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Protection Juridique Du Personnel Humanitaire

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itique surtout. Certes, aux lendemains de la deuxième guerre mondiale, les alliés ont voulu affirmer leur volonté de juger et de châtier les criminels de guerre après la victoire, en mettant en place le Tribunal militaire international de Nuremberg par l’accord de Londres du 8 août 1945 et le Tribunal international pour l’extrême Orient, dit Tribunal de Tokyo, par une déclaration du Commandant suprême des Forces Alliées du 19 janvier 1946. Les dirigeants nazis seront déférés au Tribunal de Nuremberg, tandis qu’au Tribunal de Tokyo, ce sont vingt-huit personnalités japonaises considérées comme les principaux responsables du conflit que les Etats-Unis ont choisi de juger dans leur pays. La création de ces tribunaux a certainement constitué une étape essentielle dans la prise de conscience de la nécessité d’un tribunal pénal international pour juger les auteurs de crimes contre l’humanité. De même, elle a dessiné les fondements du droit pénal international moderne en dotant celui-ci, pour la première fois, d’une définition des crimes

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internationaux. L’on doit cependant admettre que les tribunaux de Nuremberg et de Tokyo ne caractérisent pas le début d’un véritable système pénal international, certainement parce qu’ils n’avaient pas été conçus dans cette perspective, mais sans doute aussi parce qu’ils symboliseront « une justice rétroactive appliquée par les vainqueurs ». Ainsi, lorsque surgissent les massacres ethniques en ex-Yougoslavie au début des années 90 et le génocide du Rwanda en 1994, le système juridictionnel international n’est doté d’aucun mécanisme particulier pour poursuivre et juger les responsables de tels actes. En clair, la répression pénale des crimes les plus odieux ne fait pas partie du système de protection des droits de l’homme créé par les Nations Unies. Les Traités en la matière, à l’exception des Conventions sur le Génocide, sur la Torture et sur l’Apartheid, n’envisageaient pas de sanctions pénales pour les auteurs des atteintes aux droits de l’homme. Et l’absence d’application véritable de la Convention sur le Génocide par exemple, qui ne peut s’expliquer seulement par l’absence de tribunal international, démontre qu’il y a peu à attendre d’autorités purement nationales pour réprimer un crime qui ne peut guère se réaliser sans leur participation, au moins indirecte. A l’évidence, la répression efficace des crimes internationaux ne peut être qu’internationale. Pour nous circonscrire au cas de l’Afrique, la création du Tribunal Pénal International pour le Rwanda résulte des termes de la résolution 955 du Conseil de Sécurité des Nations Unies prise le 8 novembre 19941. En étant chargé de « juger les personnes présumées responsables d’actes de génocide ou d’autres violations du droit humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de violations commises sur le territoire d’Etats voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 », le Tribunal Pénal International pour le Rwanda fait face à un défi exceptionnel : restaurer l’Etat de droit dans un pays ravagé par la guerre. La fin de l’horrible guerre civile que mena le Libéria de Charles Taylor en Sierra Léone de mars 1991 à janvier 1992 inspirera naturellement une solution similaire. En effet, le Conseil de sécurité des Nations Unies, saisi d’une requête du Président Ahmad Tejan Kabbah et se déclarant « profondément préoccupé par les crimes très graves commis sur le territoire de la Sierra Leone contre la population civile et des membres du personnel des N-U (…), ainsi que par le climat d’impunité qui y règne », a adopté la résolution 1315 (2000) du 14 août 2000 donnant mandat au Secrétaire général de « négocier un accord avec le Gouvernement sierra-leonais en vue de créer un tribunal spécial indépendant », afin de poursuivre les principaux responsables de ces crimes. Cet « Accord entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement sierra-léonais sur la création d’un Tribunal Spécial pour la Sierra Leone » a été signé le 16 janvier 2002. Si leurs limites objectives interdisent au Tribunal Pénal International pour le Rwanda et au Tribunal Spécial pour la Sierra Leone d’avoir une portée plus grande (leur mandat, comme celui du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie, est limité tant en matière territoriale que temporelle), l’existence de ces tribunaux a le mérite de permettre l’identification de certains aspects du défi auquel fait ou ferait face tout tribunal de ce type, après des évènements de même genre et que les lois et traités actuels qualifient de crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou génocide. Elle a surtout le grand mérite de poser les bases d’un système pénal international jusqu’alors inexistant. Mais c’est davantage à la Cour Pénale Internationale que la communauté internationale semble avoir confié la mission d’inventer un modèle de justice pénale universelle. En effet, à la différence des Tribunaux pénaux qui la précèdent, la Cour Pénale Internationale, instituée par le Statut de Rome du 17 juillet 1998 et installée à la Haye, est un organe juridictionnel permanent, compétent dans l’hypothèse de carence d’un Etat pour sanctionner les auteurs de « crimes graves touchant l’ensemble de la communauté internationale et de nature à compromettre la paix de l’ensemble du

