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Le Personnage De Roman, Du Xviie Siècle À Nos Jours

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stème des personnages

Personnage et société

DISSERTATIONS

Vie et destin du personnage

Mort du personnage ?

Le personnage médiocre

I - L'étude du personnage

I. La caractérisation du personnage

Quelles que soient les formes prises par le roman, le personnage en est le pivot central : il est le moteur de la fiction, et c'est avec lui que l'on mesure le degré de vraisemblance et d'authenticité qu'il faut lui accorder. La caractérisation du personnage peut être explicite (le narrateur indique les marques de l'état-civil qui fixent les distinctions sexuelles et sociales, il brosse les portraits ou analyse les ressorts psychologiques qui dépeignent un caractère), mais elle est plus souvent implicite : les connotations attachées aux noms mêmes, les combinaisons narratives, les discours et les relations sociales complètent indirectement notre connaissance du personnage.

La désignation :

Démiurge, le romancier est attentif à la vraisemblance du monde qu'il a créé. Ainsi Balzac souhaitait « faire concurrence à l'état-civil » et la puissance de son imagination anime un univers semblable au nôtre. Dans cette entreprise de "mimèse" du réel, un personnage « existe » par des indices explicites, relativement faciles à identifier, ceux que fournit d'abord son nom.

Associé éventuellement à un prénom, le nom du personnage signale en effet l'écart qui sépare la création romanesque de la vie réelle. Car si, dans celle-ci, un jeune homme fin et racé peut s'appeler Marcel Bouffartigue (par exemple !), il ne saurait en être question dans le roman : ici le nom résulte d'un choix concerté. Ce sera donc Raphaël de Valentin (par exemple !). Le nom du personnage ne doit pas jurer en effet avec les qualités ou les défauts qu'on lui prête, il peut au contraire les signaler de manière explicite :

Quelles vertus ou vices attendre d'un personnage qui se nomme :

Sylvestre Bonnard - Georges Duroi - Solal - Hauteclaire ?

A l'inverse, commenter les noms suivants, qui sont des antiphrases :

Lheureux (un colporteur fourbe et avide) - Lennie Small (un colosse arriéré) - Hercule Poirot (un détective)

Le nom du personnage livre aussi quelques informations : il trahit une origine sociale (cf. Manon Lescaut, Félix de Vandenesse, Octave Mouret, Angelo Pardi), ou, de manière implicite, signale une profession voire un caractère. Les connotations doivent ici être étudiées de près. Pourquoi, par exemple, voulant dénommer une mère ou une marâtre cruelle et tyrannique, la comtesse de Ségur, Jules Renard et Hervé Bazin aboutissent-ils, chacun de leur côté, à des noms aux sonorités agressives ou chuintantes : Mme Lepic, Mme Mac Miche, Folcoche ?

A partir des connotations engendrées par chacun des noms suivants, imaginez et décrivez, physiquement et moralement, le personnage qui le porte :

chez Rabelais : Touquedillon - Badiguoincier - Picrochole, Panurge, Epistémon (penser à l'étymologie)

Balzac : Lucien de Rubempré - Eugène de Rastignac - Gobseck (un usurier avide) - Vautrin (un ancien bagnard)

Dumas : Grimaud, Planchet, Bazin, Mousqueton (les valets des mousquetaires)

Hugo : Javert (inspecteur de police) - Phébus (capitaine de cavalerie)

Zola : Lisa Quenu (charcutière) - Goujet (ouvrier forgeron) - Saccard (banquier)

Proust : Elstir (peintre) - Vinteuil (musicien) - Bergotte (écrivain).

