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Française

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une guerre pour le partage et la redistribution de ce genre de butin. La lutte pour soustraire les masses laborieuses à l'influence de la bourgeoisie en général, et de la bourgeoisie impérialiste en particulier, est impossible sans une lutte contre les préjugés opportunistes à l'égard de l'"Etat". Nous examinerons d'abord la doctrine de Marx et d'Engels sur l'Etat, et nous nous arrêterons plus particulièrement aux aspects de cette doctrine qui ont été oubliés, ou que l'opportunisme a déformés. Nous étudierons ensuite, spécialement, le principal fauteur de ces déformations, Karl Kautsky, le chef le plus connu de la IIe Internationale (1889-1914), qui a fait si lamentablement faillite pendant la guerre actuelle. Enfin, nous tirerons les principaux enseignements de l'expérience des révolutions russes de 1905 et surtout de 1917. A l'heure présente (début d'août 1917), cette dernière touche visiblement au terme de la première phase de son développement; mais, d'une façon générale, toute cette révolution ne peut être comprise que si on la considère comme un des maillons de la chaîne des révolutions prolétariennes socialistes provoquées par la guerre impérialiste. Ainsi, la question de l'attitude de la révolution socialiste du prolétariat envers l'Etat n'acquiert pas seulement une importance politique pratique; elle revêt un caractère d'actualité brûlante, car il s'agit d'éclairer les masses sur ce qu'elles auront à faire, pour se libérer du joug du Capital, dans un très proche avenir. L'auteur Août 1917

PREFACE A LA DEUXIEME EDITION

Cette deuxième édition est presque entièrement conforme à la première. On a simplement ajouté le paragraphe 3 au chapitre II. L'auteur Moscou, 17 décembre 1918.

