Memoire Jawal

du pays, il faut que l’école produise des élèves finissants et des jeunes qui ont reçu un enseignement de qualité. Il faut que l’école soit efficace. L’efficacité au niveau scolaire décrit la relation entre les facteurs qui ont rendu possible la fabrication d’un produit (les inputs par rapport aux outputs comme on dit en termes anglo-saxons) et le produit lui-même.

Ainsi, à partir des données d’une enquête que nous avons entreprise auprès des enseignants au niveau de 6e année fondamentale (AF), nous cherchons grâce, à la présente étude, à mesurer l’influence des caractéristiques sociales, professionnelles et les pratiques pédagogiques des enseignants sur le taux de réussite de leurs élèves aux examens officiels de 6e AF.

L’étude est articulée en cinq chapitres :

Au premier chapitre, le problème de recherche est posé et spécifié. Les objectifs de la recherche sont clairement définis et la pertinence de la recherche aux triples points de vue socio-économique, pédagogique et théorique est établie.

Au deuxième chapitre, nous faisons la recension des écrits en passant en revue les études qui ont été déjà réalisées sur le sujet. Dans ce même chapitre les hypothèses du travail sont clairement formulées, et les concepts retenus de la recension des écrits sont définis et opérationnalisés.

Au troisième chapitre, la méthodologie du travail est présentée : les étapes suivies au cours de l’étude, le plan d’échantillonnage de l’enquête menée dans le cadre de la recherche, les méthodes et les techniques statistiques qui ont été utilisées en vue de parvenir à l’atteinte de nos objectifs et à la vérification des hypothèses.

Le quatrième chapitre présente une analyse descriptive des résultats de l’enquête par l’analyse minutieux de tableaux de fréquence et des graphiques.

Le cinquième chapitre expose une analyse explicative des résultats. Deux méthodes statistiques sont appliquées dans le cadre de l’étude: dans une première partie, une analyse bivariée et dans une seconde partie, la régression multiple.

En denier lieu, les conclusions de l’étude sont présentées ainsi que des perspectives.

Chapitre 1 : Problématique de la réussite aux examens de 6e AF

Avant d’exposer les divers aspects de la problématique de la réussite scolaire et plus particulièrement de la problématique de la réussite aux examens de 6e AF, il importe de brosser le tableau de l’état actuel du système éducatif haïtien et plus particulièrement de l’état de l’école fondamentale haïtienne.

1.1.1 Un système éducatif en proie à des troubles sociopolitiques et économiques

Les imbroglios politiques qui ont sévi dans le pays depuis les années 80, le départ de Jean-Claude Duvalier, la mise en place d’un gouvernement démocratique en 90 puis renversé en 91 et revenu en 94, et récemment les batteries de manifestations de l’année 2004 contre le gouvernement d’alors, ont entravé la bonne marche du système éducatif haïtien. Outre ces problèmes externes, le système éducatif haïtien fait aussi face à des problèmes internes comme le manque d’infrastructures d’accueil et de financement pour répondre à la demande scolaire grandissante remarquée ces dernières années.

1.1.2- Manque d’infrastructures d’accueil et de financement pour répondre à la demande scolaire grandissante

D’après les données du recensement scolaire mené en 2003 par le Ministère de l’Education Nationale , dans le département de l’Ouest 49.02% des écoles des deux premiers cycles de l’enseignement fondamental ont l’électricité, 21.89% disposent d’une bibliothèque, 23.89% possèdent des toilettes hygiéniques et 66.48% disposent de l’eau et 13.73% de ces écoles bénéficient de cantine scolaire.

Par ailleurs, le budget du secteur de l’éducation traduit les difficultés à faire de l’éducation la priorité numéro un. En effet la part attribuée à l’éducation dans le budget total de l’Etat suit une tendance baissière. Après s’être stabilisée autour de 17% pour la période 1996-2001, elle est passée à 16.54%, 12,08% et 9.67% respectivement pour les années 2001-2002, 2002-2003 et 2003-2004 . Les dépenses publiques dans le secteur éducatif tendent à diminuer pour les deux premiers cycles de l’enseignement fondamental, tandis que différents rapports sur la situation éducative en Haïti révèlent une croissance des taux bruts et nets de scolarisation.

