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Corneille: Horace / acte 2 scène 1

Commentaire de texte : Corneille: Horace / acte 2 scène 1. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires

Par   •  11 Février 2022  •  Commentaire de texte  •  2 168 Mots (9 Pages)  •  1 017 Vues

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Khôlle français 2

Problématique : En quoi la réflexion sur la tragédie politique permet-elle au héro cornélien de construire son ethos ?

Introduction :

Pierre Corneille, poète et dramaturge du 17e siècle est reconnu pour son théâtre qui est celui de l’admiration (drames spectaculaires, théâtre romanesque, sens du sacrifice, pathétique et sublime) où dans le tragique le héros cornélien se hisse. Cependant, il est également connu pour son théâtre politique qui sert une réflexion sérieuse sur les problèmes qui se posent aux collectivités humaines (paix, guerre, justice, bon, mauvais gouvernement). Nous nous intéresserons aujourd’hui à son œuvre Horace parut en 1640. L’extrait étudié est la scène 1 de l’acte 2, de fait, juste avant la scène d’exposition durant laquelle l’intrigue a été lancée. Cet extrait est alors la monté en tension, les personnages ont pris acte des confrontations politiques et ces derniers vont révéler leurs idéologies  qui vont soutenir la tragédie. En effet, dans cette scène se déroule un dialogue entre Horace et Curiace, qui sont respectivement des frères des deux fratries en rivalité, porté sur un conflit politique et sur la construction du caractère du héros cornélien. Il est donc assez évident de comprendre que cet extrait porte sur le politique et la tragédie comme beaucoup de texte de Corneille. Ces deux thèmes assez récurrents sont intimement liés, en effet « La tragédie est politique parce que la politique est tragique » nous rappelle Michel Prigent dans son œuvre Le Héros ou l’État. /// Partant, nous verrons en quoi la réflexion sur la tragédie politique permet-elle au héro cornélien de construire son ethos (=construire sa personnalité : justesse, noblesse et orgueil). Pour cela, nous étudierons dans un premier temps la réflexion d’Horace sur la fatalité de la mort et sur la politique. Par la suite, nous nous intéresserons au second mouvement qui vient rappeler la réalité de la mort avant le symbolisme de la mort glorieuse. Puis, nous nous pencherons sur l’idée de patriotisme liée à la dignitas typiquement héroïque. Enfin, il conviendra d’orienter la réflexion vers la mise en avant du paradoxe concernant le personnage d’Horace.    

 

