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Les Dossiers Pédagogiques Du Services Éducatif

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lles4. Désormais, suite au rapport Thélot de 2004 et à la loi d’orientation de 2005, le « socle commun » français a été promulgué document de référence (décret du 11 juillet 2006) et décliné dans chaque matière d’enseignement. La littérature relative aux compétences est, quant à elle, particulièrement abondante. Nous nous proposons dans un premier temps d’en dresser un historique succinct dans la mesure où il peut éclairer les promesses mais aussi les risques parfois dénoncés. Cherchant à cerner une définition s’adaptant au mieux au contexte des arts plastiques, nous nous efforcerons de nourrir le débat actuel qui n’a pas manqué de s’installer dans plusieurs pays dès lors que « l’approche par compétences », largement explicitée par Ph. Perrenoud, s’est imposée dans la plupart des nouvelles orientations pour l’Ecole.

Organisation de coopération et de développement économiques, organisation internationale fondée en 1960 et dont le siège est à Paris. Les orientations de l’OCDE, visant à définir quelles pourraient être les compétences indispensables à un individu pour « faire face aux défis de la vie », confirmées par les conseils européens de Stockholm (2001) et Barcelone (2002), ont débouché en novembre 2005 sur une proposition de recommandation du Parlement européen et du Conseil, présentée par la Commission, concernant « les compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la vie ». Cette proposition a été adoptée le 26 septembre 2006. 3 Le présent texte reprend et développe le propos de ma conférence « L’approche par compétences en éducation artistique » prononcée lors de mon invitation au Grand Duché du Luxembourg, le 8 mars 2008. 4 Notons toutefois que la publication de la Charte des programmes, dès le 13 novembre 1991, avait unifié la structuration de ceux-ci et officialisé l’usage préférentiel des deux notions de connaissances et compétences : « Le programme énonce les contenus disciplinaires en termes de connaissances et de compétences à acquérir : connaissances, c’est-à-dire notions et concepts ainsi que savoir-faire propres à la discipline pour certains niveaux ; compétences terminales visées en fin d’année, dans la perspective de fin de cycle ou de fin de formation : le programme détermine chaque fois le niveau de compétence visé, en donnant une liste des tâches que les élèves devront être capables d’accomplir ».

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Nous nous interrogerons ensuite sur les changements d’attitude censés se profiler en toute logique des réécritures inévitables de nos programmes. Dit autrement de manière plus brutale, nous tenterons de voir si nous nous acheminons vers une Nième « usine à gaz » inventée par un pouvoir politique sensible aux effets de mode, s’il s’agit d’un soufflé qui ne tardera pas à se dégonfler comme bien d’autres baudruches didactiques ou pédagogiques avant lui, ou bien, simplement, le retentissement médiatique étant dépassé, s’il ne s’agit pas, effectivement, d’une crédible invitation à affiner nos outils et nos dispositifs d’apprentissage ainsi qu’à nous interroger encore et toujours sur nos pratiques et le sens à donner à notre enseignement. Nous tenterons enfin de proposer quelques pistes de travail, modestes mais réalistes. Comme il m’a déjà été donné l’occasion de le dire à propos de l’introduction de l’outil informatique dans nos pratiques didactiques en arts plastiques, tout nouvel instrument n’a d’intérêt que s’il est facteur de progrès (en l’occurrence ici : améliorer les démarches d’acquisition chez nos élèves) ; jamais quiconque ne s’emparera d’un outil nouveau pour se compliquer la tâche !

Des taxonomies aux objectifs d’expression

Evoquer le substantif « compétence » en contexte scolaire conduit naturellement à la notion d’« objectif ». Une telle approche, en principe, n’évoque pas en premier lieu ni la note ni le bulletin scolaire mais suggère un mode d’évaluation plus large qui prend en considération le long terme. Ce changement d’approche est déjà ancien, même si la note prévaut toujours aux yeux des familles, aussi n’est-il peut-être pas totalement inutile d’opérer un bref rappel historique, même s’il ne s’agit ici que de quelques moments-clés, rapide survol fatalement incomplet. Toute référence aux objectifs appelle d’abord la référence aux taxonomies de Bloom. On peut considérer que B.S. Bloom a été le premier aux U.S.A. dès les années 50 à chercher un mode de classement des objectifs afin de mieux élucider les finalités d’un examen et ainsi en faciliter son évaluation : non plus seulement noter un résultat en sanctionnant erreurs ou omissions mais se donner les moyens de mieux expliciter ce qui est attendu des candidats et mieux détecter les indices observables5. Malheureusement, les fruits ne furent pas ceux qui étaient attendus. Fille directe de ces taxonomies, la pédagogie par objectifs (P.P.O.) qui se développa rapidement sur le terrain (du moins, celui des instructions officielles des disciplines), pédagogie que l’on peut qualifier de comportementaliste (en termes behavioristes, le comportement est la réponse à un stimulus), eut tendance, on le sait, à atomiser les apprentissages sous la forme d’une succession de micro-tâches, ne comptabilisant que des réussites fragmentaires dont la portée globale échappait, ce qui avait suscité rapidement de multiples réticences arguant qu’il était hâtif de s’en tenir à l’apparence de simples performances immédiates et qu’il serait plutôt bienvenu de s’interroger sur les compétences réellement acquises et intégrées de manière durable. Rapidement, la critique de la P.P.O. héritée de Bloom et R.F. Mager (1962) fut complète, mais elle suscita fort heureusement par contrecoup un rebondissement largement

