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Fontaine

Note de Recherches : Fontaine. Rechercher de 53 000+ Dissertation Gratuites et Mémoires
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deux animaux sont d'abord présentés dans un milieu naturel, "Dans le courant d'une onde pure" (v.4), plus suggéré que décrit par des détails pittoresques : La Fontaine se sert ici de termes d'une grande simplicité et aux sonorités pleines de douceur, de fluidité... Le décor est réduit au minimum : à la fin de la fable, il est seulement fait mention des "forêts" où le Loup entraîne l'Agneau et qui pourraient figurer les coulisses où, loin du regard des spectateurs et par souci des bienséances, s'accomplissent les actions sanglantes dans les tragédies classiques !

b) La réalité animale

Seule la majuscule à leur nom les caractérise et les distingue, leur donne un statut particulier dans leur espèce. La réalité animale de chacun des deux protagonistes est rappelée par des traits peu nombreux mais qui vont à l'essentiel : pas de description encore une fois, mais le Loup est une bête "cruelle" poussée par "la faim", l'Agneau "tète" sa mère et vit au milieu des "chiens" et des "bergers".

2) Des hommes ?

Ce sont ces quelques caractéristiques animales qui servent à La Fontaine en quelque sorte d'armature pour développer, par les propos que tient chacune, un caractère propre qui correspond à leur apparence et à leur comportement.

a) Le caractère du Loup

Ce sont leurs paroles qui les peignent en profondeur et nous y adhérons d'autant mieux qu'elles correspondent parfaitement à ce que leur aspect et leur comportement animal laissaient attendre. Le Loup se comporte en prédateur, soumis à ses instincts, à sa "faim", à ses pulsions agressives et cruelles : son discours est plein de menaces - "Tu seras châtié" -, d'affirmations sans fondement.

b) Le caractère de l'Agneau

L'Agneau est un être tout d'innocence - ne dit-on pas "doux comme un agneau "? -, de bonne foi et de douceur qui s'exprime sur un ton déférent et respectueux. Le lecteur a d'autant moins de peine à passer du monde animal au monde humain que La Fontaine nous y prépare. Quand l'Agneau s'adresse au Loup comme un modeste sujet à son roi ("Sire","Votre Majesté").La Fontaine nous invite à voir derrière le récit animalier les rapports de force de la société humaine du XVIIe siècle, sous la monarchie absolue de Louis XIV.

c) Une "leçon" morale à portée universelle

Le lecteur du XXIe siècle dépasse ce contexte historique, transpose ce récit dans le monde contemporain : il reconnaît derrière le Loup et l'Agneau des individus qu'il côtoie, élargit la fable à des situations qui dépassent les simples rapports individuels, pour y retrouver le reflet des relations internationales lorsque des superpuissances agressent de petits états dont les richesses naturelles les rendent aussi appétissant qu'un agneau dodu...

Transition

Il s’agit en effet de mettre en évidence l’existence d’un rapport de force et d’illustrer la cruelle réalité de la loi du plus fort qui n’est pas sans rappeler la phrase célèbre de Hobbes « L’homme est un loup pour l’homme ». Elle est mise en scène dans cette fable par le biais d’une argumentation biaisée.

II. L’argumentation biaisée du loup ou la mauvaise foi

En plaçant la morale de la fable en tête de son récit, La Fontaine supprime tout suspense quant à l'issue inéluctable de l'affrontement entre le Loup et l'Agneau. Tout est joué d'avance dans ce "procès" (v.29) truqué. Le narrateur qui se veut objectif annonce implicitement ce qui doit arriver et le Loup déploie des trésors de rhétorique et de mauvaise foi, pour justifier le meurtre de l’agneau.

1) Un narrateur objectif ?

- Le narrateur raconte l’histoire au passé (imparfait vs passé simple = temps du récit) + emploi du présent de narration (« survient », v.5) pour mettre une action en évidence + présent de vérité générale pour la morale (v.1)

- Veut paraître objectif : « nous l’allons montrer ». Il annonce une démonstration logique.

- Logique biaisée d’emblée par le double sens des trois expressions « raison », « le plus fort », « la meilleure » (A expliquer)

- Narrateur en fait omniscient qui sait que le loup a faim et qui le présente comme « un animal plein de rage » (v.8), « une bête cruelle » (v.18)

( La voix du narrateur nous prépare au dénouement de l’histoire et à la mauvaise foi du loup.

2) Argumentation du loup : des arguments matériels

C'est d'abord un fait matériel qu'il reproche à l'Agneau : "troubler [son] breuvage" (v.7). Le chef d'accusation est présenté dans son évidence et c'est sur les circonstances annexes du crime – le caractère de l’accusé - que porte l'interrogatoire : "Qui te rend si hardi [...] ", « ta témérité ». L’agneau est jugé d’emblée et c’est de mauvaise foi (Un agneau n’est pas caractérisé par son courage). Le Loup n'attend pas la réponse de l'Agneau : il l'a déjà condamné sans appel, comme le marque le futur : "Tu seras châtié"(v.9).

L'accusation conciliante de l'Agneau et les arguments matériels irréfutables qu'il oppose sont balayés par le Loup qui nie l'évidence, comme s'il n'avait pas entendu la justification de l'Agneau : il reprend, mais sous une forme plus ramassée et plus hargneuse - en trois mots : "Tu la troubles" -, son accusation du vers 7.

3) Des affirmations fausses et calomnieuses

Puis le loup quitte le domaine des préjudices matériels qu'il prétend subir ici et maintenant pour lancer une autre accusation.

Elle est formulée d'une façon toujours aussi catégorique par un péremptoire "je sais" mais le Loup n'apporte pas la moindre justification à son affirmation ; il quitte désormais le domaine des faits et du présent pour invoquer de prétendues assertions calomnieuses ("tu médis")proférées dans le "passé" (v.19). C'est donc ici un délit d'opinion qui est reproché à l'Agneau.

4) Une conspiration anti-Loup

Les dénégations de l'Agneau ne décontenancent pas le Loup. Il n'abandonne pas le chef d'accusation mais en modifie les circonstances : l'Agneau devient ici, avec ses semblables, l'instigateur d'une conspiration anti-Loup (la conspiration, c'est l'obsession de tous les pouvoirs tyranniques...) dans un drôle de monde à l'envers réinventé par le Loup où les agneaux et les moutons règneraient sur un peuple de "bergers" et de "chiens" - c'est ce que sous-entend la reprise du possessif "vos" du vers 25... Mais il ne révèle pas ses sources: il se contente d'une formule indéfinie ("on me l'a dit"). Ce « on » qui ne désigne personne mais conclue l’argumentation du loup marque bien la fausseté d’une logique néanmoins présentée comme implacable et marquée par la succession serrée de liens logiques aux vers 22, 23 et 24 : « donc », « donc », « car ».

Les hypothèses et les rectifications successives que le Loup s'obstine à apporter ("ton frère", "quelqu'un des tiens" ou un membre du prétendu pacte anti-Loup, "vous, vos bergers et vos chiens") ne sont pas le signe que le Loup est aux abois (menacé) - loin de là. La résistance inouïe de l’agneau l'exaspère et ne fait que renforcer son désir d'en finir avec lui. On remarque que c'est lorsque ses accusations sont le plus dénuées de fondement qu'il

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