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Réponse à un acte d'accusation, Les Contemplations, Victor Hugo

Commentaire de texte : Réponse à un acte d'accusation, Les Contemplations, Victor Hugo. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  21 Mai 2016  •  Commentaire de texte  •  2 157 Mots (9 Pages)  •  6 824 Vues

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Lecture analytique n°12

« Réponse à un acte d’accusation », Les contemplations, Victor Hugo

Introduction :

En 1856, il y a plus de vingt ans que s’est livrée la bataille d’Hernani, pièce de théâtre de Victor Hugo, en 1830 à la Comédie Française. Contre les tenants de la tradition qui regardaient derrière eux, vers le classicisme, se trouvaient en première ligne les ardents défenseurs du drame romantique, nouveau théâtre dont Victor Hugo était le jeune chef de file.

Dans sa « Réponse à un acte d’accusation », il se souvient du combat victorieux qu’il amené à cette époque contre le Classicisme.

Problématique :

Comment Victor Hugo exprime-t-il, dans ce poème, sa conception de la poésie ?

Annonce du plan :

A l’évocation de ses souvenirs, Hugo retrouve toute son énergie : il transforme ce qui aurait pu être un simple manifeste poétique en une scène de drame romantique, curieux, amusant et grotesque : les mots deviennent les personnages à part entière d’un spectacle épique dont Hugo est le protagoniste visionnaire. Mais le champ de bataille littéraire ne lui suffit pas car les enjeux de cette libération dépassent le cadre étroit de la littérature et englobent les luttes révolutionnaires pour l’égalité des hommes.

I] Une scène de drame romantique

Grâce aux images et à son imagination visionnaire, Hugo métamorphose la vie en théâtre (Shakespeare). Le lecteur assiste littéralement à une scène de drame romantique.

  1. Une progression en deux temps

C’est un drame en deux actes : le premier décrit le monde littéraire de l’ « avant » Hugo et le second, celui de l’ « après » Hugo.

• Le premier acte met en place le décor, la situation : c’est le monde d’avant Hugo, le monde du classicisme figé dans une immobilité que traduit l’imparfait de durée. Les « castes » (v-1), chez les mots comme chez les hommes, ne se mélangent pas, vivant chacune de leur côté : le parallélisme « les uns… les autres… » (V-2-5) rend compte de cette opposition. Trois vers suffisent pour évoquer les mots « nobles » (v-2) mais Hugo en consacre quinze aux mots « mal-nés » (v-1). Il évoque les mauvais lieux qu’ils fréquentent (c’est-à-dire ceux où on les prononce : « galères » (v-6), « halles » (v-8), « bagne » (v-12)) ; puis il décrit leurs relations contrastées (affection ou mépris) avec les grands auteurs classiques (jusqu’au vers 20).

• Le second acte débute par un coup de théâtre : le claironnant « alors, brigand, je vins » (v-20) pour signifier le début du Classicisme de façon parodique est sûrement un écho parodique du « Enfin, Malherbe vint » , cri de soulagement par lequel Boileau, dans son Art poétique, salue l’arrivée de ce censeur sévère qui allait mettre au pas la création littéraire du XVIIème siècle, après les années débridées du baroque. C’est le début d’une vraie révolution, d’une succession endiablée de discours et d’actions au passé simple.

  1. Un univers hétéroclite (= fait d’éléments différents)

Hugo fait entrer le lecteur dans un univers hétéroclite, fantaisiste, il a la volonté d’écrire les mots de l’époque passée.

• Il fait défiler, comme dans un film documentaire, les lieux symboliques, les objets marquants de la réalité historique du XVIIème siècle. Il ressuscite l’époque de Louis XIV : la division de la société en « nobles » (v-2) et « roturier » (v-27) ; les lieux, de « Versailles » (v-4) au « bagne » (v-12) et à la « halle » (v-8) ; les « carrosses » (v-4), les « perruques » (v-9) et les « bas » (v-8) ou les « haillons »(v-8).

Les mots vivent une véritable vie d’hommes : ils sont « bien » (v-1) ou « mal » (v-1) nés, selon qu’ils appartiennent à la « populace » (v-10), au monde des « vilains » (v-11) ou à la noblesse, ils peuvent être marqués du « F » (v-12) des forçats et envoyés aux « galères » (v-6). Les accumulations, les énumérations les décrivent avec leur caractère, tels les personnages d’une pièce costumée.

  1. Mais un univers cohérant

Cependant Hugo veille à la cohérence de cet univers.

• Aux lieux historiques, il mêle des références littéraires (v-11-14-15-16), en accord avec la véritable nature de ces personnages : les mots habitent dans un « lexique » (v-12), ou un « dictionnaire » (v-26) qui à son tour devient un sans-culotte avec son « bonnet rouge » (v-26), ou au fond d’un « encrier » (v-28) ; ils appartiennent à des groupes lexicaux : « patois » (v-6), « argot » (v-7), fréquentent différents « genres » (v-7) de la littérature : la « farce » (v-9) , la « prose » (v-9) ou les « vers » (v-16). Les figures de style, les institutions elles aussi de la littérature sont personnifiées (v-23-24-33) : l’Académie s’effarouche comme une vieille « douairière » (v-22), les idées butinent les mots comme un « essaim » (v-30) d’abeilles.

• Paradoxalement, les Hommes deviennent des choses : Aristote, le philosophe grec dont les ouvrages ont servi de référence depuis l’Antiquité jusqu’à la période classique en matière littéraire, sert de « borne » (v-34). Mais cette borne ne fixe plus les limites de bon goût : elle est devenue un marchepied du haut duquel le héraut (= annonceur publique) Hugo fait sa proclamation.

• Au milieu de tous ces mots, les auteurs classiques sont ressuscités, avec leurs traits de caractère : Corneille le généreux et Molière l’indulgent, Racine le hautain et Vaugelas le tyrannique, Voltaire qui fait le délicat, alors que ses contes philosophiques sont plutôt lestes (= très ou trop libres). Ils deviennent eux-mêmes des personnages du drame.

II] Hugo, metteur en scène révolutionnaire

Hugo ne se contente pas d’être le metteur en scène de ce spectacle, il s’y donne un rôle de premier plan où il peut exprimer sa personnalité.

  1. « Ego, Hugo » : parole et action

Hugo anime le texte d’un bout à l’autre et justifie la fière devise qu’il s’était donnée, « Moi, Hugo », en multipliant les énoncés à la première personne, les apostrophes, les exclamations éclatantes : « je m’écriai » (v-20), « déclarai » (v-35) … Il apparaît comme Danton révolutionnaire, dont il partage les « audaces » (v-38) qui font écho au célèbre discours « De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ». C’est aussi un chef militaire, qui, de son souffle épique, fait trembler les « bataillons d’alexandrins » (v-24), déchaîne des « tempêtes » (v-28).

Sa parole de poète est action : il crée des réalités qu’il nomme par la force des images. Il joint le geste à la parole et ses mouvements vifs en font une espèce de Robin des Bois, bondissant sur « la borne d’Aristote » (v-34), s’évadant « hors du cercle » (v-39) dont on le croyait prisonnier. Il semble être partout à la fois, se dédouble, commente ironiquement ses propres déclarations en citant les réactions horrifiées de ses accusateurs qui lui reprochent ses « discours affreux » (v-33), accomplit des exploits héroïques.

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