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Corpus Antigone

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que je le suis ? Misérable ! tu ne mérites pas de vivre.

ARLEQUIN - Doucement; tes forces sont bien diminuées, car je ne t'obéis plus, prends-y garde.

SCENE 2 [2]

Trivelin, avec cinq ou six insulaires, arrive, conduisant une Dame et la suivante, et ils accourent à Iphicrate qu'ils voient l'épée à la main.

TRIVELIN, faisant saisir et désarmer Iphicrate par ses gens. - Arrêtez, que voulez-vous faire ?

IPHICRATE - Punir l'insolence de mon esclave.

TRIVELIN - Votre esclave ! vous vous trompez, et l'on vous apprendra à corriger vos termes. (Il prend l'épée d'Iphicrate et la donne à Arlequin.) Prenez cette épée, mon camarade ; elle est à vous.

ARLEQUIN- Que le ciel vous tienne gaillard, brave camarade que vous êtes !

TRIVELIN- Comment vous appelez-vous ?

ARLEQUIN- Est-ce mon nom que vous demandez ?

TRIVELIN - Oui vraiment.

ARLEQUIN- Je n'en ai point, mon camarade.

TRIVELIN.- Quoi donc, vous n'en avez pas ?

ARLEQUIN - Non, mon camarade ; je n'ai que des sobriquets qu'il m'a donnés ; il m'appelle quelquefois Arlequin, quelquefois Hé.

TRIVELIN - Hé ! le terme est sans façon ; je reconnais ces Messieurs à de pareilles licences. Et lui, comment s'appelle-t-il ?

ARLEQUIN - Oh, diantre ! il s'appelle par un nom, lui ; c'est le seigneur Iphicrate.

[…]

Marivaux, L’île des esclaves, 1 & 2, 1725.

TEXTE B

Œdipe a eu deux fils, Étéocle et Polynice, ainsi que deux filles, Antigone et Ismène. À sa mort ses deux fils se sont entretués pour prendre le pouvoir. Leur oncle, Créon, refuse d'enterrer Polynice qu'il considère comme un traître. Antigone décide de lui rendre malgré tout les honneurs funèbres. Ismène tente de l'en dissuader

ISMÈNE. - Tu sais, j'ai bien pensé, Antigone.

ANTIGONE. - Oui.

ISMÈNE. - J'ai bien pensé toute la nuit. Tu es folle.

ANTIGONE. - Oui.

ISMÈNE. - Nous ne pouvons pas.

ANTIGONE, après un silence, de sa petite voix. - Pourquoi?

ISMÈNE. - Il[3] nous ferait mourir.

ANTIGONE. - Bien sûr. A chacun son rôle. Lui, il doit nous faire mourir, et nous, nous devons aller enterrer notre frère. C'est comme cela que ç'a été distribué. Qu'est-ce que tu veux que nous y

Fassions ?

ISMÈNE. - Je ne veux pas mourir.

ANTIGONE, doucement. - Moi aussi j'aurais bien voulu ne pas mourir.

ISMÈNE. - Écoute, j'ai bien réfléchi toute la nuit. Je suis l'aînée. Je réfléchis plus que toi. Toi, c'est ce qui te passe par la tête tout de suite, et tant pis si c'est une bêtise. Moi, je suis plus pondérée. Je réfléchis.

ANTIGONE. - Il y a des fois où il ne faut pas trop réfléchir.

ISMÈNE. - Si, Antigone. D'abord c'est horrible, bien sûr, et j'ai pitié moi aussi de mon frère, mais je comprends un peu notre oncle.

ANTIGONE. - Moi je ne veux pas comprendre un peu.

ISMÈNE. - Il est le roi, il faut qu'il donne l'exemple.

ANTIGONE. - Moi, je ne suis pas le roi. Il ne faut pas que je donne l'exemple, moi... Ce qui lui passe par la tête, la petite Antigone, la sale bête, l'entêtée, la mauvaise, et puis on la met dans un

coin ou dans un trou. Et c'est bien fait pour elle. Elle n'avait qu'à ne pas désobéir !

ISMÈNE. - Allez! Allez !... Tes sourcils joints, ton regard droit devant toi et te voilà lancée sans écouter personne. Écoute-moi. J'ai raison plus souvent que toi.

ANTIGONE. - Je ne veux pas avoir raison.

ISMÈNE. - Essaie de comprendre au moins !