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Bloom B.S. (1956), Taxonomy of Educational Objectives : The Classification of Educational Goals. Handbook 1. Cognitive Domain. New York: McKay. Traduit en français par M. Lavallée en 1969 (Montréal: Education Nouvelle).

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positif. Par souci de garantir l’évaluation de réussites plus authentiques, des voix s’élevèrent dont celle de R.M. Gagné (1965), invitant à faire porter son appréciation non plus sur la performance mais sur ce qu'il nommait des capacités persistantes6. Ceci nous rapproche déjà de la compétence. Aux U.S.A. également, D.C. McClelland7 introduisit quant à lui (1968) la différence entre comportement répondant (à un stimulus) et comportement opérant (c’est-àdire être capable d’agir de sa propre initiative et dans la durée) : cela coïncide complètement avec la différence aristotélicienne entre poiein et prattein (faire et agir) à laquelle nous sommes si attachés en art. Pour autant, malgré toutes les critiques qui ont pu être énoncées à juste titre à l’encontre de la P.P.O., l’apport des théories de Bloom pour les plasticiens me semble devoir être souligné à deux égards. D’une part, Bloom et ses collaborateurs (Harrow et Krathwohl, notamment) nous interpellent sur le fait – qu’on me pardonne ce raccourci radical – qu’il n’y a pas que « le cognitif » mais aussi « le psychomoteur » ainsi que « l’affectif ». Même si ce vocabulaire peut paraître aujourd’hui désuet, cela signifie que l’élève apprend aussi avec son corps (qu’il y a de l’apprentissage non verbal) et qu’on ne doit peut être pas s’intéresser exclusivement aux savoirs et savoir-faire mémorisés et restitués mais tout autant à l’intérêt que l’on a pu susciter chez l’élève vis-à-vis de telle ou telle matière. En tout état de cause, les acquisitions d’un élève ne sauraient se limiter aux simples connaissances. On voit combien ceci nous rapproche du champ de l’éducation artistique. D’autre part, l’apport de Bloom met en avant le degré d’exigence que l’on associe à chaque objectif. Classant les objectifs cognitifs par ordre croissant, il établit une progression allant de la simple connaissance puis la compréhension jusqu’à des comportements plus autonomes (établir une synthèse, évaluer), principe qui se retrouvera dans la plupart des autres taxonomies et qui incitera V. et G. de Landsheere à proposer en 1976, s’appuyant sur Gagné et E.W. Eisner (mais L. D’Hainaut suivra en suggérant de s'intéresser aux démarches intellectuelles et au cadre concerné par les actions8), une synthèse suivant trois niveaux : maîtrise / transfert / expression9, rappelant au passage que « répéter une démarche créative n’est plus de la création de même qu’une habitude n’est plus un transfert », ce qu’ils nommèrent le « principe de réduction »10. Ainsi, ce qui peut être, plastiquement parlant, une grande initiative associée à une importante prise de risque en 6ème peut ne devenir en 4ème que la simple restitution mécanique d’un pré-acquis. Eisner est d’ailleurs une autre référence primordiale. Eisner est un théoricien précieux pour notre domaine tant il a cherché à s’affranchir de tout système programmé, ainsi considérait-il l’éducation comme un art et l’évaluation proche de l’appréciation esthétique, c’est-à-dire soucieuse du qualitatif et non exclusivement fondée sur le quantitatif11. Cet « autrement » s’illustra particulièrement dans son étude portant sur les objectifs d’expression. Le chercheur montra que ceux-ci ne font que créer une situation exploratoire où la thématique

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