DissertationsEnLigne.com - Dissertations gratuites, mémoires, discours et notes de recherche
Recherche

Lecture Analytique Chap 2 ,Micromegas

Dissertations Gratuits : Lecture Analytique Chap 2 ,Micromegas. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires
Page 1 sur 7

Séquence 2 – FR10

 La confrontation des points de vue

Dans un premier temps, en effet, le dialogue est marqué par le désaccord

: les interjections relevées soulignent la mésentente des interlocuteurs.

Toutefois, ce moment dure peu et le dialogue évolue vers l’accord.

On peut ainsi distinguer trois moments dans cet échange, qui correspondent

à trois thèmes de discussion :

– du début à « pour vous plaire », le dialogue porte sur la nature ; les

personnages sont en désaccord ;

– à partir de « je ne veux point qu’on me plaise » jusqu’à « de ce pays-là »,

le dialogue porte sur le nombre de sens dont les Saturniens disposent ;

– après une brève pause narrative, la dialogue reprend pour commenter

la durée de la vie.

Il est à noter que l’échange occupe l’ensemble du chapitre II, dont nous

n’étudions ici que la première moitié. Or, la suite confirme la tendance

de ce dialogue, qui construit une harmonie de plus en plus grande entre

les deux interlocuteurs, ce que signale la dernière phrase du chapitre :

« après s’être communiqué l’un à l’autre... ». L’échange permet ainsi la

rencontre entre les personnages, rencontre réussie comme le souligne

l’adverbe « ensemble » à la fin du chapitre.

…car c’est l’occasion d’un échange philosophique

Le dialogue est ce qui permet la rencontre, et autorise la connaissance :

l’échange est d’abord de nature didactique17. Micromégas veut obtenir

des informations sur Saturne. C’est donc par la curiosité que peut s’instaurer

une véritable communication avec autrui.

 Des thèmes universels

La rencontre de l’Autre est permise par le caractère universel des questions

abordées : la nature, les sens, la longévité. Elle est aussi autorisée

par l’attitude comparative, qui marque l’ouverture à l’Autre. Or, le mode

comparatif est défini d’entrée. Il ne s’agit pas de faire des comparaisons ou

des métaphores pour décrire poétiquement Saturne : « Eh non ! dit le voyageur,

encore une fois, la nature est comme la nature. Pourquoi lui chercher

des comparaisons ? », demande Micromégas de manière critique ; mais il

s’agit de mettre en parallèle deux mondes en parallèle : « « Combien de

temps vivez-vous ? dit le Sirien. –Ah ! bien peu, répliqua le petit homme

de Saturne. – C’est tout comme chez nous, dit le Sirien ». L’analogie est en

effet propre à atténuer les différences, ce que le héros éponyme refuse ;

au contraire, il veut connaître d’autres réalités que la sienne : « Je ne veux

point qu’on me plaise, […] je veux qu’on m’instruise », précise-t-il.

Cette rencontre s’établit sur des données précises, qui donnent à

l’échange une valeur didactique : l’accumulation des chiffres : « soixantedouze

sens », expression répétée deux fois, « cinq lunes », « mille

sens », « cinq cents grandes révolutions du soleil »... L’accumulation de

ces chiffres est marquée par la gradation, qui en souligne le caractère

17. Le terme « didactique » caractérise un discours qui a pour but de transmettre des informations, un enseignement.

Séquence 2 – FR10 159

improbable. En même temps, elle donne une authenticité à l’échange,

qui s’établit sur des bases mathématiques ; d’ailleurs, la question « combien

» est le point de départ de chaque moment du dialogue. Le terme

« mathématiques » vient du verbe grec « manthanô » qui signifie « comprendre

» ; les « mathémata », ce sont étymologiquement « les choses

qui ont été comprises » ; les données chiffrées sont ici accumulées par

l’auteur, comme dans l’ensemble du conte, pour souligner cette condition

essentielle de la rencontre avec autrui : la compréhension, assurée

par la curiosité et la tolérance, c’est-à-dire l’acceptation de la différence.

 La réflexion sur la condition humaine

Au-delà de leur fantaisie, les chiffres marquent donc une véritable position

philosophique. À une époque où Voltaire est séduit par l’attitude scientifique

et contribue à vulgariser les travaux de Newton en France, il propose

d’en faire la base de la rencontre avec l’Autre. La connaissance d’autrui

est placée sous le signe de l’exactitude ; elle s’appuie sur des informations

précises. Mais elle aboutit aussi à une universalité : quelle que soit

la différence entre les étrangers, leurs questionnements sont les mêmes.

Ainsi, le Saturnien dispose de soixante-douze sens, tandis que le Sirien

en compte « près de mille » ; mais l’un et l’autre font le même constat :

ce nombre est insuffisant pour combler « l’ennui » ou « l’inquiétude ». De

même, les Saturniens vivent « cinq cents grandes révolutions du Soleil » ,

mais il partage avec Micromégas l’angoisse de la mort. L’universalité est

ainsi le maître mot de la rencontre : « il faut que ce soit une loi universelle

», constate le Sirien. Quelle que soit la particularité de chacun, les

êtres partagent donc un sort commun, ce que met en évidence la formule

comparative : « C’est tout comme chez nous », dit Micromégas. L’universalité

est également mise en évidence par une constatation placée au centre

de ce passage : « j’ai vu des mortels fort au-dessous de nous ; j’en ai vu de

forts supérieurs ; mais je n’en ai vu aucuns qui n’aient plus de désirs que

de vrais besoins... ». Le voyage permet donc la rencontre avec l’Autre, et,

au-delà de sa différence, le constat d’une nature universelle et commune.

…et d’un dialogue avec le lecteur

Cet échange implique aussi le lecteur, qui partage avec les protagonistes,

le narrateur – et l’auteur – une condition commune. Au-delà de la narration

s’instaure donc un dialogue implicite entre l’auteur et le lecteur.

 Un contrat de lecture

Ce dialogue, ainsi placé au début de l’oeuvre, installe d’abord un contrat entre

l’auteur et le lecteur. Les termes de ce contrat sont disséminés dans le texte :

– Le sens du voyage entrepris par Micromégas est indiqué : il est à la fois

une expérience de la variété des modes de vie et de l’universalité qui préside

à la condition mortelle. Il est aussi une expérience fondamentale :

Micromégas cherche à atteindre la planète où « il y a des êtres beaucoup

plus parfaits » ; le voyage est donc mû par le constat de sa propre imperfection,

il est une quête de perfection, un désir de perfectionnement,

comme la vie elle-même. Le voyage et la rencontre de l’Autre sont les

expériences qui permettent de mieux se connaître soi-même.

160 Séquence 2 – FR10

...

Télécharger au format  txt (11.7 Kb)   pdf (105.1 Kb)   docx (11.4 Kb)  
Voir 6 pages de plus »
Uniquement disponible sur DissertationsEnLigne.com