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Pierrick Sorain - Projet D'Artiste

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c choisi. L'ambiance et le cadre sont gentiment extravertis, mais toujours avec mesure. Pierrick Sorin, tel un Zelig des arts plastiques, provoque le rire en incarnant des types d'artistes que l'on a forcément croisés un jour ou l'autre et dans lesquels nous retrouvons tous les défauts spécifiques à la profession.

Ce faux documentaire s'appelle FOLIES. Un présentateur soigné aux gestes maniérés (col roulé, petites lunettes ovales et léger accent britannique) dresse le programme de l'émission en n'omettant pas de signaler l'audace et le dynamisme de la ville de Nantes qui a commandé pour ses espaces publics des œuvres «spectaculaires et monumentales», («Ce soir nous n'allons pas très loin, nous allons à Nantes où il se passe des choses très surpre-nantes...».

Vont s'enchaîner la description et l'explication, par chacun des artistes (cinq hommes et deux femmes, tous interprétés par Sorin lui-même), des sept œuvres sélectionnées pour figurer dans ces espaces publics. Pierrick Sorin est évidemment déguisé, le visage maquillé, excepté lorsqu'il joue son propre rôle ; il est en possession de certains attributs (ordinateur portable, appareil-photo, caméra, mais aussi bloc-notes, pots de peintures, etc.) ; chaque attitude est façonnée en fonction du personnage incarné : l'artiste portugais est exalté, l'artiste anglais est un peu intello, prétentieux, comme l'espagnol qui se double de la figure du mélancolique ; l'artiste hongroise, elle, est vaguement inhibée, la photographe allemande est d'une sensibilité excessive, quant à

l'artiste grec, il s'agit carrément d'un mégalomane animé par les goûts les plus kitschs.... Le dernier (Pierrick Sorin, le natif de Nantes,) donne l'impression d'être un gentil pervers !

Sorin est filmé en play-back et une voix s'exprimant dans la langue de l'artiste (parfois en anglais) est rajoutée comme s'il communiquait directement, face à la caméra. Et comme dans les reportages télévisés habituels, nous pouvons profiter d'une voix-off qui nous traduit simultanément les propos en français. Le présentateur a annoncé les projets «les plus fous», des projets qui se caractérisent essentiellement par leur côté «spectaculaire et monumental», l'objectif étant de «bouleverser le paysage urbain». Et en effet, nous assistons à la présentation d'œuvres délirantes mais dont l'intérêt est soigneusement justifié, soit par l'artiste lui-même, soit par le commentaire en voix-off, tant sur les plans artistique, économique, scientifique, culturel, topographique, social, relationnel que sur celui de l'affectif ou encore de la sécurité des citoyens. Les œuvres -Des agrandissements holographiques de Nantais, courant pour attraper leur tram à l'heure de pointe, seront proposés par l'artiste anglais, Ricky Pierson

-Une énorme goutte d'eau en suspension au dessus de la ville sera réalisée par l'artiste hongroise, adepte de «l'anti-forme», et pour réaliser cette œuvre extraordinaire, elle travaillera en collaboration avec les unités scientifiques les plus pointues du moment.

-Sirki Pinheiro, l'artiste portugais exalté, se servira de la façade de la faculté de médecine de la ville de Nantes comme d'un écran géant où seront projetées des images d'opérations chirurgicales filmées en direct mais retravaillée par ses soins de «manière organique».

-Le ténébreux artiste espagnol «handicapé dès l'enfance» (mais qui travaille depuis vingt ans sur le thème du «corps en mouvement») fera danser les habitants sur le rebord du toit de l'opéra de la ville, sous forme d'hologrammes.

-La délicate Krips Roniker, d'origine allemande, fera apparaître dans le ciel un immense arc-enciel à l'échelle du paysage qui ne se manifestera pleinement que lorsque l'humeur des habitants sera réellement positive.

-Un autre projet titanesque est confié à un artiste grec, Eros Spinaki, qui imaginera d'occuper un mini gratte-ciel au centre de Nantes en le transformant en une «lampe-aquarium» géante qui va s'animer de l'intérieur de mouvements gluants et colorés à l'image de ces lampes d'ambiance décoratives des années 70. Il évoquera, à son sujet, un «hommage à l'apparition de la vie» et en fera le symbole de «l'identité visuelle de la ville».

Et enfin, la dernière œuvre (ci-contre), c'est celle de Pierrik Sorin et il va en expliquer le fonctionnement : l'œuvre devra être perçue de nuit par des gens qui sont en mouvement dans le tramway ; des mannequins alignés, légèrement différents l'un de l'autre, créeront l'illusion (à la manière du cinéma d'animation) d'une métamorphose d'un homme en femme ou de l'inverse.

Cette œuvre, Nantes, projets d’artistes (qui date de 2000), porte un coup sérieux à la crédibilité de l’art contemporain. (...) Dans cette pièce on rencontre à la fois des artistes ridicules, mégalomanes, délirants, obsédés, imbus d’eux-mêmes, prétentieux, faussement intelligents, des artistes aux goûts douteux ou carrément repoussants, mais on y repère aussi certaines dérives d’un art contemporain qui impose à l’ensemble de la population des goûts et des pratiques qu’elle ne partage ou ne comprend pas. Dans un livre qu’il a publié sur l’artiste, Pierre Giquel rappelle que «Sorin n’a jamais caché sa réticence à l’égard du monde de l’art contemporain. Jugée par lui «élitiste», relevant parfois de la supercherie (…), l’œuvre d’art le rend perplexe. Mais plus encore, le sérieux, la certitude d’un milieu qui le légitime, la prétention à une vérité deviennent les lieux d’une moquerie acerbe que tout aussi bien il s’inflige à lui-même».

Mais cette relation à l'art en général, et à l'art contemporain en particulier, est très généreusement ambivalente chez Pierrick Sorin: (…) “un mouvement contradictoire anime assurément cette œuvre qui se déchire entre l’amour et la dénégation. La construction des films, le traitement de l’image, l’installation des éléments dans l’espace entretiennent une relation subtile avec ce que l’on appelle une œuvre d’art. Même lorsqu’il fustige les prétentions à faire œuvre.» (P. Giquel)

Sites où lire les textes intégraux et visualiser d’autres images

http://espace-holbein.over-blog.org/article-20563616.html http://www2.ac-lyon.fr/enseigne/arts-plastiques/archives/2009/sorin_nantes_2000.pdf

Commande publique de la ville de Nantes

« la ville de Nantes, qui souhaitait faire quelque chose pour les événements du millénaire en rapport avec les Mondes inventés de Jules Verne, m'a contacté. J'ai fait une réponse décalée en proposant un court-métrage qui présente des œuvres au public sous forme de simulations. J'ai dans l'idée de faire un produit qui soit accessible à l'Office du tourisme de Nantes.» Comme le formule Pierrick Sorin, la commande de la ville de Nantes relevait de l'initiative festive (la Mission 2000) et commémorative (Jules Verne, les mondes inventés) destinée à marquer et à ancrer l'entrée de la ville de Nantes dans le troisième millénaire et le paysage européen. Le projet conçu par Sorin, le nantais de souche, vise bien à revisiter, voire à réinventer la ville, son histoire, sa géographie, ses lieux, son humeur pluvieuse (…) La réponse décalée de l'artiste à la commande institutionnelle tricote avec délice mémoires urbaines et simulations délirantes

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