la chute des prix du pétrole suite aux attentats du 11 septembre 2001. Les difficultés économiques sont alors renforcées par les troubles politiques menés par l’opposition qui se bat contre les nouvelles mesures prises par Chavez qu’elle juge contraire au droit à la propriété privée : réforme agraire, reprise en main du secteur pétrolier,… Ces troubles culminent avec la tentative de coup d’État qui a lieu à l’encontre du président Chavez. Celui-ci est emprisonné par des militaires qui lui avaient ordonné de démissionner. Le nouveau gouvernement autoproclamé ne restera au pouvoir qu’une journée car il ne parvient pas à faire face aux protestations gigantesques des partisans de Chavez qui ont lieu le lendemain à Caracas avec l’aide de la garde présidentielle qui est restée fidèle à Chavez. Le président Chavez l’emporte danscette épreuve, d’autant plus que 2002 voit la reprise fortement à la hausse des cours du pétrole. Depuis les cours du pétrole restent élevés exception faite de l’année 2009, année de crise économique mondiale, et le monde semble être entré depuis le début des années 2000 dans une phase de pétrole durablement cher notamment du fait de la demande croissante des pays en développement tels que la Chine ou l’Inde. Le leader vénézuélien se retrouve donc dans un environnement pétrolier international propice puisque l’État se retrouve maître d’une véritable manne et ce d’autant plus que Chavez amorce la reprise en main de l’énergie du pays.

Ainsi, peu de temps après son élection, il renationalise la production pétrolière : les contrats accordés aux entreprises pétrolières occidentales pendant les années 1990, décennie de libéralisation, sont alors déclarés illégaux au vu de la nouvelle réglementation sur les hydrocarbures de 2001 et sont renégociés à l’avantage de PDVSA (Petróleos De Venezuela SA), la société publique du pétrole vénézuélien. La présence des entreprises privées n’est plus autorisée que dans le cas de sociétés mixtes ou de joint-ventures dans lesquels PDVSA doit obligatoirement être propriétaire à 60% du capital. Hugo Chavez justifie cette renationalisation au nom d’un juste rééquilibrage après des années de « pillage » par les sociétés occidentales. Ces dernières y voient une attaque contre leurs intérêts et une injuste remise en cause des contrats signés au cours des années 90, mais, devant l’importance du marché vénézuélien, elles acceptentpresque toutes la nouvelle donne sans protester et elles n’ont d’ailleurs pas vraiment le choix car Chavez indique que « ceux qui n’acceptent pas cet accord peuvent aller ailleurs ». C’est par exemple ce que décide Total qui se voit immédiatement confisquer ses champs pétroliers de Jusepín et ce sans aucune forme de dédommagement. Néanmoins, le but de Chavez n’est clairement pas de chasser les entreprises du sol vénézuélien car il a besoin d’elles notamment pour l’apport technologique que le pays nécessite pour pouvoir exploiter les gisements de sable bitumeux de la ceinture de l’Orénoque au Sud-ouest du pays. De même, les entreprises n’ont pas intérêt à partir car le Venezuela dispose de réserves gigantesques (voir Document 2 en annexe) et car comme le rappelle un diplomate étranger basé à Caracas : « Comparé aux autres grands pays pétroliers comme l’Irak, l’Iran, l’Arabie saoudite ou la Russie, le Venezuela est accessible et relativement stable ». De plus, Chavez décide d’augmenter la fiscalité : l’impôt sur les bénéfices passe de 34 à 50%. Ceci a pour but de redistribuer vers l’État une partie des bénéfices très importants engendrés par les entreprises pétrolières mais également de punir des entreprises qui ont largement recours à l’évasion fiscale. Ainsi, cette hausse des impôts s’accompagne de fortes amendes pour certaines compagnies comme Shell ou Petrobras. Enfin, Hugo Chavez renforce le contrôle de l’État sur PDVSA. En effet, le leader vénézuélien décide de reprendre en main une entreprise dont la part des recettes perçues sur les exportations etversées au gouvernement n’a cessé de diminuer, passant de 70,6% en 1981 à 38,6% en 2000 et qui forme une sorte d’État dans l’État. Pour cela, il licencie ente 2002 et 2003 grande partie des dirigeants et nomme des proches qui conformément à la vision bolivarienne se soucient plus de redistribution sociale que de stratégie d’entreprise et de profitabilité. Cette nouvelle politique provoque alors une vive réaction : elle déclenche une grève de 64 jours qui tournera à l’avantage du gouvernement au prix d’une perte économique considérable. En 2004, une nouvelle étape est franchie : Rafael Raminez Carreno, un cousin d’Hugo Chavez, cumule les mandats de ministre de l'énergie et du pétrole et de président de la PDVSA, ce qui illustre bien le retour de l’entreprise sous la coupe du régime bolivarien. Le résultat est alors rapide : la contribution de PDVSA au budget de l’État repart à la hausse ce qui permet au gouvernement de disposer d’une véritable manne financière.

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