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ui relativisent l'importance quantitative de la globalisation financière, on peut se demander pourquoi la globalisation du siècle dernier n'a pas conduit aux mêmes critiques, aux mêmes angoisses et aux mêmes dilemmes qu'aujourd'hui. Une réponse possible est que les gouvernements d'alors n'étaient pas soumis aux mêmes demandes qu'aujourd'hui. En particulier, la notion que les politiques monétaires nationales pouvaient servir à atténuer l'impact d'une récession n'apparaît qu'à partir des années 1930 avec la révolution keynésienne. La contrainte que fait peser aujourd'hui la globalisation financière sur l'exercice de ces politiques macroéconomiques nationales n'était donc pas perçue comme telle : les crises de la fin du XIXe siècle furent nombreuses et sévères mais elles furent subies passivement. Aujourd'hui, la pression démocratique fait que l'on attend légitimement des politiques économiques nationales qu'elles réagissent à de telles crises et limitent leurs conséquences en terme de chômage. Pour ce qui est de la globalisation financière, il faut aussi aller au-delà de la comparaison des flux nets de capitaux. À la fin du XIXe siècle, la grosse majorité des flux de capitaux servait à financer des infrastructures (en particulier les chemins de fer) et acheter des titres de la dette

Figure 1- Mouvements nets de capitaux en % du PIB, 1870-1996 (source : Taylor, 1996).

L'évolution est assez comparable pour l'Allemagne et la France. Pour les pays

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publique. Ces flux de capitaux étaient donc majoritairement des flux de long terme (de plus d'un an) et impliquaient relativement peu de prêts à des institutions financières ou d'investissements de portefeuille de court terme. La situation aujourd'hui est complètement inversée : les flux de très court terme dominent de beaucoup les flux de long terme. Ainsi sur le marché des changes, les positions nettes de la plupart des intervenants ne sont en moyenne gardées ouvertes qu'une vingtaine de minutes : il est difficile d'envisager horizon plus court. Le montant des transactions brutes sur le marché des changes est aujourd'hui estimé à environ 1 700 milliards de dollars par jour (contre 600 en 1989 et moins de 200 en 1986). Ce montant échangé chaque jour représente une somme supérieure au PIB annuel de la France d'environ 20 %. Le degré d'intégration des marchés financiers, pour les flux de court terme, est donc aujourd'hui sans précédent. Si l'on compare les deux types de globalisation, celle qui s'opère sur les marchés financiers et celle qui s'opère sur les marchés des biens, on constate que le commerce d'actifs financiers a augmenté durant les quinze dernières années trois fois plus vite que le commerce des biens. C'est donc sur les marchés financiers que le processus de la globalisation est le plus frappant. Celui-ci touche pratiquement toutes les parties du globe à l'exception notable de l'Afrique. Les renversements brutaux des mouvements de capitaux sont devenus une autre caractéristique récente des marchés financiers internationaux : en 1996, 70 milliards de dollars furent investis en Indonésie, Corée, Malaisie, Philippines et Thaïlande. Pendant le second semestre de 1997, c'est plus de 100 milliards de dollars qui firent précipitamment le chemin inverse. Depuis le début 1999, les entrées de capitaux vers ces pays ont retrouvé un rythme presque comparable à celui d'avant 1997. La globalisation financière a donc deux dimensions, l'une temporelle et l'autre spatiale. Le temps s'est raccourci pour les intervenants sur les marchés qui doivent continuellement réagir aux nouvelles informations. L'origine de ce raccourcissement de l'horizon temporel est principalement technologique et n'existait pas pendant la première phase de la globalisation : il tient à l'arrivée en continu de nouvelles informations. Le second aspect de la

