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Michel Butor, 1Er Mai Analyse

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yant apparemment aucune incertitude vu l'ampleur des précisions faites, lui même dit qu'il revoit « tout cela très clairement », ou qu'il pourrait retrouver avec « exactitude absolue » la place qu'il occupait dans le wagon (p.10). L'extrait débute par « Les lueurs se sont multipliées » (p.9). En utilisant cette expression, Michel Butor laisse entendre une arrivée dans un monde obscure, sombrement éclairé dans lequel il se réveille. Ce ne sont que des lueurs, de faibles éclairages dans la pénombre qui se multiplient. Mais les lueurs ne peuvent éclairer un monde sombre, même réverbérées par une « myriade de petits miroirs » faite de gouttes de pluie. Cet impression de rentrer dans un nouveau monde est accentuée par « C'est à ce moment que je suis entré […] (p.9) ». Le personnage arrive donc dans un monde qui lui est étranger, et ces propos sont retranscrit par l'utilisation incontestables du champs lexical de l'obscur. Nous pouvons apercevoir dans le premier paragraphe des mots tels que « seul », « vitre noire », « grain tremblant », « lumière insuffisante », « plafonnier sali », « couverture de bruit ». Il y a réellement une atmosphère créée par ces mots dès le premier paragraphe, atmosphère qui est précisée au second paragraphe, où l'on nous présente des matières peu nobles, comme la « tôle émaillée » ou les « piliers de fonte ». Tout laisse présager un séjour pénible pour le narrateur-personnage, jusqu'au détail de la poignet de sa valise cédant à la « Bleston Hamilton Station », la valise étant un vestige de l'ancien monde. Cependant, ce ne sont que des signes visibles de la ville, des signes pouvant être influencés par la nuit, l'humidité et l'obscurité, donnant un air lugubre au lieu. C'est alors qu'intervient la matière âcre de la ville, lorsque le narrateur-personnage prend une « longue inspiration » (p.10) et que l'air lui paraît « amer, acide, charbonneux, lourd comme si un grain de limaille lestait chaque gouttelette de son brouillard » (p.11). Cet air révèle ce qu'est cette ville : un enfer. Un enfer auquel le '' héros '' du roman est « condamné pour tout un an ». Cette ville lui apparait donc comme sale, lugubre, sournoise, pesante, envahissante. Il sait qu'il ne peut faire demi-tour, car « un immense fossé me séparait des événements de la matinées et des visages qui m'étaient le plus familiers […] et que son autre rive, incroyablement lointaine, ne m’apparaissait plus que comme une ligne d'horizon [...] ». Cette référence entre deux rives, rapprochée à l'idée d'arrivée dans un monde infernal, peut faire allusion au mythe de l'Achéron, sur laquelle Charon transportait en barque les âmes des défunts vers les Enfers.

Tout ce changement autour du narrateur-personnage provoque en lui différentes réactions, la première étant de questionner ses narines et sa langue pour savoir de quoi est fait cet air. Mais nous allons voir que ce héros est atteint dès son arrivée dans la ville, le troublant jusque dans ses sens.

Les sens du narrateur-personnage sont mis à l'épreuve lors de ce changement catégorique de lieu de vie, passant d'un sol connu à un « nouveau sol » (p.10). Tout d'abord, par le héros lui même lorsqu'il dit sentir un peu de vent frôlant les ailes de son nez et ses joues, un peu de vent au poil âpre et gluant (p.11). Suivi de l'interrogation à ses narines et sa langue, pour savoir de quoi cet air si désagréable, « amer, acide, charbonneux et lourd » est fait. L'atmosphère n'est plus une atmosphère de nuit allant s'estomper le matin venu, une atmosphère éphémère. Toute l'essence même de Bleston est faite de « ces vapeurs sournoises qui depuis 7 mois (l')asphyxient »(p.11), le plongeant dans un terrible « engourdissement » mental. Nous pouvons relever le fait qu'il se soit tromper de train, l'emmenant à errer à Bleston là où on ne l'attend pas, dans l'espoir d'avoir un convoi postal de rattrapage vers la gare initialement prévue. Ce monde trouble le narrateur dès le début, il l'engourdi et il le sait. Il parle « d’obscurcissement de moi même », nous sommes prévenus que cette ville de Bleston l'infiltre de toute part, allant jusqu'à modifier sa perception des choses. Ses sens sont touchés dès son arrivée, le vent est « au poil âpre et gluant comme celui d'une couverture de laine humide», ses sens ne perçoivent plus le vent comme il est perçu habituellement, mais comme quelque chose de lourd, mettant en avant un trouble dans sa perception. La description de l'air en est un autre exemple, puisqu'il y a un déplacement de perception olfactive vers une perception gustative, passant de l'odeur au goût alors qu'il prend une respiration profonde. La « couverture de laine humide » (p.11) fait référence à « l'épaisse couverture de bruit »(p.9), qui est chronologiquement la matérialisation d'un bruit, puis la matérialisation du vent . Il y a ici la notion de synesthésie, qui est présente lorsqu’on fait appel, pour définir une perception, à un terme normalement réservé à des sensations d’ordre différent. Ce mélange de sensation fait peur, « j'ai été soudain pris de peur » (p.11) au personnage-narrateur qui perd pied en pensant repartir à son point de départ, pensant à tout ces visages lui paraissant au fond déjà si lointain. Il n'a donc aucune issue, il est piégé dans une ville le perdant dans lui même. Nous avons déjà parlé de la mémoire du narrateur-personnage, qui se trouve être excellente et rappelée par de nombreuses expressions comme « Je me souviens », « je pourrais retrouver avec une exacte certitude », « je revois très clairement », mais il est évident qu'au fur et à mesure de l’œuvre celle-ci en soit aussi atteinte.

Toute ce brouillard embrumant la tête du narrateur-personnage semble pourtant s'être dissout au septième mois de souffrance à Bleston, celui ci suivant la voie de l'écriture pour lutter contre la ville, devenant son espoir pour survivre.

Nous avons vu que cette ville où apparaît le protagoniste est une ville étouffante, sale, mais aussi une ville lui rendant toute tentative d'évasion impossible. Cependant, à ce brouillard lui embrumant le regard et l'empêchant de saisir de l'essentiel au plus complexe, il semble trouver une solution : L'écriture. Nous pouvons voir que l'utilisation de l'imparfait, avec par exemple « Il n'y avait que trois ou quatre voyageurs » (p.9) et du passé composé avec « Les lueurs se sont multipliées » (p.9) donne un certain relief au récit. L'imparfait est régulièrement utilisé pour les descriptions, ce dont le narrateur est capable de faire jusque dans les moindres détails grâce à son excellente mémoire jusque là intacte. En annonçant que c'est « à ce moment là que je suis rentré », nous avons un regard rétrospectif sur quelque chose ayant eu lieu. Il y a une multitude de rappel concernant le temps écoulé avec par exemple « cette année dont plus de la moitié s'est écoulée », « je revois tout très clairement » ou bien encore « Je m'en souviens ». Le temps tient réellement une place importante, puisque nous pouvons lire qu'à sa sortie du train, il se trouvait en face d'une grande horloge affichant deux heures (p.10). Le passé composé informe d'une chose terminée dans le temps mais en rapport au présent. Cela donne un effet de passé proche, alors que l'histoire se déroule sept mois avant l'écriture, ce qui donne une certaine incohérence au récit. Cette écriture n'a de sens que pour retracer les actions

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