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L Illusion Comique

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multiplie les niveaux de représentation :

le premier niveau est celui de la pièce complète avec son lot d’inquiétudes, de nœuds et de dénouements.

le deuxième est celui de la scène entre Alcandre et Pridamant, à la fois personnages et spectateurs de ce qui se déroule devant eux.

le troisième est celui des jeunes gens, Clindor et Isabelle, et de leurs aventures.

le quatrième est celui de la tragédie de l'acte V.

Le théâtre du monde

La structure complexe de la pièce, basée sur des enchâssements successifs (théâtre dans le théâtre) et un jeu d’apparences trompeuses (la fausse mort de Clindor), a pour but d’égarer le spectateur. Le jeu des illusions s’inscrit dans l’idée baroque selon laquelle la vie est un théâtre et on voit dans cette pièce comment Corneille exploite cette idée lorsque se confondent la vraie vie de Clindor et le rôle qu’il joue. Le déguisement, le changement d’identité sont autant de marques de l’imprégnation baroque sur cette pièce. L’homme devient un véritable Protée. La grotte peut également être interprétée comme une métaphore du théâtre avec sa scène et ses spectateurs. Des éléments en ce sens apparaissent dès la première tirade de Dorante.

L’instabilité du monde

La linéarité de l’histoire est plusieurs fois brisée, de nombreuses digressions viennent briser des actions qui s’entrecroisent et peuvent rester inachevées (Matamore retrouvé après plusieurs jours). L’histoire principale est enlacée par des histoires secondaires. Cette inconstance de la diégèse est renforcée par l’inconstance amoureuse des personnages (éloge de l’infidélité par Clindor : V, 3). Cette instabilité confine même au tourbillon sur la fin de la pièce lorsque Pridamant et le lecteur avec lui ne savent plus ce qui ressort de la réalité ou de la fiction.

Transgression de la règle des trois unités ?

On pourrait croire que les unités classiques sont transgressées :

l’enchevêtrement des intrigues brise l’unité d’action ;

deux années s’écoulent entre la fin de l’acte IV et le début de l’acte V ce qui est inconciliable avec l’unité de temps (qui est de 24h) ;

l’unité de lieu est également mise à mal puisque l’acte I s’ouvre dans la grotte d’Alcandre (en Touraine), les trois actes suivants se passent à Bordeaux, tandis que le dernier a lieu à Paris.

On pourrait donc penser que nous sommes bien éloignés des préceptes du théâtre classique qui privilégie une intrigue unique se déroulant en une seule journée dans un espace intérieur mais Corneille déjoue cette transgression qui, si elle était véritable, pourrait rendre sa pièce non valable en faisant tout se passer dans la grotte d’Alcandre, en seulement quelques heures. De sorte que, considérée de l’avant-scène - le seuil de la grotte d’Alcandre où se tient Pridamant -, la pièce se situe bien dans un lieu unique ; elle ne dure pas plus que la représentation elle-même ; enfin son action se concentre sur la vision de Pridamant et la « réforme » qu’Alcandre produit sur lui au sujet de sa propre illusion et des préjugés qu’il avait sur la « comédie » : les lois du théâtre classique sont donc présentes comme une enveloppe ; elles enchâssent le théâtre baroque dans une bulle chatoyante mais qui ne donne néanmoins à voir que des « spectres ». Ce respect mitigé et paradoxal des règles classiques est expliqué par le fait que l’œuvre est créée pendant une période de transition, entre baroque et classicisme. Il n’est pas impossible d’y voir à la fois un hommage au théâtre baroque et une féroce satire de celui-ci. On incitera par la suite Corneille à se conformer aux normes du mouvement émergent, bien que lui-même dise considérer L’Illusion comique comme un « caprice », un « estrange monstre »

Échos tragiques, éléments de classicisme

Bien que cette pièce relève principalement du théâtre baroque, certains passages sont teintés d’une couleur fortement tragique qui n’est pas sans laisser entrevoir les grandes tragédies classiques qui naîtront par la suite. Malgré la légèreté des intrigues amoureuses, le thème de la mort se retrouve en effet à plusieurs reprises. Il y a, bien sûr, la fausse mort de Clindor qui vient, un instant, plonger la pièce dans une atmosphère tragique. Cet événement vient plonger le spectateur dans des sentiments mêlés de Terreur et de Pitié (incarnés dans le personnage de Pridamant). Lorsque l’on se rappelle que ce sont là les deux grandes émotions théâtrales selon Aristote, on devine aisément ce que cet épisode contient de classicisme en germes. Cependant les passages les plus marquants de cette thématique sont incontestablement les monologues d’Isabelle (IV, 1) et de Clindor (IV, 7). Désespérée par le « jugement inique » qui condamne « un pauvre inconnu » pour son « feu légitime », Isabelle envisage sa propre mort en héroïne tragique et déclare : « Je veux perdre la vie en perdant mon amour ». Mais elle ne se contente pas de vouloir suivre Clindor dans la mort, elle se met à espérer que son trépas entraînera le désespoir de son « père inhumain ». Clindor, quant à lui, expie ses frivolités passées en accédant au statut de héros tragique au cours de son monologue. Il convoque à lui les souvenirs d’Isabelle afin de surmonter l’épreuve de la mort et s’en trouve transfiguré : « Je meurs trop glorieux, puisque je meurs pour vous ! ». Pendant un instant, il semble retomber dans la peur de la mort et dans le désespoir ("la peur de la mort me fait déjà mourir"). Au cours d’une longue hypotypose ("Je vois le lieu fatal où ma mort se prépare"), il vit en imagination son supplice. Mais c’est encore l’image d’Isabelle qui vient effacer cette macabre vision. L’amour lui permet donc de dépasser la pensée et la peur de la mort.

Mélange des genres théâtraux

La commedia dell’arte

La commedia dell'arte constitue la source principale du renouveau dramatique au XVIIe siècle, en synthétisant à la fois la tradition populaire et les recherches esthétiques menées dans les académies de la Renaissance en Italie. La commedia se fonde sur la virtuosité verbale et physique de l’acteur, sans passer par un texte commun à tous ; chacun compose son rôle à partir de fragments (de la phrase à une scène entière) propre à son personnage, qui garde ses caractéristiques d’une pièce à l’autre – les « types fixes » comme Arlequin, Colombine, Pantalon, le Docteur, dont certains portent un masque et un costume distinctif. Le personnage de Matamore et ses « rodomontades » sont directement empruntés à cette tradition (ils remontent d’ailleurs au théâtre antique), de même

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