globalisation actuelle est que la géographie physique n'a plus beaucoup d'importance pour les phénomènes financiers : une crise peut débuter dans une région du monde et se propager au reste du monde sans égard aux frontières et aux distances. La crise asiatique de 1997 illustre parfaitement ce phénomène de contagion : la crise débute en juillet avec la dévaluation du baht thaïlandais et la faillite de nombreuses banques et institutions financières du pays. Elle atteint ensuite la Corée du Sud déjà fragilisée par la faillite de plusieurs grands groupes industriels. La panique sur les marchés de change et les marchés d'actions s'étend rapidement à l'automne aux autres pays de la région (Malaisie, Indonésie, Philippines, Taiwan et Hong Kong) puis en 1998 à l'Amérique Latine et à la Russie. La quasi-faillite du fond spéculatif américain LTCM, conséquence indirecte de la panique sur les marchés russes, démontra que les marchés financiers des pays riches n'étaient pas épargnés par un problème qui avait débuté dans un petit pays asiatique. Les bénéfices escomptés : le consensus de Washington Pour comprendre pourquoi de nombreux pays ont les uns après les autres réduit voire éliminé les restrictions réglementaires sur les mouvements de capitaux, il est utile de revenir sur les bénéfices qu'on espérait recueillir d'un tel processus. Alors qu'il existe un quasi-consensus parmi les économistes sur les gains du commerce de biens (consensus d'ailleurs non partagé par le reste de la population), les économistes sont beaucoup plus divisés pour ce qui est de l'échange international d'actifs financiers et la libéralisation de ce commerce. Pour ceux qui pensent que celle-ci ne peut aller trop loin, l'analogie entre commerce des biens et commerce des actifs est invoquée. Après tout, le commerce d'actifs financiers n'est qu'un échange de biens différé : en achetant un actif financier étranger, on échange des biens aujourd'hui contre des biens dans le futur. S'il existe un surplus d'épargne en Europe, par exemple en prévision du vieillissement de la population, celui-ci peut s'investir dans les pays en voie de développement où en revanche il existe un besoin de financement pour des investissements dont on peut penser que le rendement est plus

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élevé que celui qui existe en Europe. Si la globalisation financière se résumait à la libéralisation de ce type d'échange d'actifs, on ne voit pas comment elle pourrait engendrer tant de critiques. Dans cet exemple, on voit bien en effet l'avantage mutuel à l'échange d'actifs. De fait, même les critiques les plus virulents de la globalisation financière ne veulent pas restreindre ces flux de capitaux privés finançant des investissements de long terme. De ce point de vue, la globalisation financière offre une opportunité sans précédent pour les pays émergents de financer leur développement. Ce type d'argument est important mais il n'est pas suffisant pour justifier la position dominante qui a régné au Trésor américain, au FMI et à la Banque Mondiale pendant les années 1990, et qu'on a appelé le « consensus de Washington ». Celui-ci constitua la base idéologique permettant de justifier la pression exercée sur les pays émergents pour qu'ils libéralisent rapidement les mouvements de capitaux, y compris ceux de court terme. L'objectif affiché était que la globalisation financière et plus généralement l'intégration des pays pauvres dans un marché mondial leur permette de se développer. La succession des crises financières dans les pays émergents a remis en cause cet optimisme de manière spectaculaire. Sur le plan empirique, des études récentes ont montré que la libéralisation des mouvements de capitaux est l'élément qui permet de prédire le plus sûrement la survenue des crises : ce fut vrai pour l'Amérique Latine des années 1980 et de l'Asie en 1997. Ce fut aussi le cas de l'Europe du début des années 1990 et la crise du Système monétaire européen. Certes, les études empiriques révèlent que les pays qui ont libéralisé les mouvements de capitaux ont en moyenne connu des taux de croissance plus élevés que les autres, mais l'effet est quantitativement faible et pas toujours robuste. Après tout, le miracle économique de l'Europe des Trente Glorieuses s'est effectué sans liberté des mouvements de capitaux. Les dérèglements d'une finance globalisée Dans le cadre d'une première interprétation de la crise de 1997, dite « fondamentale », la globalisation financière ne fait que révéler, voire

amplifier des problèmes fondamentaux sousjacents : système financier insuffisamment réglementé, garanties sur les investissements risqués, voire népotisme et corruption. Une autre interprétation est possible, qui met en cause plus radicalement le fonctionnement des marchés financiers internationaux. Elle tient à l'existence d'un phénomène propre à la finance qu'on appelle les anticipations autoréalisatrices. Les anticipations sont dites auto-réalisatrices lorsque les actions des agents, fondées sur

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