Le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie, lui, est créé par la résolution 827 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

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monde », soit le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes d’agression. Elle est donc conçue comme un complément de la justice pénale des Etats. Ce principe de complémentarité signifie que la Cour Pénale Internationale devra systématiquement céder sa compétence face à l’initiative des justices nationales, et que celle-ci ne pourra intervenir que si les Etats ne veulent pas ou ne peuvent pas juger les auteurs de crimes internationaux. En Afrique comme ailleurs, la naissance de la Cour Pénale Internationale a suscité espoirs et inquiétudes, et l'ouverture des premiers procès a mobilisé énormément d'attention et inspiré de nombreux commentaires. Au-delà des juridictions pénales internationales, le système pénal international bénéficie également du recours au principe de la compétence universelle, en vertu duquel certains Etats, à l’instar des Pays-Bas et de la Belgique, déclarent posséder une compétence universelle leur donnant le droit d'engager des poursuites contre n’importe quel présumé criminel. C’est dans ce contexte, où la communauté internationale semble s’être donné les moyens de rendre plus efficace le châtiment des crimes internationaux, qu’apparaît le concept de responsabilité de protéger. L’on pourrait presque dire que la redéfinition de la notion de souveraineté pour inclure le concept de responsabilité de protéger les droits de l’homme parmi les grands principes du droit international s’est faite parallèlement à la reconnaissance et à la codification de la responsabilité pénale individuelle pour les crimes internationaux. Peut-être n’est-ce pas tout à fait par hasard ! La mise en œuvre efficace du concept de responsabilité de protéger met à la charge des Etats le devoir de prévenir les conflits, et suppose par-dessus tout une responsabilité de réagir devant des situations où la protection d’êtres humains est une impérieuse nécessité. Il est entendu que quand les mesures de prévention ne parviennent pas à résoudre la crise ou à empêcher que la situation se détériore, et quand un Etat ne peut pas ou ne veut pas, redresser la situation, des mesures interventionnistes de la part d’autres Etats membres de la communauté des Etats dans son ensemble peuvent s’avérer nécessaires. C’est dans ce cadre que la responsabilité de protéger trouve à croiser la justice pénale internationale et les exigences de sa mise en œuvre car les mesures coercitives en cas de carence d’un Etat peuvent être d’ordre politique, bien entendu, d’ordre économique aussi, mais également d’ordre judiciaire. La responsabilité de protéger postule donc le devoir de poursuivre les auteurs des crimes les plus graves, ceux qui portent atteinte à la conscience humaine et qui, paradoxalement, sont restés longtemps impunis. Sa mise en oeuvre semble s’affranchir de l’absence d’un ordre juridictionnel international, pour reposer sur le système pénal international dont les contours viennent d’être définis. Plus encore que les tribunaux pénaux internationaux, la justice mondialisée qu’incarne la Cour Pénale Internationale doit affronter des défis juridiques, politiques et même culturels de taille, pour la mise en œuvre de ce devoir de poursuite. Ces défis sont d’abord ceux qui concernent l’affirmation de l’existence même d’une justice pénale internationale effective, c’est-àdire acceptée et mise en œuvre par l’ensemble des Etats membres de la communauté internationale ou avec leur aide ou leur coopération. Ces défis sont aussi, et ceci se révèle à la pratique, ceux liés à la conduite des procès, dans un souci de bonne administration de la justice, celle qui allie à la fois la nécessité de réprimer (punir les coupables), de réparer, mais aussi d’aider à la reconstruction (le retour à la paix). Ce sont ces défis que je vous propose d’évoquer tour à tour.

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