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Jacques Sémelin - Purifier et détruire

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Le premier chapitre de l’ouvrage, « Les imaginaires de la destructivité sociale », est essentiel. C’est autour et à partir de lui que vont ensuite se déployer les autres parties de la réflexion de J. Sémelin. Il cherche à comprendre comment se produit « le mouvement de bascule du fantasme à l’action ». La question du passage à l’acte est centrale. Il commence par répudier toutes les méta-explications monocausales s’appuyant sur la pauvreté, la démographie, la spécificité culturelle ou la fatalité historique liée à l’opposition ethnique. Il met a contrario en avant la nécessité d’un discours politique qui donne sens à un ensemble de facteurs réunit lors d’une crise (à la fois économique, politique interne et externe, démographique, institutionnelle) vers la représentation d’un bouc-émissaire. Il y a restructuration d’un imaginaire collectif en crise par le ciment commun d’un discours à l’apparence cohérente qui vise à établir « le nous contre le eux ». Les trois principaux thèmes identifiés dans les discours relèvent de l’identité, de la pureté et de la sécurité.

Cependant, ce discours n’aurait de portée s’il n’était légitimé par l’ensemble des sphères de la société. C’est l’objet du second chapitre. Les intellectuels vont mettre en place une idéologie par une relecture historique de la situation. Le politique va légitimer ce discours en l’intégrant à la norme. Le religieux lève l’interdit du meurtre. Enfin, le social vise à la mise en place d’une pensée unique par l’exclusion des individus dissidents.

Le troisième chapitre s’intéresse aux rôles du contexte international et des médias. La situation macro-territoriale est elle-même généralement instable et apporte des perturbations internes au pays où se déroulent les violences. La communauté internationale, outre des intérêts et des visions divergentes, a un manque de perception claire des enjeux. Quant aux média internationaux, malgré les remontées d’informations vérifiées faisant état de massacres, il y a un phénomène d’incrédulité et de résistance au changement des représentations qui explique la prise de conscience tardive.

Une fois ces derniers freins au massacre levés, l’auteur s’interroge sur « les dynamiques du meurtre de masse » dans son quatrième chapitre. Comment passe-t-on du massacre à l’extermination ? Il dénombre quatre dynamiques. Tout d’abord, l’impulsion centrale. Il s’agit de la mise en œuvre délibéré de la part du pouvoir d’une politique de destruction. La question de l’intentionnalité est posée. Ensuite, les acteurs étatiques et paraétatiques sont détournés et/ou formés pour cette mission. S’ajoute le rôle de l’opinion publique et de la participation populaire qui varie grandement en fonction des contextes. Enfin, l’auteur constate une évolution de la morphologie de la violence où le processus d’extermination est autonomisé du processus de guerre.

La partie suivante sur « les vertiges de l’impunité » se focalise sur le moment du passage à l’acte individuel. Il combine ici trois types d’interprétation qui font définitivement l’originalité et l’intérêt de la démarche de l’auteur. En premier lieu, les individus combinent l’idéologie à l’intérêt pour justifier moralement leurs actes. En second lieu, un processus de socialisation et d’apprentissage de la violence à la fois vertical (hiérarchie) et horizontal (groupe de pairs) est mis en avant. La recontextualisation de l’expérience de Milgram et les explications des efforts d’adaptation psychologiques et de recours à des techniques sont conviés. Dans une troisième perspective, l’auteur franchit un pas en affirmant qu’il n’y a pas de rationalité. C’est le propre même de cette situation où les frontières entre l’imaginaire et le réel sont brouillés avec les notions d’ennemis intérieurs et extérieurs. « Il restera toujours d’importantes zones d’ombres, réfractaires à toute approche analytique ». Soutenir cet argument est preuve, il me semble, d’une certaine distance.

Le dernier chapitre est relativement à part du reste de l’ouvrage. Fort de son expérience, l’auteur s’engage dans une typologie des formes de massacre qui le mène à une définition de la notion de génocide. Il convie nombre de références et d’auteurs. In fine, une différenciation entre « nettoyage ethnique », qui aurait pour but la purification d’un territoire mais en laissant une porte de sortie aux victimes (cas de la Bosnie), et « génocide », qui viserait à la destruction totale et immédiate d’une communauté (Rwanda), est faîte.

En conclusion, et dans le souci d’un retour au concret actuel, l’auteur propose des axes de travail dans le cadre des sciences sociales et de l’action internationale.

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