ANTIGONE. - Comprendre... Vous n'avez que ce mot-là dans la bouche, tous, depuis que je suis toute petite. Il fallait comprendre qu'on ne peut pas toucher à l'eau, à la belle eau fuyante et froide

parce que cela mouille les dalles, à la terre parce que cela tache les robes. Il fallait comprendre qu'on ne doit pas manger tout à la fois, donner tout ce qu'on a dans ses poches au mendiant qu'on rencontre, courir, courir dans le vent jusqu'à ce qu'on tombe par terre et boire quand on a chaud et se baigner quand il est trop tôt ou trop tard, mais pas juste quand on en a envie ! Comprendre. Toujours comprendre. Moi, je ne veux pas comprendre. Je comprendrai quand je serai vieille. (Elle achève doucement.) Si je deviens vieille. Pas maintenant.

Jean Anouilh, Antigone, 194

TEXTE C

Hugo, jeune communiste idéaliste, est .devenu secrétaire de Hœderer, dirigeant du parti considéré par certains comme trop modéré. Hugo a pour mission de le tuer, et Hœderer l’a compris.

HŒDERER. - De toute façon, tu ne pourrais pas faire un tueur. C'est une affaire de vocation.

HUGO. - N'importe qui peut tuer si le Parti le commande.

HŒDERER. - Si le Parti te commandait de danser sur une corde raide, tu crois que tu pourrais y arriver ? On est tueur de naissance. Toi, tu réfléchis trop : tu ne pourrais pas.

HUGO. - Je pourrais si je l'avais décidé.

HŒDERER. - Tu pourrais me descendre froidement d'une balle entre les deux yeux parce que je ne suis pas de ton avis sur la politique?

HUGO. - Oui, si je l'avais décidé ou si le Parti me l'avait commandé.

HŒDERER. - Tu m'étonnes. (Hugo va pour plonger la main dans sa poche mais Hœderer la lui saisit et l’élève légèrement au-dessus de la table.) Suppose que cette main tienne une arme et que ce doigt-là soit posé sur la gâchette...

HUGO. - Lâchez ma main.

HŒDERER, sans le lâcher. - Suppose que je sois devant toi, exactement comme je suis et que tu me vises...

HUGO. - Lâchez-moi et travaillons.

HŒDERER. - Tu me regardes et au moment de tirer, voilà que tu penses : « Si c'était lui qui avait raison ? » Tu te rends compte ?

HUGO. - Je n'y penserais pas. Je ne penserais à rien d'autre qu'à tuer.

HŒDERER. - Tu y penserais : un intellectuel, il faut que ça pense. Avant même de presser sur la gâchette tu aurais déjà vu toutes les conséquences possibles de ton acte : tout le travail d'une vie en ruine, une politique flanquée par terre, personne pour me remplacer, le Parti condamné peut-être à ne jamais prendre le pouvoir...

HUGO. - Je vous dis que je n'y penserais pas !

HŒDERER. - Tu ne pourrais pas t'en empêcher. Et ça vaudrait mieux parce que, tel que tu es fait, si tu n'y pensais pas avant, tu n'aurais pas trop de toute ta vie pour y penser après. (Un temps.) Quelle rage avez-vous tous de jouer aux tueurs ? Ce sont des types sans imagination : ça leur est égal de donner la mort parce qu'ils n'ont aucune idée de ce que c'est que la vie. Je préfère les gens qui ont peur de la mort des autres : c'est la preuve qu'ils savent vivre.

HUGO. - Je ne suis pas fait pour vivre, je ne sais pas ce que c'est que la vie et je n'ai pas besoin de le savoir. Je suis de trop, je n'ai pas ma place et je gêne tout le monde ; personne ne m'aime, personne ne me fait confiance.

HŒDERER. - Moi, je te fais confiance.

HUGO. - Vous?

HŒDERER. - Bien sûr. Tu es un môme qui a de la peine à passer à l'âge d'homme mais tu feras un homme très acceptable si quelqu'un te facilite le passage. Si j'échappe à leurs pétards et à leurs bombes, je te garderai près de moi et je t'aiderai.

Jean-Paul Sartre, Les Mains sales, 1947.

TEXTE D

Pendant la guerre d'Algérie, Mathilde revient en France avec son fils Édouard dans l'intention de récupérer la maison familiale et de régler des comptes.

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