I/ Une réflexion sur la fatalité et la mort

  • La première réplique avec sa césure à l’hémistiche permet de bien poser la scission entre Albe et Rome. En effet on constate un phénomène d’échos dans la construction des phrases où chacune des villes retenties. Cela marque bien la tension présente entre ces dernières. C’est ainsi que le texte pose une d’emblé une question d’ordre politique. On parle d’abord de ville, de cité donc de politique, de polis puis on glisse doucement vers les personnages avec « ceux » à la réplique 2 qui fait référence aux habitants de ces cités.
  • Cette deuxième réplique est caractérisée par différents procédés le premier étant le phénomène de dramatisation notamment grâce à la rime Rome-nomme qui à travers une sorte de personnification de la ville renvoie à l’idée selon laquelle il y a certains noms dramatiques, sous-entendu les personnages qui rythment la tragédie, qui ont été choisi pour Rome.
  •  De plus ce phénomène de dramatisation accentué par la présence du chiffre 3 qui symbolise la trinité chrétienne donc la perfection. « Les 3 qu’elle nomme » montre que quelque chose a été acté. Néanmoins il ne faut pas omettre le verbe voir dans la même réplique. On peut y voir une référence à l’apocalypse qui signifie en grec ancien l’action de révéler un écho à la révélation de Jean dans la bible.
  • Les répliques 3&4 vont de pair avec cette notion de fatalité à laquelle on ne peut échapper.
  • On remarque également l’accent tonique sur « tant » qui renvoie à une idée de charges, de poids qui rappel la fatalité. Cet adverbe d’intensité renforcé par l’accent nous affirme que l’heure est grave.
  • La réplique 5&6 viennent poser la question du doute, de la légitimité du héros avec le mot « digne » et « pouvait bien mieux que nous ». On retrouve une sorte de dilemme cornélien entre devoir et raison. Cette humilité presque poussé au ridicule nous fait penser à un héros affirmant sa masculinité qui joue faussement une figure humble. En somme, qui est dans une posture
  • En effet, ces répliques 6&7 nous plongent enfin dans la réflexion que porte Horace sur la fatalité de la mort. On retrouve en début de phrase une contradiction direct à toute l’humilité auparavant exprimé avec « mais quoique ».
  • De plus, la rime avec cercueil et orgueil vers 8 est d’autant plus intéressante pour comprendre l’état d’esprit d’Horace. La mort par le combat n’est pas la promesse de la fin mais d’un renouveau. C’est la promesse d’un passage de l’horizontalité à la verticalité que la gloire d’un mort tragique peut apporter à l’instar des héros de la mythologie dans l’Illiade et l’Odyssée où ces derniers ne peuvent construire leur vie que s’il meurt. La mort devient alors un tragique ascensionnel où le héros se hisse par la gloire et s’admire dans lui-même.
  • Les deux vers 9&10 reprennent la position faussement humble d’Horace. La réplique « j’ose espérer beaucoup de mon peu de vaillance » vient s’opposer à sa «mâle assurance ».
  • De plus le « juste orgueil » est un oxymore car effectivement le juste renvoie à la mesure or l’orgueil lui se réfère à la démesure. Ici la justice ne sert à Horace qu’à s’enorgueillir en légitimant son discours d’un pdv moral et politique
  • On constate dans les répliques 11&12 qui sont dans une autre strophe qu’Horace n’est plus dans l’analyse du réel. En effet par le terme « projets » il est évident que l’on parle de cette fameuse mort glorieuse et tant convoitée. Néanmoins faire rimer sujet et projet laisse sous-entendre qu’Horace veut être maitre de son projet de mort avant même d’être maitre de la cité.
  • On retrouve ce rappel à la mort aux répliques 13&14&15 où celle-ci est utilisé afin de justifier sa réflexion sur la mort que l’on pourrait qualifier d’orgueilleuse. Ici, Horace par son humilité toujours aussi fausse, fait passer sa glorification de la mort comme une sorte de sacrifice pour la ville « mon âme ravi remplira son attente ou quitteras la vie ». Ici l’attente provient de Rome qui est personnifié. On peut supposer qu’il s’agit alors du peuple de Rome qu’Horace se doit de ne pas décevoir.
  • A la réplique 15 le désir de mort est explicitement évoqué. La mort est plus accessible que la défaite, plus noble. Elle représente dans sa globalité une meilleure issue
  • Le « noble désespoir » de la réplique 16 expose un paradoxe voire un oxymore qui nous montre que n’importe quel acte est porté par un jugement de valeur. Cela fait écho au théâtre d’admiration évoqué dans l’introduction.
  • Les dernières répliquent d’Horace instaure par le phénomène de métrique en alexandrin (comme dans le reste des répliques par ailleurs) une sorte de rythme qui peut être vu comme le temps qui passe à la façon d’une horloge qui fait tictac. Le temps est compté dans chaque répliques d’Horace qui attend impatiemment sa mort.

II / Le symbolisme de la mort glorieuse versus la réalité

  • Le premier mot de Curiace « Hélas » est le cri du pathétique. De fait, les faits sont posés et on comprend directement l’opposition idéologique entre les deux personnages. Un des personnages se lamente alors que l’autre se réjouit. On retrouve en effet le champ lexical de la lamentation « craint » « plaint » dans les deux premières répliques de Curiace.
  • Dures extrémités au vers 22 remet en avant le dilemme cornélien. Que choisir entre « voir Albe asservie » ou perdre une « si chère vie ».
  • Les vers 23&24 illustre l’idée selon laquelle Curiace est emplie de désespoir à l’idée des morts notamment avec « vos derniers soupirs ».
  • Il porte un regard sur l’existence = vivre ? ou mourir ? En réalité le personnage de Curiace donne la nette impression de n’être là que pour mettre en avant par sa contradiction le fantasme de la virtualité de la mort d’Horace
  • Le procédé de question rhétorique au vers 25 s’inscrit parfaitement dans cette démarche où Curiace est pris dans ce dilemme quant à l’existence. On constate une opposition entre la raison incluant les êtres chères vivants et le devoir politique qui peut certes amener à la mort mais aussi à la gloire, à la victoire
  • De surcroit, les vers 26&27 sont caractérisés par un parallélisme qui symbolise l’encerclement de la mort « des pleurs à répandre ». En effet, en mourant, Horace laisse derrière lui une réalité avec des proche qui eux seront meurtris. Curiace est porté sur le concret, la réalité qui inclut amis et famille, la physicalité de la mort à travers le spatial, la géométrie. Il reproche à Horace qui est dans l’idée de la mort de ne pas être dans la réalité de celle-ci