L’effort de scolarisation se porte d’abord sur le primaire . Selon l’ECVH , 65% des enfants ayant entre 6 et 11 ans révolus en septembre 2000 vont effectivement à l’école primaire. Cette ruée vers les écoles est beaucoup plus importante dans la ville de Port-au-Prince . En effet la dégradation de l’économie rurale a entraîné un fort mouvement de migration vers les villes, et surtout vers la ville de Port-au-Prince. Cette situation de migration trouve aussi son explication dans le fait que le système éducatif haïtien n’offre pas de possibilités réelles à la population rurale qui se voit obligée de migrer à tout bout de champs vers les villes et surtout vers la ville de Port-au-Prince à la recherche du « pain de l’instruction ». Il faut aussi souligner qu’aujourd’hui se manifeste une certaine prise de conscience des parents qui ont décidé, en dépit des conditions socio-économiques difficiles, d’envoyer leurs enfants à l’école.

En somme, l’enveloppe budgétaire accordée par le gouvernement ne permet pas de répondre à cette massification. Qu’en est-il dans ces conditions de la qualité de l’éducation, donc du taux de réussite des élèves aux examens officiels, et plus spécifiquement aux examens officiels de 6e AF?

1.1.3- Effectif scolaire grandissant, qualité de l’enseignement dégradante, faible performance au niveau fondamental

Outre le déséquilibre au niveau de l’offre scolaire et l’insuffisance d’infrastructures, l’expansion de l’effectif scolaire constatée surtout au niveau des premiers cycles de l’enseignement fondamental crée un problème de qualité de l’enseignement.

Celle-ci ne fait que régresser depuis les années 80, incluant une inefficacité interne du système éducatif. La progression des enfants au niveau des des deux premiers cycles de l’enseignement fondamental est caractérisée par une lenteur. Selon une étude de l’équipe du Research Triangle Institute sur l’efficacité interne de l’enseignement en Haïti : « Sur 1000 élèves admis en 1ère AF (ancien Cours Préparatoire I), 434 seulement atteindraient la 6e AF. Parmi ces derniers, 228 atteindraient le troisième cycle de l’école fondamentale, et 193 atteindraient la fin du troisième cycle fondamental. De ces 228 élèves, 131 auraient parcouru sans redoublement les deux premiers cycles fondamentaux ».

Selon une étude menée par « Aide et Action Paris » en Novembre 2003, le nombre de surâgés ayant un âge moyen de 15 ans, augmente proportionnellement avec le taux de redoublement surtout en 6e AF. Du fait de la dégradation de la qualité de l’enseignement, le taux de rendement interne est relativement bas et les examens de 6e AF ou CEP constituent un véritable barrage pour les enfants.

Tableau 1-1 : Evolution des résultats des Examens Officiels de 6e AF (1994/1995 à 2005/2006) pour l’ensemble du pays

Année Inscrits Participant Admis Taux de Réussite (en %)

1994 / 1995* 98 016 98 016 67 791 69,16

1995 / 1996* 113 206 113 206 52 669 46,52

1996 / 1997* 141 845 141 845 74 460 52,49

1997 / 1998* 153 972 153 972 82 286 53,44

1998 / 1999 158 828 158 828 92 797 58,43

1999 / 2000** … 156210 70 270 44,98

2000 / 2001 … … … …

2001 / 2002 … … … …

2002 / 2003*** 208297 192875 122246 63,38

2003 / 2004** 227169 210983 131434 62,30

2004 / 2005** 229231 217449 141772 65,20

2005 / 2006 229040 … … …

Source : DCPE/ MENJS

* taux de réussite calculés à partir des inscrits

** taux de réussite calculés à partir des participants

*** moins le département du Sud

... données non disponibles

Comme le montre le tableau 1-1, le pays n’est jamais parvenu à un taux de réussite de 70% aux examens officiels de 6e AF, que ce taux soit calculé sur la base de l’effectif inscrit ou de l’effectif des participants à ces examens. De 96 à 2000, les taux de réussite