DissertationsEnLigne.com - Dissertations gratuites, mémoires, discours et notes de recherche
Recherche

Dom Juan, pièce baroque ?

Analyse sectorielle : Dom Juan, pièce baroque ?. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  18 Mars 2020  •  Analyse sectorielle  •  1 930 Mots (8 Pages)  •  1 179 Vues

Page 1 sur 8

Dom Juan, pièce baroque ?

Introduction :

a) Définition du baroque :

        Mot d'origine espagnole, perle de forme irrégulière.

        Appliqué à l'art, à la littérature : tout ce qui sort de la simplicité, de l'ordinaire. Esthétique du bizarre, de l'anormal. Symbole commode, dans l'architecture : les colonnes torses, par opposition aux colonnes rectilignes issues de l'art gréco-romain.

        Opposition fondamentale entre baroque et classicisme, école de netteté, de rigueur, de raison (symbole : les jardins de Versailles). Au théâtre : les trois unités, complétées par la vraisemblance et la bienséance.

b) Compréhension et intérêt du sujet :

        Le point d'interrogation : Dom Juan est-il une pièce baroque ? Discussion : Analyse de la pièce pour en dégager les éléments baroques - mais aussi, ce qui relève d'une autre esthétique, qui ne peut être que le classicisme - la pièce a été représentée pour la première fois en 1665 - alors que le baroque a dominé les lettres françaises de 1580 à 1640.

        Problème secondaire : comment définir une comédie classique, au-delà trois unités ? Il faut faire référence à l'œuvre de Molière elle-même, pour voir par exemple quel type d'intrigue est choisi, quel dénouement devient la norme, quelle est la fonction des valets, quel objectif est visé (une peinture, une instruction morale...)

c) Annonce du plan.

        I. Du classicisme, malgré tout...

        II. Mais le baroque l'emporte.

I. Le classicisme de Dom Juan :

1. 1. Une progression et un dénouement :

        Don Juan a déclaré une sorte de guerre à Dieu. La progression construite par Molière fait se succéder les offenses, de plus en plus graves, jusqu'au dénouement, qui en est la sanction :

        Elvire est abandonnée (le sacrement du mariage est bafoué).

        Une tentative d'enlèvement échoue (la tempête est évidemment envoyée par Dieu pour protéger un mariage "pur", entre deux jeunes gens qui s'aiment (I, 2 : "la tendresse visible de leurs mutuelles ardeurs").

        La double séduction des paysannes pourrait déboucher sur une bigamie simultanée.

        Le pauvre, sorte d'ermite, représente directement Dieu. Vouloir le faire "jurer" est encore plus grave, métaphysiquement, que de bafouer le mariage.

        La statue du Commandeur, en baissant la tête, donne un avertissement solennel à Don Juan : le surnaturel existe, la mort n'est pas une fin. Mais loin de se laisser convaincre (convertir) Don Juan joue la conversion, et devient un Tartuffe, pour échapper à son père (V, 1) et à Don Carlos (V, 3).

        La présence de Dieu devient de plus en plus matérielle : le spectre, en femme voilée, qui se transforme en Temps, avec sa faux à la main, offre une dernière fois à Don Juan la chance du repentir. La statue du Commandeur (V, 5), exécute la sentence divine, et elle se met à parler, ce qui représente bien aussi une progression par rapport à l'inclination de tête.

        Quant au dénouement, s'il ne s'agit pas d'un mariage heureux, il assure néanmoins le retour à un équilibre menacé tout au long de la pièce. Comme le disait sobrement Louis XIV, "Don Juan n'est pas récompensé". Sganarelle lui-même, privé de ses "gages", semble puni de ses lâchetés.

2. Un portrait psychologique (cf. La Bruyère, classique à cet égard), très bien construit, puisqu'il montre Don Juan sous différents aspects, dont la somme constitue sa vérité : mari éconduisant sa femme, Done Elvire, séducteur courtisant des paysannes, fils révolté devant son père, homme sacrilège devant le Pauvre, la statue du Commandeur. Unité profonde du caractère : le libertinage associe la passion de la conquête amoureuse et le mépris des lois divines. Un caractère parfaitement logique : je ne cherche que mon plaisir, la société obéit à des lois religieuses (par exemple le sacrement du mariage), je les bafoue et, même, je m'en sers à mon profit.

3. La peinture d'un caractère à portée universelle :

        Derrière le grand d'Espagne dévoyé, un type social et moral : "Un grand seigneur méchant homme".

        Universalité au-delà de l'ancrage social et historique : le "donjuanisme" a pu être étudié par la psychanalyse - preuve qu'il s'agit d'une possibilité de la nature humaine, tout comme le complexe d'Œdipe...

II. Dom Juan, pièce baroque :

1. Le décor, la mise en scène :

        Dom Juan fait partie des "pièces à machines" qui flattent le goût du public pour le grand spectacle, pour les décors, alors que le classicisme a le culte de la sobriété, et préfère les mots aux images, comme le prouvent les récits intégrés dans les tragédies classiques, par exemple le récit de Théramène, dans Phèdre, qui raconte la mort d'Hippolyte, victime d'un monstre envoyé par Neptune.

        Dans Dom Juan, lorsque s'ouvre le tombeau du Commandeur, à l'acte III, la scène d'extérieur (bois et verdure) se métamorphose sous les yeux du spectateur en scène d'intérieur (avec des voûtes, des piliers et la statue miraculeuse) ; au dernier acte, un spectre apparaît, qui "change de figure et représente le Temps avec sa faux à la main". Enfin, à la dernière scène, le tonnerre tombe sur Don Juan "avec un grand bruit et de grands éclairs", avant que la terre ne s'ouvre pour l'engloutir, en vomissant "de grands feux".

2. Le mépris des unités :

        L'unité de LIEU :

        Aux cinq actes de Dom Juan correspondent six emplacements différents : deux à l'intérieur d'une ville de Sicile qui n'est pas nommée (un palais à l'acte I, l'appartement de Don Juan à l'acte IV), trois à l'extérieur : la campagne au bord de la mer à l'acte II, une forêt et un mausolée à l'acte III, un dernier aux portes de la ville (Acte V).

        D'une manière visuelle, l'errance permanente de Don Juan, tout occupé de chasses nouvelles, est ainsi représentée (et non résumée en des discours, comme l'exigerait un strict classicisme). Comme le dit Sganarelle (I, 2) [Don Juan] se plaît à se promener de liens en liens, et n'aime guère à demeurer en place.

        L'unité de TEMPS, quoique Molière évite de le signaler trop nettement, semble une parodie du Cid tant les événements ne sauraient être réduits à 24 ou 36 heures : le naufrage, les déplacements, les deux soupers, les rendez-vous donnés pour le lendemain ou les références à la veille ("Je ne suis plus le même d'hier au soir", dit Don Juan à Don Louis, V, 1) sont autant de violations de la règle chronologique classique. Les circonstances se bousculent et tourbillonnent, célébrant l'inconstance du héros.

...

Télécharger au format  txt (10.4 Kb)   pdf (113.2 Kb)   docx (12.4 Kb)  
Voir 7 pages de plus »
Uniquement disponible sur DissertationsEnLigne.com