Les modes de présentation :

Le romancier donne au personnage une identité qu'il souhaite rendre crédible et significative. La description est ici un moyen privilégié de caractérisation explicite : le point de vue omniscient permet de dévoiler le passé du personnage, de révéler ses pensées, en somme d'organiser un portrait détaillé

- sur le plan physique : le personnage est solidement campé dans un corps avec ses traits caractéristiques, choisis pour le pittoresque mais aussi en fonction de détails particuliers susceptibles de suggérer des traits psychologiques (ainsi les personnages de Balzac);

- sur le plan moral : le romancier s'attache à l'expression des sentiments, s'intéresse à leurs manifestations extérieures (larmes, sourires, gestes significatifs). Le caractère du personnage peut le situer en individu particulier, voire le signaler comme un héros d'exception; il peut au contraire faire de lui un simple exemplaire d'une espèce sociale (cf. les employés chez Balzac);

- sur le plan social : le personnage reflète un milieu par ses vêtements, sa profession, son langage, son idéologie (les personnages de Zola ou Balzac sont parfois de simples exemplaires des milieux sociaux systématiquement décrits dans leur entreprise réaliste). Il devient ainsi un type (« Un type [...] est un personnage qui résume en lui-même les traits caractéristiques de tous ceux qui lui ressemblent plus ou moins, il est le modèle du genre », dit Balzac dans sa préface d'Une ténébreuse affaire), voire un mythe (la Carmen de Mérimée).

Le personnage peut encore être cerné par le truchement d'une caractérisation implicite : il se révèle en effet au lecteur par ce qu'il fait (actions, comportement) et par la façon dont il agit (mimiques, gestes, apparaissant notamment dans les incises du dialogue). Il peut encore se révéler à nous par ce qu'il dit (vocabulaire, niveau de langue, teneur du discours), voire par un objet qui lui appartient ou par un lieu qui lui est coutumier (voyez notre analyse de la description de la salle à manger de la pension Vauquer dans Le Père Goriot de Balzac). Le point de vue des autres personnages contribue de même à sa caractérisation.

Flaubert, Madame Bovary (1857)

Un personnage peut être caractérisé par...

... un objet :

[La casquette de Charles, au début du roman, préfigure la balourdise et la médiocrité du personnage.]

C'était une de ces coiffures d'ordre composite, où l'on retrouve les éléments du bonnet à poil, du chapska, du chapeau rond, de la casquette de loutre et du bonnet de coton, une de ces pauvres choses, enfin, dont la laideur muette a des profondeurs d'expression comme le visage d'un imbécile. Ovoïde et renflée de baleines, elle commençait par trois boudins circulaires; puis s'alternaient, séparés par une bande rouge, des losanges de velours et de poil de lapin ; venait ensuite une façon de sac qui se terminait par un polygone cartonné, couvert d'une broderie en soutache compliquée, et d'où pendait, au bout d'un long cordon trop mince, un petit croisillon de fils d'or en manière de gland. (I,1)

... ou son discours :

[Le pédantisme ampoulé du pharmacien Homais signale sa bêtise satisfaite.]

Ah ! vous trouverez bien des préjugés à combattre, monsieur Bovary; bien des entêtements de la routine, où se heurteront quotidiennement tous les efforts de votre science; car on a recours encore aux neuvaines, aux reliques, au curé, plutôt que de venir naturellement chez le médecin ou chez le pharmacien. Le climat, pourtant, n'est point, à vrai dire, mauvais, et même nous comptons dans la commune quelques nonagénaires. Le thermomètre (j'en ai fait les observations) descend en hiver jusqu'à quatre degrés, et, dans la forte saison, touche vingt-cinq, trente centigrades tout au plus, ce qui nous donne vingt-quatre Réaumur au maximum, ou autrement cinquante-quatre Fahrenheit (mesure anglaise), pas davantage ! - et, en effet, nous sommes abrités des vents du nord par la forêt d'Argueil d'une part, des vents d'ouest par la côte Saint-Jean de l'autre; et cette chaleur, cependant, qui à cause de la vapeur d'eau dégagée par la rivière et la présence considérable de bestiaux dans les prairies, lesquels exhalent, comme vous savez, beaucoup d'ammoniaque, c'est-à-dire azote, hydrogène et oxygène (non, azote et hydrogène seulement), et qui, pompant à elle l'humus de la terre, confondant toutes ces émanations différentes, les réunissant en un faisceau, pour ainsi dire, et se combinant de soi-même avec l'électricité répandue dans l'atmosphère, lorsqu'il y en a, pourrait à la longue, comme dans les pays tropicaux, engendrer des miasmes insalubres, - cette chaleur, dis-je, se trouve justement tempérée du côté

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