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Lenine

L’Etat et la révolution

CHAPITRE I : LA SOCIETE DE CLASSES ET L'ETAT

1. L'ETAT, PRODUIT INCONCILIABLES DE CONTRADICTIONS DE CLASSES

Il arrive aujourd'hui à la doctrine de Marx ce qui est arrivé plus d'une fois dans l'histoire aux doctrines des penseurs révolutionnaires et des chefs des classes opprimées en lutte pour leur affranchissement. Du vivant des grands révolutionnaires, les classes d'oppresseurs les récompensent par d'incessantes persécutions; elles accueillent leur doctrine par la fureur la plus sauvage, par la haine la plus farouche, par les campagnes les plus forcenées de mensonges et de calomnies. Après leur mort, on essaie d'en faire des icônes inoffensives, de les canoniser pour ainsi dire, d'entourer leur nom d'une certaine auréole afin de "consoler" les classes opprimées et de les mystifier; ce faisant, on vide leur doctrine révolutionnaire de son contenu, on l'avilit et on en émousse le tranchant révolutionnaire. C'est sur cette façon d'"accommoder" le marxisme que se rejoignent aujourd'hui la bourgeoisie et les opportunistes du mouvement ouvrier. On oublie, on refoule, on altère le coté révolutionnaire de la doctrine, son âme révolutionnaire. On met au premier plan, on exalte ce qui est ou paraît être acceptable pour la bourgeoisie. Tous les social-chauvins sont aujourd'hui "Marxistes" — ne riez pas ! Et les savants bourgeois allemands, hier encore spécialisés dans l'extermination du marxisme, parlent de plus en plus souvent d'un Marx "national-allemand", qui aurait éduqué ces associations ouvrières si admirablement organisées pour la conduite d'une guerre de rapine ! Devant cette situation, devant cette diffusion inouïe des déformations du marxisme, notre tâche est tout d'abord de rétablir la doctrine de Marx sur l'Etat. Pour cela, il est nécessaire d'emprunter toute une série de longues citations aux oeuvres mêmes de Marx et d'Engels. Sans doute ces longues citations alourdiront-elles l'exposé et ne contribueront-elles nullement à le rendre plus populaire. Mais il est absolument impossible de s'en dispenser. Tous les passages ou, du moins, tous les passages décisifs des oeuvres de Marx et d'Engels sur l'Etat doivent absolument être reproduits aussi complètement que possible afin que le lecteur puisse lui-même se représenter l'ensemble des conceptions des fondateurs du socialisme scientifique et le développement de ces conceptions, et aussi pour que leur déformation par le "kautskisme" aujourd'hui prédominant soit démontrée, documents à l'appui, et mise en évidence. Commençons par l'ouvrage le plus répandu de F. Engels : L'Origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat, dont une sixième édition parut à Stuttgart dès 1894. Il nous faudra traduire les citations d'après les originaux allemands, parce que les traductions russes, bien que très nombreuses, sont la plupart du temps ou incomplètes ou très défectueuses. "L'Etat, dit Engels en tirant les conclusions de son analyse historique, n'est donc pas un pouvoir imposé du dehors à la société; il n'est pas d'avantage "la réalité de l'idée morale", "l'image et la réalité de la raison", comme le prétend Hegel. Il est bien plutôt un produit de la société à un stade déterminé de son développement; il est l'aveu que cette société s'empêtre dans une insoluble contradiction avec elle-même, s'étant scindée en oppositions inconciliables qu'elle est impuissante à conjurer. Mais pour que les antagonistes, les classes aux intérêts économiques opposés, ne se consument pas, elles et la société, en une lutte stérile, le besoin s'impose d'un pouvoir qui, placé en apparence au-dessus de la société, doit estomper le conflit, le maintenir dans les limites de l'"ordre"; et ce pouvoir, né de la société, mais qui se place au-dessus d'elle et lui devient de plus en plus étranger, c'est l'Etat" (pp. 177-178 de la sixième édition allemande). Ici se trouve exprimée en toute clarté l'idée fondamentale du marxisme sur le rôle historique et la signification de l'Etat. L'Etat est le produit et la manifestation de ce fait que les contradictions de classes sont inconciliables. L'Etat surgit là, au moment et dans la mesure où, objectivement, les contradictions de classes ne peuvent être conciliées. Et inversement : l'existence de l'Etat prouve que les contradictions de classes sont inconciliables. C'est précisément sur ce point essentiel et capital que commence la déformation du marxisme, déformation qui suit deux lignes principales. D'une part, les idéologues bourgeois et surtout petits-bourgeois, obligés sous la pression de faits historiques incontestables de reconnaître que l'Etat n'existe que là où existent les contradictions de classes et la lutte des classes, "corrigent" Marx de telle sorte que l'Etat apparaît comme un organe de conciliation des classes. Selon Marx, l'Etat ne pourrait ni surgir, ni se maintenir, si la conciliation des classes était possible. Selon les professeurs et publicistes petits-bourgeois et philistins — qui se réfèrent abondamment et complaisamment à Marx ! — l'Etat a précisément pour rôle de concilier les classes. Selon Marx, l'Etat est un organisme de domination de classe, un organisme d'oppression d'une classe par une autre; c'est la création d'un "ordre" qui légalise et affermit cette oppression en modérant le conflit de classes. Selon l'opinion des politiciens petits-bourgeois, l'ordre est précisément la conciliation des classes, et non l'oppression d'une classe par une autre; modérer le conflit, c'est concilier, et non retirer certains moyens et procédés de combat aux classes opprimées en lutte pour le renversement des oppresseurs. Ainsi, dans la révolution de 1917, quand le problème de la signification et du rôle de l'Etat se posa dans toute son ampleur, pratiquement, comme un problème d'action immédiate et, qui plus est, d'action de masse, socialistes-révolutionnaires et menchéviks versèrent tous, d'emblée et sans réserve, dans la théorie petite-bourgeoise de la "conciliation" des classes par l'"Etat". D'innombrables résolutions et articles d'hommes politiques de ces deux partis sont tout imprégnés de cette théorie petite-bourgeoise et philistine de la "conciliation". Que l'Etat soit l'organisme de domination d'une classe déterminée, qui ne peut pas être conciliée avec son antipode (avec la classe qui lui est opposée), c'est ce que la démocratie petite-bourgeoise ne peut jamais comprendre. L'attitude que nos socialistes-révolutionnaires et nos menchéviks observent envers l'Etat est une des preuves les plus évidentes qu'ils ne sont pas du tout des socialistes (ce que nous, bolchéviks, avons toujours démontré), mais des démocrates petits-bourgeois à phraséologie pseudo-socialiste. D'autre part, il y a la déformation "kautskiste" du marxisme, qui est beaucoup plus subtile. "Théoriquement", on ne conteste ni que l'Etat soit un organisme de domination de classe, ni que les contradictions de classes soient inconciliables. Mais on perd de vue ou l'on estompe le fait suivant : si l'Etat est né du fait que

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