III/ Un patriotisme lié à la dignitas

  • La réplique débute par un pronom relatif « quoi » qui marque l’étonnement d’Horace quant à la bonté de Curiace qui ne l’oublions pas est censé être son rival (bien qu’également son beau-frère) vis-à-vis de son sacrifice patriotique. On remarque également la répétition du pronom réfléchis « me », « mon ». Il est question de la patrie mais aussi paradoxalement d’un individu qui se construit son ethos dans ce qu’il y a de plus orgueilleux
  • Dans la réplique 2 c’est le mots « charmes » en fin de vers qu’il est intéressant d’analyser. En effet, ce terme signifie enchantement en latin soit quelque chose de presque féerique avec un personnage qui fantasme (dans le sens de capacité à inventer des choses) sur la mort. Faire rimer charme avec larme à la réplique 3 renvoie à la même idée ce n’est pas une douleur de mourir mais au contraire un doux plaisir que l’on associe à une dimension féerique.
  • Les répliques 3&4 sont une redondance à cette idée de patriotisme qui justifie le fantasme de la mort. Le mot « sort » rime avec le mot « mort » de sorte à ce que l’un est l’autre aille de pair. On se trouve alors au paroxysme de la tragédie, de la fatalité où le héros ne peut échapper à son sort qui est la mort sans aucune autre issue.

IV/ Horace un personnage paradoxal

  • On retrouve dans ces deux premières répliques un retour à la réalité avec l’évocation des « amis » et du malheur qu’Horace va laisser derrière lui
  • Le vers 3 rappelle pour une énième fois le dilemme cornélien. Néanmoins on y trouve une particularité. De nature, le dilemme cornélien touche directement le héros et est évoqué par ce derniers or ici c’est un autre personnage autre qui suggère ce dilemme de façon répétitive au héros qui lui semble parfaitement décidé.
  • On constate alors deux dimensions du tragique : pour Curiace la souffrance et pour Horace la noblesse
  • Cette construction en parallélisme des vers 3&4 symbolise cette fois-ci l’encerclement d’une tristesse inconsolable dû à la mort mais pourtant injuste voire même injustifié puisque le principal concerné est heureux de mourir. Ce paradoxe est ce qui construit l’ethos d’Horace. Sa personne toute entière est basé et construite sur le paradoxe de vivre pour ceux qui sont réels ou mourir pour sa cité/ sa polis avec l’avantage d’en tirer une gloire éternelle
  • « un ami si fidèle » ici porte le lecteur dans une confusion : la rivalité n’est-elle plus d’actualité ou est-ce une rivalité biaisé ?? On retrouve encore une fois un paradoxe qui, ici, peut être interpréter selon le dicton « Perdre un ennemi est une grande peine que rien ne saurait consoler » (Christine de suède).
  • La dernière réplique de cet extrait est inattendue. Il y l’intervention d’un personnage externe dans ce qui s’apparentait à une sorte de déclaration d’amitié entre deux rivaux. Celui-ci vient interrompre ce moment d’amitié et restaure d’une certaine façon le conflit originel qui existe entre les deux personnages. Néanmoins, cette scène reste révélatrice pour la suite de la pièce. La monté de l’intrigue est démultiplié car au de-là d’un conflit politique on constate une ambiguïté d’un pdv relationnel que l’on peut qualifier de cacher. Une double intrigue se profile donc.

En conclusion, cette scène qui suit la scène d’exposition est une réelle monté en puissance d’un point de vue théâtrale. On assiste à ce que l’on pourrait qualifiés à prime abord de conflit, néanmoins, celui-ci se transforme progressivement en une relation d’amitié caché. Le personnage d’Horace se définit par sa relation au tragique et le drame politique vient soutenir une réflexion sur la manière dont le héros se construit. Néanmoins, cette construction de l’ethos est rythmée par la grâce efficace dans sa toute puissance issue du Jean Cynisme. En essayant de colorer sa destiné d’une certaine noblesse Horace n’échappe pas pour autant à ce qu’on retiendra de sa mort c’est à dire du sang et des pleurs.

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