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Triste Tropique

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hands de fruits exotiques se pressait le long de la coque », un si pauvre souvenir mérite-t-il que je lève la plume pour le fixer ?

1 « gangue » : enveloppe.

2 « claniques » : qui relèvent d’un clan.

3 « scorie » : déchet, résidu.

4 « rade » : bassin maritime naturel.

5 « Recife » : port brésilien.

Ce corrigé a été rédigé par Jean-Luc.

Remarque préliminaire :

Ce texte argumentatif tiré d’une œuvre célèbre et emblématique ne posait pas de difficulté particulière. Lévi-Strauss a incarné avec quelques autres intellectuels l’esprit français dans le monde. Il a porté haut le renom de l’école anthropologique française en appuyant sa démarche sur le structuralisme.

Introduction

En 1955, Lévi-Strauss publie Tristes Tropiques, un ouvrage où il relate les deux expéditions scientifiques qu’il a menées au Brésil comme ethnologue. L’extrait proposé à l’analyse en constitue les premières lignes.

Ce texte argumentatif nous présente une partie des réticences de l’auteur lorsqu’il s’est lancé dans la rédaction de son ouvrage. Sa tonalité est polémique par le caractère tranché de ses prises de position. Dans le préambule de cet essai, le lecteur peut découvrir un début de pacte de lecture en même temps qu’un manifeste de « la profession d’ethnographe ».

Nous nous attacherons à montrer comment ce texte possède quelques-unes des caractéristiques d’un incipit. D’abord nous relèverons ce qui concerne le sujet, le cadre spatio-temporel ; puis nous examinerons le projet de rédaction de Lévi-Strauss dans les écueils qu’il entend éviter ; pour terminer par ce qu’il désire nous partager des humbles réalités de l’exercice de sa science.

Développement

A – Le cadre spatio-temporel, le sujet, les personnages

Les premières lignes apprennent au lecteur que l’ouvrage souhaite « raconter [l]es expéditions » de l’auteur au « Brésil » « quinze ans » auparavant, soit avant 1940. Le personnage principal sera moins le « Je » individualiste qui prend la parole que le regard formé par une discipline scientifique exigeante.

Ce récit n’entend donc pas être une relation de voyage ordinaire.

B – Ce que ne sera pas l’ouvrage. La démythification du voyage traditionnel.

Lévi-Strauss va dénoncer quelques écueils qu’il souhaite éviter.

L’ouvrage débute par une déclaration tonitruante dans laquelle l’auteur prend en charge l’énoncé par un « Je » sans détour suivi d’un verbe de sentiment à la forte intensité : « Je hais les voyages et les explorateurs. » La formule n’est pas sans rappeler le célèbre « J’accuse » d’un certain Zola. Ainsi est posée d’emblée la thèse. Le lecteur est mis en état de choc. Cette entame agressive est sans doute voulue pour affirmer une prise de position personnelle, iconoclaste, pour dynamiter d’entrée le poids d’une tradition culturelle tenace, celle du voyage conçu comme un dépaysement ou une aventure.

La première cible de la critique est l’exotisme facile, la croisière pleine de clichés. Pour dénoncer cette forme commerciale ou désœuvrée du voyage, Lévi-Strauss parodie la relation d’étape d’un guide touristique mâtinée d’une évocation à la manière du Supervielle de Débarcadères. Malgré l’apparente séduction de cette carte postale, l’auteur refuse de « fixer » par écrit « un si pauvre souvenir » considéré péjorativement comme une « scorie de la mémoire ». Il nous signale ainsi que l’intérêt du périple est ailleurs.

Le deuxième reproche s’adresse à l’assimilation de l’exploration à l’aventure. Cette dernière est réduite à de longues pertes de temps, « de la faim, de la fatigue, parfois de la maladie ». Elle se dissout dans « ces mille corvées », expression hyperbolique qui banalise l’existence prétendument aventureuse de l’explorateur. Le coup de grâce est porté non sans humour par la comparaison des périls « à une imitation du service militaire… ». Les points de suspension jouent le rôle d’une litote, le rêve de gloire s’enlise dans l’inconfort et la vie réglée des casernements.

Ces mises au point permettent à Lévi-Strauss de préciser son statut : il n’est pas un voyageur comme les autres, un individu qui recherche le plaisir, le dépaysement ou la notoriété. Il se veut ethnographe, c’est-à-dire un être qui se consacre corps et âme à sa discipline scientifique.

C – Ce qu’il sera. Grandeur et servitude de la « profession d’ethnographe ».

L’auteur définit le départ vers les contrées lointaines comme une « servitude » nécessaire. Il semble qu’il fasse allusion à un recueil de Vigny1 illustrant l’expérience désenchantée de la vocation militaire. Comme l’écrivain romantique, Lévi-Strauss refuse toute idéalisation de son activité scientifique en la qualifiant de métier comme un autre. Pire l’aventure risque d’y détourner le savant du « travail efficace ».

Paradoxalement, la grandeur de cette « profession » réside dans la rigueur de la recherche, l’effacement de l’ego. Seules comptent la ténacité et l’humilité dans la collecte du précieux matériau avant qu’il ne disparaisse sous les assauts de la civilisation dominante. L’ethnographe est comparé au mineur qui va chercher le précieux minerai sous la « gangue ». Il ne viendrait à l’idée de personne d’attacher du « prix » à ce travail de fourmi ou aux blocs extraits, alors que nous pouvons nous extasier devant le bijou en or ou en argent qui va en résulter. Le savant va donc partir à la recherche tenace de l’onomastique, des coutumes, des traditions orales avant qu’elles ne sombrent dans l’oubli. Implicitement, Lévi-Strauss suggère que c’est le travail de raffinement ultérieur sur le matériau brut qui conférera sa valeur inestimable à la « collecte ».

Nous comprenons mieux alors les réticences du début à fixer sur le papier des souvenirs insignifiants, « scories » sans intérêt, dont l’accumulation inflige « honte et dégoût » jusqu’à la nausée « écœurante ». Ce refus des contingences triviales marque d’autant plus

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